Impossible, en évoquant la Russie, d'échapper à la tourmente du " pour " ou " contre " Poutine. Je le dis franchement : loin de moi ici l'idée de répondre définitivement à la question " Qu'y a-t-il dans la tête de Poutine ? ", ni d'affirmer que Poutine représente un " bien " ou un " mal " pour son pays – en aucun cas je ne me pose en juge –, mais j'ai plutôt le désir d'écouter l'essentiel, c'est-à-dire ce que les Russes ont à en dire, et de montrer comment, bon an mal an, cet homme a accompagné leur vie ces dix-sept dernières années.
En partant de l'extrême-est pour remonter jusqu'à la partie européenne de la Russie – ce qu'avait choisi de faire, au moment de son retour, Alexandre Soljenitsyne, lauréat du Nobel de littérature –, nous allons montrer quels sont les ressorts, les sentiments qui influencent le choix du peuple ; pourquoi voter Poutine n'est pas forcément, dans la tête des Russes, choisir un " dictateur ". Saisir la " petite réalité " dans la " grande " et interroger la société sur son quotidien, ses espoirs, ses angoisses, sa place dans le concert des nations. Sans parti pris ni vision stéréotypée, faire oeuvre de curiosité attentive et bienveillante en exposant le bouillonnement d'une société complexe et si attachante.
A. N.
Un continent derrière Poutine ? est également un documentaire d'Anne Nivat, Fabrice Pierrot et Tony Casabianca diffusé sur France 5.
Anne Nivat est grand reporter indépendante et écrivain. Spécialiste reconnue de la Russie où elle a vécu pendant dix ans (jusqu'en 2005), elle est l'auteur, entre autres, de Chienne de guerre (2000), prix Albert-Londres ; Lendemains de guerre en Afghanistan et en Irak (2004) ; Islamistes. Comment ils nous voient (2006) ; Par les monts et les plaines d'Asie centrale (2006) ; Bagdad zone rouge, et La République juive de Staline (2013), tous parus aux éditions Fayard.Tout comme son dernier livre, Dans quelle France on vit, grand succès de librairie, publié l'année dernière.
Pourquoi avons-nous besoin de chefs ? Pourquoi leur obéit-on ? Pourquoi les sociétés n'ont-elles pas toutes les mêmes régimes politiques ? Pourquoi se défie-t-on autant de la politique ?
En abordant ces questions si actuelles, ce dialogue veut faire comprendre que la démocratie, qui nous apparaît aujourd'hui bien fragile et même décevante, est toujours à recommencer, à inventer, et qu'il est de notre responsabilité de la faire vivre.
Myriam Revault d'Allonnes est professeur émérite des universités à l'École pratique des hautes études. Elle a notamment dirigé, de 2006 à 2013, une collection de philosophie pour enfants, " Chouette ! Penser ", aux éditions Gallimard Jeunesse.
En finira-t-on jamais avec le prolétaire ? L'homme déraciné, aliéné, exploité, dont Marx annonçait la disparition dans la future cité communiste, hante toujours la société mondiale. L'homme dépossédé de lui-même, et au nom de qui toutes les révolutions du siècle ont eu lieu, n'a pas disparu, loin s'en faut. Il s'est multiplié au point que le monde entier - le tiers monde ! - se prolétarise sans cesse, au sens strict où l'entendait l'auteur du Capital. Jacques Ellul propose ici une analyse totalement subversive. D'une certaine manière, elle prend Marx au mot ! Le prolétariat, affirme-t-il, n'a pas été un produit du seul capitalisme, mais bien de la société industrielle elle-même. Ainsi, la révolution soviétique, la voie chinoise, tout comme l'évolution du tiers monde, aboutissent - au rebours de leurs intentions proclamées - à la création d'un immense prolétariat mondial. Toutes les révolutions ont échoué. Toutes, au-delà des discours et des idéologies, ont cédé à la fatalité industrielle et technicienne du capitalisme qu'elles entendaient combattre. Et pourtant, en ce début des années quatre-vingts, la première vraie révolution devient possible. Une extraordinaire conjonction de facteurs historiques - et technologiques - rend vraisemblable une rupture politique infiniment plus radicale que tout ce que les idéologies ont jusqu'alors envisagé. Pour quelles raisons ? À quelles conditions ? Serions-nous encore capables d'une véritable espérance révolutionnaire ?
