« Il ne s'agit plus de commenter ou de comprendre le réel : il s'agit de produire du réel. Ce qui tue aujourd'hui et avant tout, c'est notre manque d'imagination. L'art, la littérature, la poésie sont des armes de précision. Il va falloir les dégainer. Et n'avoir pas peur de ceux qui crieront au scandale et à la trahison. » En répondant aux questions brûlantes d'actualité de Carole Guilbaud, Aurélien Barrau remet le politique et le social au coeur de l'écologie. Il nous aiguillonne vers un renouveau démocratique, où la liberté la plus fondamentale est d'abord celle du pouvoir vivre. Dans la lignée de la revue Apulée, engagée dans la défense indéfectible des libertés et attachée aux voix du monde, Les Apuléennes proposent des entretiens, essais, articles et analyses en résonance directe avec les enjeux et les perspectives actuels.
« L'Ukraine est vue de Moscou comme la pièce essentielle d'un dispositif de protection à contrôler ou, au mieux, à neutraliser.»
Arpentant les contrées d'Europe médiane et orientale depuis une trentaine d'années, le géographe et diplomate Michel Foucher, spécialiste des frontières géopolitiques, analyse le confit russo-ukrainien en mettant au jour la cartographie mentale - historique, politique, territoriale et identitaire - du duel qui oppose les deux nations suite à l'agression fratricide lancée par Vladimir Poutine. Cette cartographie entre Baltique et mer Noire, étendue par ses causes et ses effets à l'Europe entière, porte l'empreinte d'une confrontation entre un passé qui ne veut pas passer - celui de la Russie, comme puissance autocratique et impériale - à un futur qui ne semble devoir naître que dans la résistance et la souffrance, celui de l'Ukraine comme État-nation souverain « inclinant vers le monde euroatlantique » (Havel). Un duel qui affecte gravement l'état du monde et dont le déroulement et l'issue nous concernent tous.
« Plongés dans ce continent mental de la Pandémie, qui entrave la critique et qui tue le réveil des aspirations démocratiques, nos esprits sont comme occupés. »
La conviction qui nous anime en prenant aujourd'hui la parole, c'est que plutôt que de se taire par peur d'ajouter des polémiques à la confusion, le devoir des milieux universitaires et académiques est de rendre à nouveau possible la discussion scientifique et de la publier dans l'espace public, seule voie pour retisser un lien de confiance entre le savoir et les citoyens, lui-même indispensable à la survie de nos démocraties. La stratégie de l'omerta n'est pas la bonne. Notre conviction est au contraire que le sort de la démocratie dépendra très largement des forces de résistance du monde savant et de sa capacité à se faire entendre dans les débats politiques cruciaux qui vont devoir se mener, dans les mois et les années qui viennent, autour de la santé et de l'avenir du vivant.
"Quand Sissa proposa au roi Belkib une partie d'échecs bien particulière, ce dernier était loin de se douter des conséquences. Sissa demanda au souverain de déposer un grain de riz sur la première case, deux sur la deuxième, et de doubler ainsi la quantité de grains à chaque case. Lorsqu'il déclara se contenter du total de grains de riz sur la soixante-quatrième et dernière case, cela parut bien peu au roi, qui ne put pourtant jamais récompenser Sissa, comprenant trop tard que la quantité était en fait... astronomique. »
Si cette légende indienne dit combien les grands nombres nous dépassent, ce livre, conçu comme une balade à travers les concepts mathématiques, est une invitation à débusquer les facilités dans lesquelles nous tombons trop souvent en matière d'interprétation des chiffres et qui perturbent notre lecture du monde. Du biais de confirmation (cette tendance à sélectionner uniquement les informations qui renforcent des croyances en nous) au biais des numérateurs (un pourcentage de 0,01 % nous apparaît comme négligeable alors que 1 cas pour 10 000, mathématiquement identique, va nous inquiéter), en passant par la confusion entre cause et corrélation et autres pièges...
Comment ne pas s'indigner à l'égard d'un slogan gouvernemental martelé en pleine crise covid : « On peut débattre de tout. Sauf des chiffres » ; à l'égard aussi du manque de scrupules dans l'utilisation des chiffres à des fins politiques, économiques et sociales ? Et si l'important était d'adopter une attitude mathématique, une voie d'attention à la complexité, à la nuance, au raisonnement pour qualifier avant de quantifier ? Les mathématiques sont un bien commun à partager, pour comprendre ce qui se joue dans le monde et mieux intervenir dans le débat public.
Texte intégral révisé suivi d'une biographie d'Ernest Renan. Souvent comparé aux reflexions de Jules Michelet sur la nation, ou opposés à celles de Johann Gottlieb Fichte pour ce qui est de la perception allemande sur le même sujet, Qu'est-ce qu'une nation ? est resté le texte le plus célèbre d'Ernest Renan. Toujours actuel, ce chef d'oeuvre de rhétorique et de science politique a été prononcé lors d'une conférence donnée en Sorbonne en mars 1882. Il apparaît aujourd'hui comme le testament politique de ce maître à penser de la IIIe République, académicien et titulaire de la chaire d'hébreu du Collège de France. "J'en ai pesé chaque mot avec le plus grand soin", écrira-t-il plus tard: "c'est ma profession de foi en ce qui touche les choses humaines, et, quand la civilisation moderne aura sombré par suite de l'équivoque funeste de ces mots: nation, nationalité, race, je désire qu'on se souvienne de ces vingt pages-là." S'interrogeant sur les fondements de l'identité nationale, l'auteur de la Vie de Jésus, vivement affecté par l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Empire allemand, constate d'abord dans l'histoire des peuples l'existence d'un droit national à côté du droit dynastique. Développant son propos, il affirme ensuite que ni la race, ni la langue, ni la religion, ni la communauté d'intérêts, ni la géographie ne peuvent définir une communauté nationale. Pour Ernest Renan, "Une nation est une âme, un principe spirituel, [...], une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a faits et de ceux qu'on est disposé à faire encore. [Son] existence est un plébiscite de tous les jours, comme l'existence de l'individu est une affirmation perpétuelle de vie."
« Personne d'autre que le citoyen libre n'a qualité pour juger de l'emploi qu'il fait de sa liberté, sauf à voir celle-ci disparaître. Ainsi la loi ne peut-elle permettre à l'État de restreindre abusivement la liberté d'aller et venir, de manifester, de faire connaître une opinion, de s'informer, de penser pour finir. » François Sureau
Lorsque Chateaubriand déclare que « sans la liberté il n'y a rien dans le monde », ce n'est pas seulement un propos de littérateur. Il exprime cette vérité trop souvent oubliée que « sans la liberté », il n'y a pas de société politique, seulement le néant de ces individus isolés auquel l'État, porté à l'autoritarisme et à l'ordre moral, a cessé d'appartenir. Tel est bien le danger de la démocratie moderne que François Sureau s'emploie ici à désigner tant dans nos moeurs sociales que dans notre vie politique et, sans concession, à la lumière
de nos responsabilités individuelles et collectives. L'homme est voué à la liberté ; il lui revient continûment, avec « patience et souffle », d'en reformuler le projet politique et de n'y rien céder.
« La question à présent est de savoir si légiférer est bien. »
Quatre mille amendements posés sur le perchoir comme un solide obstacle à toute issue au débat sur la fin de vie à l'Assemblée le 8 avril 2021 : voilà de quoi se poser des questions. Textes et projets de loi imparfaits, affaires médiatisées, témoignent d'une incapacité à aborder le problème du déclin de la vie sans tomber dans des pièges. Pièges qu'il convient de connaître avant de s'aventurer aux abords périlleux de ce trou de la pensée où le mot exception devrait régner en maître.
Qu'arrive-t-il à la gauche ? Est-elle effectivement en train d'agoniser ? Si on n'a cessé, tout au long de sa brève existence, de prononcer son requiem, elle a jusqu'à présent toujours déjoué les pronostics. Pourtant, aujourd'hui, partout dans le monde, les mouvements de la gauche organisée connaissent un déclin important. C'est peut-être qu'il faut y voir le symptôme d'un effacement plus profond et bien plus problématique, celui de l'" imaginaire de l'égalité ", qui fut le principal moteur de la gauche mondiale depuis sa naissance au XVIIIe siècle... C'est en tout cas l'hypothèse pour le moins perturbante de ce livre.