L'État-providence est toujours en crise. Mais celle-ci a changé de nature. Au-delà des lancinants problèmes de financement et de gestion, au-delà des questions posées sur l'efficacité du système de redistribution, ce sont les principes organisateurs de la solidarité et le conception même des droits sociaux qui se trouvent remis en cause. La crise est maintenant d'ordre philosophique. Elle est liée à l'avènement d'une nouvelle question sociale.
Il ne s'agit pas plus seulement, comme il y a dix ans, de relégitimer l'État-providence. Devant les fractures sociales des années 1980, l'intervention publique a en effet retrouvé toute sa justification. C'est une refondation intellectuelle et morale qu'il faut aujourd'hui procéder. Pierre Rosanvallon explore, dans ce livre, les formes que pourrait prendre un État actif-providence lié au développement de la citoyenneté sociale. Il invite notamment à enrichir la notion de droit social, à reformuler la définition du juste et de l'équitable, à réinventer les formes de la solidarité. Cette recherche est indissociable d'une pratique plus active de la démocratie et d'une idée renouvelée de la nation.
Ce livre propose une rediscussion d'ensemble de la question sociale. Il prolonge et renouvelle profondément les analyses désormais classiques que l'auteur avait menées dans La Crise de l'État-providence.
Partout dans le monde, la sécularisation s'accélère, alors même que les identités religieuses s'affirment avec vitalité et, parfois, radicalité. Ce livre éclaire cette supposée contradiction en regard des attentes individuelles et sociales qui naissent du pluralisme actuel. Il montre les différents processus de " laïcisation " à l'œuvre, avec la démocratie et les droits de l'homme, l'individualisme... Dans bien des régions du globe, les États prennent des mesures constitutionnelles pour mettre fin au poids d'une religion officielle et permettre le pluralisme des convictions religieuses et philosophiques, ainsi que la liberté de conscience ; ils refusent les vetos religieux qui voudraient brider les libertés collectives et individuelles. Ils favorisent divers accommodements. En même temps que cette " laïcisation ", d'autres États s'efforcent d'entretenir de bonnes relations avec certaines religions, en leur accordant des avantages matériels et parfois des droits nouveaux. Cet ouvrage de référence offre une compréhension sociologique de ces mutations religieuses et laïques en cours dans nombre de sociétés, traversées par des défis similaires, mais apportant des réponses souvent contrastées. Il propose également une approche critique des théorisations qui ont souvent vite fait l'impasse sur le processus de laïcisation.
La question de l'opinion publique - de sa puissance, de sa mesure et de son contrôle - hante le gouvernement des sociétés occidentales depuis la fin du XVIIIe siècle. Intellectuellement, elle mène au coeur des contradictions de la pensée démocratique. Tout à la fois vénérée et redoutée, écoutée et dénigrée, elle s'est imposée très tôt aux élites politiques et savantes comme une énigme à résoudre autant que comme un risque à domestiquer. Cette « force impalpable comme le vent » qu'évoquait encore à la fin du siècle dernier un publiciste anglais se matérialise aujourd'hui à nos yeux sous la forme presque exclusive du sondage.Une telle révolution dans nos manières de penser le nombre, en statistique et en politique, n'a paradoxalement jamais fait l'objet d'une véritable histoire. A l'heure où chaque élection importante semble devoir tourner au procès des sondages, ce livre voudrait revenir sur les origines de ce phénomène et comprendre comment cette improbable statistique de l'opinion a fini par s'imposer comme une composante majeure de notre univers démocratique. En exhumant les débats passionnés qui ont jalonné la naissance des enquêtes d'opinion, en revenant sur les pas de ses pères fondateurs, en reconstituant avec précision le récit de l'avènement de cet instrument, en s'interrogeant sur la spécificité du rapport que la France entretient avec les sondages, l'auteur veut inviter à réfléchir aux implications politiques de cette invitation.
Ils sont ou ont été ministres; ils sont chefs de partis, fonctionnaires ou députés, ils appartiennent aux cabinets ministériels ou à celui du président de la République, règnent sur la communication ou les médias. Dans les années 60 et 70, ils ont appartenu à des groupes d'extrême droite comme Jeune Nation, Occident, Ordre nouveau: Alain Madelin, Patrick Devedjian, Alain Robert, Claude Gloasgen, Gérard Longuet, Anne Méaux et beaucoup d'autres ont fait partie de cette génération Occident.
Pourquoi et comment ont-ils rejoint l'extrême droite, qu'y ont-ils fait? Après une longue, minutieuse et difficile enquête de plusieurs années, Frédéric Charpier raconte la saga de cette génération. Dressant la généalogie du mouvement, il met en lumière le rôle crucial de la puissante Fédération des étudiants nationalistes, matrice de bien des groupuscules extrémistes et pépinière de futurs hommes de presse et de pouvoir. Quarante ans après, l'auteur dévoile les querelles du mouvement Occident, l'étroite surveillance policière dont il est l'objet, mais aussi sa sociologie et son fonctionnement en "bande". Comment se sont recyclés et reclassés les anciens d'Occident? Que leur reste-t-il de cet engagement extrémiste? Grâce aux témoignages inédits d'ex-militants et à des archives et des documents confidentiels. Frédéric Charpier fait revivre quatre décennies d'histoire souterraine pendant lesquelles surgissent des femmes et des hommes aujourd'hui au pouvoir.
Mon ambition est de penser la démocratie en reprenant le fil de son histoire. Mais il est tout de suite nécessaire de préciser qu'il ne s'agit pas seulement de dire que la démocratie a une histoire. Il faut considérer plus radicalement que la démocratie est une histoire. L'objet de l'histoire conceptuelle du politique est ainsi de suivre le fil des expériences et des tâtonnements, des conflits et des controverses, à travers lesquels la cité a cherché à prendre forme légitime. En retraçant la généalogie longue des questions politiques contemporaines, il s'agit de reconstruire la façon dont des individus et des groupes ont élaboré leur intelligence des situations, de repérer les récusations et les attractions à partir desquelles ils ont formulé leurs objectifs, de retracer la manière dont leur vision du monde a borné et organisé le champ de leurs actions. C'est pour cela une histoire qui a pour fonction de restituer des problèmes plus que de décrire des modèles.
L'histoire ainsi conçue est le laboratoire en activité de notre présent, et non pas seulement l'éclairage de son arrière-fond. L'attention aux problèmes contemporains les plus brûlants et les plus pressants ne peut se dissocier pour cette raison d'une méticuleuse reconstruction de leur genèse.
Trois ans d'enquête pour ce livre accusateur !
Les auteurs dénoncent les pratiques des multinationales de l'agroalimentaire, relayées par les instances gouvernementales. Ils s'attaquent à ces conseils nutritionnels devenus vérités premières : "les laitages renforcent la solidité des os", "pour maigrir, il faut diminuer les graisses", "les vitamines sont dangereuses"... Ils mettent en lumière les intérêts privés, le poids des lobbies, le rôle de la publicité, le retard réglementaire français.
Ils proposent une alternative nutritionnelle mais aussi un cadre susceptible de garantir, dans l'avenir, l'indépendance de l'information médicale.
"Ce livre illustre bien la dérive liée à la non-indépendance d'experts dotés par ailleurs d'un pouvoir exorbitant."