Et pour saisir sa pertinence, Shlomo Sand nous propose de remonter aux sources de cet " imaginaire " et d'étudier le façonnement, les transformations et les ajustements de l'idée d'égalité sur plus de deux siècles. Des Diggers de la première révolution anglaise à la formation de l'anarchisme et du marxisme, du tiers-mondisme aux révolutions anticoloniales, des féminismes post-MeToo au populisme de gauche aujourd'hui, ce livre revient en profondeur sur les penseurs et les mouvements qui ont bâti la gauche mondiale. Il montre à la fois les dynamiques globales et transnationales qui les ont animés, souvent en écho les unes avec les autres, la manière dont ils ont pensé l'égalité, mais aussi comment ils se sont heurtés au " mur " de l'égalité réelle et ont pu en tirer, ou non, les leçons nécessaires.
Avec le brio et l'engagement qu'on lui connaît, Shlomo Sand relève le difficile pari d'une brève histoire mondiale de la gauche qui s'adresse, avec un grand sens de la pédagogie, au plus grand nombre, tout en proposant des hypothèses originales à l'heure où nous devons nous employer, de toutes nos forces, à réactiver l'imaginaire égalitaire.
La dette est devenue un outil de gouvernement de la démocratie. Si la crise sanitaire a ouvert une brèche dans les politiques qui lui sont liées, celle-ci risque vite de se refermer. Il est donc indispensable de s'armer pour bien argumenter face à ceux qui ne rêvent que de revenir à l'austérité.
Les institutions publiques de la dette et de la monnaie (Trésor et Banque centrale) opèrent aujourd'hui comme une usine à garantie de l'industrie financière privée. Mais émettre une dette qui puisse satisfaire l'appétit des investisseurs mondiaux n'est pas sans risque pour la démocratie et s'accompagne de contreparties sociales, économiques et politiques qui sont négociées, à l'ombre de la vie politique, sur les scènes marchandes d'attestation du crédit.
Le débat public se limite à une pédagogie rudimentaire : il faut payer la facture de la pandémie et, pour rembourser la dette, consentir à des sacrifices : travailler plus, augmenter les impôts sur la consommation (et non sur la fortune), renoncer à des services publics et des droits sociaux.
Pour les pouvoirs publics, il faut " cantonner " le potentiel subversif de cette crise sans précédent. Réduite à un événement exceptionnel et exogène au capitalisme financier, la pandémie serait une parenthèse circonscrite qu'il conviendrait de refermer au plus vite sans tirer aucune leçon structurelle, avant de " retourner à la normale " d'un marché qui sert de garde-fou aux États sociaux et discipline les peuples dépensiers.
Comment ? Comment sortir de l'impasse et sauver un pays qui étouffe sous ses charges, la médiocrité et l'impunité ? En abattant l'ennemi. Voilà la réponse de Juan Branco qui, pour les avoir beaucoup fréquentés, connaît ad nauseam l'égoïsme, la concupiscence mais aussi l'extrême fébrilité de ceux qui nous gouvernent. Tour à tour menacé, flatté, vilipendé par des médias aux ordres, lui qui a battu le pavé avec les Gilets jaunes, dont le mouvement de protestation, violemment réprimé, n'a rien perdu de sa vigueur ni de sa légitimité, appelle à un changement de paradigme majeur en proposant un programme révolutionnaire, incluant la création de tribunaux d'exception, et la mise à bas des coteries qui gouvernent le pays. Une véritable bascule pour permettre à la France de se libérer des forces nocives, et à son peuple de recouvrer sa souveraineté.
Qu'est-ce qui transforme une révolte en révolution ?
Mulhouse, mars 2020. Adrien Biassin, jeune chercheur de 29 ans, vit les signes précurseurs de la pandémie de Covid-19 avant de se retrouver pris au coeur de la tempête. D'un coup, sa vie bascule dans le confinement, marqué par le rythme des informations, du premier hôpital militaire déployé en France depuis la Seconde Guerre mondiale et des hélicoptères qui vrombissent sans cesse à quelques centaines de mètres au-dessus de chez lui.
Alors que l'étau des mesures gouvernementales se resserre, il décide de braver l'interdit du premier confinement, enfourche son vieux vélo et part en autonomie complète sur les chemins de la liberté avec son compagnon de route, Manu, pour rejoindre sa famille dans le sud de la France.
Ce récit entremêle aventure, introspection et réflexions sur l'Histoire, la condition de l'homme à l'ère de l'anthropocène et l'Etat sécuritaire. Un témoignage inédit sur la pandémie que nous avons vécue, qui appelle au courage, à la résilience et à la liberté.
À la fin des années 1960, la concurrence internationale et la peur du déclassement transforment un populisme de gauche (rooseveltien, conquérant, égalitaire) en un « populisme » de droite faisant son miel de la crainte de millions d'ouvriers et d'employés d'être rattrapés par plus déshérités qu'eux. C'est alors que la question de l'insécurité resurgit. Elle va embourgeoiser l'identité de la gauche, perçue comme laxiste, efféminée, intellectuelle, et prolétariser celle de la droite, jugée plus déterminée, plus masculine, moins « naïve ».
Cette métamorphose s'accomplit à mesure que l'inflation resurgit, que les usines ferment et que l'« élite », jadis associée aux grandes familles de l'industrie et de la banque, devient identifiée à une « nouvelle gauche » friande d'innovations sociales, sexuelles et raciales.
Les médias conservateurs n'ont plus qu'à se déchaîner contre une oligarchie radical-chic protégée d'une insécurité qu'elle conteste avec l'insouciance de ceux que cette violence épargne. Au reste, n'est-elle pas entretenue dans ses aveuglements par une ménagerie de juges laxistes, d'intellectuels jargonnants et autres boucs émissaires rêvés du ressentiment populaire ?
« Progressistes en limousine » là-bas ; « gauche caviar » chez nous.
Extrait de la préface de Serge Halimi
"
Ce livre est mon adieu à l'anglais
": Ngugi wa Thiong'o, romancier kényan, n'y va pas par quatre chemins, il décide que désormais, il n'écrira plus qu'en kikuyu.
Pour un auteur dont les oeuvres sont largement diffusées dans le monde anglophone, c'est une lourde décision, dont Décoloniser l'esprit, écrit en 1986, explique les raisons. L'origine remonte à une "Conférence des écrivains africains de langue anglaise", organisée en 1962, en Ouganda : elle excluait les auteurs écrivant dans l'une ou l'autre des langues africaines, et le jeune Ngugi se posait alors la question : "Comment a-t-il été possible que nous, écrivains africains, fassions preuve de tant de faiblesse dans la défense de nos propres langues et de tant d'avidité dans la revendication de langues étrangères, à commencer par celles de nos colonisateurs ?"
A travers son parcours personnel de romancier et d'homme de théâtre, Ngugi wa Thiong'o montre que le rôle donné aux littératures orales africaines, la vision de l'Afrique comme un tout et non comme un découpage issu de la colonisation, la référence aux traditions de résistance populaire, tout cela qui passe par la langue est la condition nécessaire pour décoloniser l'esprit.
Ngugi wa Thiong'o est actuellement professeur et directeur de l'International Center for Writing and Translation à l'université de Californie à Irvine.
Que faire des idéaux que sont l'internationalisme, le dépérissement de l'Etat et l'horizontalité radicale ? Les penser. Non pas sur le mode de la psalmodie mais selon leurs conditions de possibilité. Ou d'impossibilité ? C'est plutôt la thèse que ce livre défend, mais sous une modalité décisive : voir l'impossible sans désarmer de désirer l'impossible. C'est-à-dire, non pas renoncer, comme le commande le conservatisme empressé, mais faire obstinément du chemin. En sachant qu'on n'en verra pas le bout.
Les hommes s'assemblent sous l'effet de forces passionnelles collectives dont Spinoza donne le principe le plus général : l'imperium - « ce droit que définit la puissance de la multitude ». Cet ouvrage entreprend de déplier méthodiquement le sens et les conséquences de cet énoncé. Pour établir que la servitude passionnelle, qui est notre condition, nous voue à la fragmentation du monde en ensembles finis distincts, à la verticalité d'où ils tirent le principe de leur consistance, et à la capture du pouvoir. Il ne s'en suit nullement que l'émancipation ait à s'effacer de notre paysage mental - au contraire ! Mais elle doit y retrouver son juste statut : celui d'une idée régulatrice, dont l'horizon est le communisme de la raison.
«Quelle heure est-il ?
Tôt le matin, l'Europe se met en route pour l'école. Elle rapporte ses devoirs à la maison : lutter contre les poussées en arrière par un élan vers une union plus étroite. Le devoir sera effectué par les meilleurs élèves, ceux du noyau fondateur.