Paul Lannoye, député européen
"Le sujet de ce livre est extrêmement important et il est formidable que cette question soit soulevée en France. Je suis persuadé que cet ouvrage aura un impact."
Pr Walter Willett, président du département Nutrition de l'école de Santé publique de Harvard
"Ce livre clair et précis réussit à déclencher un système de "rétrocontrôle" qui sera bénéfique à l'ensemble du monde nutritionnel."
Dr Marvin Edeas, président de la société française des Antioxydants
C'est entendu : nous vivons dans une " société d'individus ". Mais on peut entendre ce diagnostic de deux manières. D'un côté, l'individu serait un être absolument indépendant par rapport aux appartenances collectives ; de l'autre, il sacrifierait au culte du moi et au narcissisme. Dans ces deux formes d'individualisme négatif, le sujet n'accepte rien à part lui-même. C'est évidemment un leurre, car l'individu en société ne " tient " pas tout seul. Une politique de l'individu doit donc passer par le soutien, au niveau des politiques tant publiques que locales. Plus fondamentalement, la question du lien social doit devenir un objet politique, afin que les capacités de chacun et la protection de la vulnérabilité soient prises en compte dans la définition du bien-être collectif.
Fabienne Brugère est professeure de philosophie à l'université de Bordeaux 3. Elle a publié de nombreux ouvrages, dont Le Sexe de la sollicitude (Seuil, 2008) et un Dictionnaire politique à l'usage des gouvernés (Bayard, 2012, avec Guillaume le Blanc).
L'Islam nous accuse. On mesure, dans ses griefs, le poids des troubles du dernier demi-siècle, décolonisation, conflit palestinien, question du Cachemire, mobilisation contre le communisme. Mais y a-t-il des causes plus lointaines, des blessures plus profondes ? Le discours islamiste le dit, invoque le Prophète et la génération fondatrice, énumère la litanie des offenses subies quatorze siècles durant, invite les peuples musulmans à n'en rien oublier, y trouve les raisons compulsives de ses combats.
Il ne s'agit pas de balayer ce discours identitaire, mais de constater qu'il est tenu par de jeunes générations musulmanes plus au fait de l'Occident honni que des traditions de l'Islam. On met donc en lumière dans un premier temps certains des mécanismes fondamentaux de l'État islamique ancien et de ses rapports avec la foi - mécanismes irréparablement brisés par la modernité. On insiste ensuite sur l'ampleur de l'esprit de " réforme ", d'adaptation à la modernité depuis le XIXe siècle, et sur son échec aussi surprenant que relatif. Dans une conclusion à deux voix, les auteurs tombent enfin d'accord sur le modernisme des mouvements islamistes, et sur l'héritage tiers-mondiste qu'ils pervertissent.
Le constat est douloureux, mais irréfutable : malgré le succès de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon en 2012, le Front national réussit bien mieux que le Front de gauche à capter le mécontentement populaire. Comme dans la plupart des pays d'Europe, la crise du capitalisme profite moins à la gauche " radicale " qu'à une mouvance nationaliste favorable au capitalisme ! Tel est le paradoxe analysé dans ce livre.
Paralysé par la peur de dire " la même chose que Le Pen ", le Front de gauche s'enferme dans trois contradictions. Il veut restaurer la souveraineté populaire mais ne défend plus la Nation, seul espace possible pour une réelle démocratie. Il lutte pour une " autre Europe ", sociale et solidaire, mais n'assume pas la nécessaire rupture avec l'ordre juridique et monétaire européen. Il est anticapitaliste mais renonce au protectionnisme contre le libre échange mondialisé qui brise toutes les résistances. Souveraineté nationale, désobéissance européenne et protectionnisme : tels sont les trois sujets tabous dont la gauche radicale doit se ressaisir, au lieu de les abandonner au Front national qui a beau jeu de se présenter comme le seul protecteur du peuple français face à la pression des marchés et à l'Europe ultralibérale.