Que feront les autres ? Ils suivront, un peu à contrecoeur, par le chemin des écoliers.» Erri De Luca
Dans cet essai inédit, prolongé par quatre articles précédemment parus, Erri De Luca exprime son attachement à une Europe ouverte et humaniste. Revendiquant son devoir d'ingérence au nom de la mixité des cultures, il nous offre, par ces « mises à feu », sa vision d'une communauté humaine au-delà des frontières - telle que la littérature sait l'incarner : «Le remède obligatoire et immunitaire reste la lecture des livres du monde. Je leur dois d'être porteur de citoyennetés variées et de fraternité européenne.»
Bâtir de nouveaux fondements philosophiques et spirituels de la Cité autour de sept piliers pour que la politique ne se résume plus à la conquête du pouvoir et l'exercice de la domination. C'est l'ambition de cet essai, véritable manifeste pour guérir le politique, et nous aider à articuler cheminement personnel et transformation collective.Cet essai, à la fois témoignage vivant nourri de l'expérience politique et spirituelle de l'auteur, et réflexion intellectuelle profonde, vise à donner des bases différentes à nos pratiques et nos conceptions de la politique, si nous voulons être à la hauteur des enjeux du XXIe siècle. De l'inaliénabilité du vivant à l'intégration planétaire, il s'agit de concevoir notre présence sur cette terre comme une communauté de destins élargie à l'ensemble des êtres qui la peuplent, du règne minéral à la noosphère globale. Et dans ce nouveau cadre de Cités plurielles aspirant à devenir une seule grande Cité mondiale, vivre et penser nos rapports politiques autrement que dans la conquête du pouvoir et l'exercice de la domination.
Partant du constat que la maladie actuelle du politique vient de la crispation convulsive des systèmes religieux dans lesquels il était jusqu'ici enraciné, l'auteur nous invite, à la fois à titre individuel et collectif, à passer d'un imaginaire politique dominé par la vision prométhéenne, prédatrice et dominatrice, à une conception gaïenne de l'aventure humaine.
Ce livre nous conduit à changer notre rapport au pouvoir, notre addiction à l'exercice de la puissance sur le monde et les autres. Pour nous aider à tracer ce chemin, il propose de refonder la cité sur sept piliers. Les deux premiers nous proposent d'abandonner notre pouvoir sur la nature et le vivant, en changeant notre regard sur le sens de la richesse. Le troisième nous pousse à réarticuler notre système productif sur cette autre façon d'être au monde. Le quatrième nous emmène à refonder notre rapport politique aux autres et le cinquième à nous-mêmes. Forts de nos nouvelles fondations ancrées dans une écologie spirituelle et une démocratie du coeur, nous pourrions établir de nouvelles règles de gouvernement collectif à l'échelle d'une communauté locale (le sixième pilier) et finalement de la planète toute entière (le septième pilier).
Dans ce cadre renouvelé où se jouerait la politique post-humaniste, le monde serait plus poétique, spirituel, écologiste, intégral, plus éthique que moral, plus fondé sur l'autorité que sur le pouvoir. Et sans aucun doute plus empathique.
« Être patriote, en ce moment charnière, demande du courage et de l'imagination. Notre démocratie est en haillons, nos procédures de vote sont cassées, notre langage abîmé, notre discours politique réduit à des cris de haine. On ne pourra même pas dire, comme Sartre jadis, "Jamais nous n'avons été aussi libres que sous l'Occupation". Au contraire, jamais il n'a paru si terriblement difficile de résister. Nous, Américains, ne pouvons plus nous cacher derrière l'illusion d'être une démocratie par essence ou par prédestination. La démocratie, cela se mérite. » Alice Kaplan
Publié au printemps 1970 par El-Fath, l'organisation de Yasser Arafat, La Révolution palestinienne et les Juifs marque un tournant dans la pensée politique de la résistance palestinienne. L'organisation propose la création une Palestine démocratique non confessionnelle, d'un État unique dans lequel coexisteraient musulmans, juifs et chrétiens, «seule solution permanente qui apportera une paix durable et la justice».
El-Fath
El-Fath s'affirme après la guerre de juin 1967 comme la force dominante sur la scène palestinienne, Arafat devenant le président de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP).
Alain Gresh, Journaliste, ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, a écrit plusieurs livres dont Israël-Palestine, vérités sur un conflit (Fayard) et, avec Hélène Aldeguer, Un chant d'amour. Israël-Palestine, une histoire française (La Découverte). Il est le directeur du journal OrientXXI.info.
FABRICATION DES ÉLITES : UN SCANDALE DÉMOCRATIQUE
« La République ne vous appartient pas. » Le 9 décembre 2019 Juan Branco ouvre par ces mots son discours dans l'amphithéâtre d'honneur de Polytechnique. Face aux étudiants de la plus prestigieuse école du pays, il se livre à une leçon magistrale sur le dévoiement du système qui vient de les consacrer et donne les clés pour comprendre les finalités d'un système éducatif où les écoles du soi-disant mérite sont créées pour reproduire une logique de domination au profit de quelques-uns. Son appel au sursaut est un plaidoyer pour une idée de la République, abandonnée par leurs aînés.
Suivi des échanges avec les étudiants, un discours qui s'adresse à tous les Français et fera date sur un système de sélection dont ils sont avant tout victimes.
Déclenchant l'alarme sur la nouvelle loi prétendant régenter la fin de vie, le bloggeur Koz nous raconte ici son enquête son enquête auprès des soignants, des proches, dans les établissements de soins palliatifs. Contre les abstractions statistiques et l'effacement de la mort, il défend et illustre ici l'ultime sens de la vie. Lucide. Quand certains demandent un droit de mourir dans la dignité par l'euthanasie, doit-on considérer dès lors comme indigne la mort naturelle des autres ? Comment en sommes-nous arrivés à un tel paradoxe ?
À la fois libelle et enquête, le livre-évènement d'Erwan Le Morhedec force à regarder les choses en face : si l'euthanasie et le suicide assisté sont légalisés, les valeurs fondamentales de liberté, d'égalité et de fraternité qui fondent l'humanisme républicain de notre société seront effacées. Cette loi soumettra des êtres parvenus au stade ultime de la vulnérabilité aux pressions conjointes de la société, de la médecine et de l'entourage. Elle oblitérera la latitude de jugement des soignants et des familles, les placera face à des contradictions et des dilemmes insurmontables, les forcera à la désincarnation pour faire d'eux un instrument fatal.
Mais cet ouvrage essentiel n'est pas que percutant. Il est aussi convaincant en raison de l'investigation de terrain qui le fonde. C'est auprès des soignants, des malades et de leurs proches, dans les établissements de soins palliatifs, qu'Erwan Le Morhedec est allé recueillir, au cours d'heures d'entretiens, les témoignages de situations réelles.
La France est-elle prête à tant d'aubes lugubres ?
Ce n'est pas seulement qu'un président soit un politicien. Le pire est qu'il soit entouré de politiciens. Et nous, nous sommes des citoyens. Nous ne devons donc pas voir le monde à travers leurs yeux, en disant : « Bon, il faut faire des compromis, il faut faire ce choix pour des raisons politiques. » C'est la situation dans laquelle se trouvaient les abolitionnistes avant la guerre de Sécession, quand on leur disait : « Écoutez, il faut voir ça du point de vue de Lincoln. » Or Lincoln ne pensait pas que la première des priorités était d'abolir l'esclavage. Pourtant, le mouvement anti-esclavagiste en était convaincu. Alors les abolitionnistes dirent : « Nous allons exprimer notre propre position, et nous le ferons avec une telle force que Lincoln sera obligé de nous écouter. » Telle est notre histoire. Chaque fois qu'un progrès a eu lieu, c'est parce que les gens se sont comportés comme des citoyens, et non comme des politiciens. Ils ne se sont pas contentés de râler. Ils ont travaillé, ils ont agi, ils se sont organisés et se sont révoltés si nécessaire.
De la désacralisation du New Deal à l'après-11 Septembre, en passant par les premiers sit-in du mouvement noir et la défense des actions de sabotage contre la guerre du Vietnam, ce recueil de textes inédits en français rassemble un demi-siècle d'interventions.
Auteur d'Une histoire populaire des États-Unis et d'une vingtaine d'ouvrages consacrés à l'incidence des mouvements populaires sur la société américaine, Howard Zinn (1922-2010) a été tour à tour docker, bombardier, cantonnier et manutentionnaire avant d'enseigner à la Boston University. Militant de la première heure pour les droits civiques et contre la guerre du Vietnam, il a conçu son métier d'historien comme indissociable d'un engagement dans les luttes sociales.
La démocratie, l'impérialisme, l'oligarchie, la théocratie, le marxisme, le maoïsme... Bien sûr, vous en avez déjà entendu parler, mais savez-vous vraiment de quoi il s'agit ? Voici enfin un livre de "vulgarisation intelligente", qui vous aidera à comprendre les 5o principales théories politiques. Il met les plus grands penseurs au défi d'expliquer de façon claire et accessible toutes ces théories en : 30 secondes, 2 pages, 300 mots et i image, soit 3 minutes en tout pour comprendre ! Vous revisiterez ainsi le passé, comprendrez l'actualité, et n'hésiterez plus à donner votre avis en politique de façon sûre et avisée !
Quand Marx écrit
Sur la question juive
en 1843, il a vingt-cinq ans. En répondant à
La Question juive
de Bruno Bauer, chef de file des «Jeunes hégéliens», il intervient dans le débat qui bat alors son plein sur les droits civiques des juifs dans «l'État chrétien». Mais cette controverse n'est pour lui que l'occasion d'élargir le débat à la question des rapports entre l'émancipation limitée aux droits politiques et «l'émancipation humaine», entre l'aliénation religieuse et l'aliénation sociale. La question juive n'est donc ici que le révélateur d'une grande question de la modernité marchande, celle du « dédoublement » entre la société civile et l'État, entre l'homme et le citoyen, entre le privé et le public.
L'article de Marx a suscité bien des polémiques. Il fut la pièce à conviction d'un procès absurde et anachronique pour «antisémitisme», instruit notamment par Robert Misrahi. D'autres ont cru voir dans la critique, non celle des droits de l'homme, mais de leurs limites à une époque donnée, «un manuel de l'apprenti dictateur». Plus sérieusement, des auteurs se réclamant de l'héritage théorique de Marx lui ont reproché son incompréhension du rôle de la question nationale comme médiation entre émancipation politique et émancipation humaine. Dans une présentation de Sur la question juive (publié ici dans une nouvelle traduction) et dans un retour critique sur la controverse, Daniel Bensaïd, spécialiste de l'oeuvre de Marx, répondent à ces interpellations.
Il actualise la polémique contre les «nouveaux théologiens» (Jean-Claude Milner, Benny Lévy, Alain Finkielkraut). Alors que pour Marx, le peuple juif s'est maintenu «dans et par l'histoire», ces derniers renvoient l'existence juive à l'éternité biblique et à l'irréductible singularité du peuple élu. Alors que Marx veut « transformer les questions théologiques en question profane », ils rebroussent le chemin et transforment une question sociale et historique en question théologique. Signe inquiétant de temps obscurs.
Deux annexes inédites en français complètent le dossier de Sur la question juive : un article de Bruno Bauer de 1843 et un texte de Roman Rosdolsky sur Engels et la question juive en 1848.
Notre époque a besoin plus que jamais de Bakounine. Non le Bakounine des salons mondains, celui que l'on convoque dans les arrondissements chics de la capitale, pour étaler sa culture, et provoquer le bourgeois... que l'on est. Mais le Bakounine du Catéchisme révolutionnaire, photographié par Nadar. L'oeil sombre. La barbe opulente, le cheveu long. Trapu et socratique. Vêtu de noir. Déterminé à aller jusqu'au bout.
Dans son Catéchisme, Bakounine rassemble tous les dogmes du révolutionnaire. Une bonne fois pour toutes. Sous forme bien souvent axiomatique. Afin de les avoir sous la main. Pour ceux qui désirent fonder une société secrète internationale. Comme lui. De la famille aux principes généraux, le philosophe a compris qu'il fallait se tourner avant tout vers la question sociale; que celles de la nation et de la chose publique sont des leurres, puisqu'elles ont épuisé leur potentiel strictement politique.
Au lecteur d'aujourd'hui, il importe de faire siens tous ces principes. Car, l'individu du XXIe siècle, témoin et acteur de la plus grande crise financière des temps modernes, n'est plus vraiment séduit par l'action révolutionnaire. Il préfère résister par la pensée, confortablement installé sur une serviette de plage.
Vos photos de vacances contre celle de Bakounine par Nadar. Mettons un peu notre peau sur la table de travail et non sur le sable chaud. Pour la survie de notre espèce.
La présente édition est établie d'après l'édition de Max Nettlau, publié en 1866.