Aurélien Bernier, ancien dirigeant d'Attac, proche du Front de gauche, collabore au Monde diplomatique. Il a notamment publié Le Climat otage de la finance (2008), Désobéissons à l'Union européenne ! (2011) et Comment la mondialisation a tué l'écologie (2012), aux éditions Mille et Une Nuits.
La gauche, c'est d'abord une attitude face à la société, fondée sur une certaine conception de l'homme.
Sont de gauche ceux qui ne se résignent pas à l'injustice, la déraison, la barbarie du monde. Ceux qui voient dans la mauvaise organisation de la société, et non dans la nature des choses, la responsabilité du désordre existant. Ceux qui entendent changer le monde par l'action collective, et donner vie à leurs valeurs : liberté, égalité, solidarité, droits de l'homme, démocratie, justice sociale, laïcité, défense de la nature.
Henri Weber explique à Inès, 13 ans, et Clémence, 15 ans, comment ces valeurs s'incarnent dans trois grands objectifs : maîtriser notre avenir collectif, harmoniser notre société, édifier une démocratie accomplie.
Au début des années 70, à la faveur de luttes intestines et d'opportunités politiques, Jean-Marie Le Pen s'impose peu à peu à l'extrême droite et mène sur le devant de la scène un agrégat de groupuscules, le Front national. Valérie Igounet retrace la longue et chaotique gestation du parti, décrypte le travail des idéologues, ceux qui lui ont donné son identité et une certaine unité. Mais l'histoire du Front national, c'est d'abord celle d'un homme politique qui reste à la tête de sa formation pendant près de quarante ans, d'un provocateur bruyant qui ne supporte pas ses numéros deux, rivaux potentiels, jusqu'à l'arrivée de sa fille Marine. Dans les années 2000 il lègue à cette dernière un parti toujours aussi extrémiste sur le fond, mais plus présentable, qui recueille près de 18% de voix à l'élection présidentielle de 2012 et gagne onze mairies aux municipales de 2014.
Avec patience et détermination l'historienne a réussi à pénétrer l'organisation jusqu'à obtenir de longs entretiens avec nombre de militants, de dirigeants anciens et nouveaux, et avec Jean-Marie Le Pen lui-même. Plusieurs d'entre eux lui ont confié archives et papiers personnels. S'appuyant sur cette masse de documents inédits, elle raconte, pour la première fois, l'histoire vivante et complète des quarante années qui ont fait du Front national un acteur majeur de la vie politique française.
Valérie Igounet est historienne, chercheuse associée à l'Institut d'histoire du temps présent (CNRS). Spécialiste de l'extrême droite et du négationnisme, elle est l'auteure d'Histoire du négationnisme (Seuil, 2000) et de Robert Faurisson. Portrait d'un négationniste (Denoël, 2012).
La démocratie a été happée par le principe de représentation, elle n'est pensée que par lui, elle en est devenue prisonnière. Elle a également été engloutie par le marché qui lui impose ses lois, comme le montre jusqu'à la caricature l'actualité. Pourtant, malgré la montée des populismes, la défiance à l'égard des élus et l'apparente indifférence politique, l'idée démocratique vit dans les quartiers, les villes, les écoles, les entreprises, portée par des collectifs informels de citoyens qui prennent en charge directement les questions qui les préoccupent et s'impliquent dans les grands débats de société.
Ces expériences manifestent une forme nouvelle de démocratie qui n'a pas encore trouvé son nom. L'ancienne, toujours présente, s'appelait démocratie représentative ou démocratie électorale ; celle qui émerge hésite entre démocratie d'opinion, démocratie du public ou démocratie participative. Elle pourrait aussi prendre pour nom démocratie continue. Telle est la proposition de Dominique Rousseau, qui défend ici les principes et les implications d'une profonde réforme institutionnelle prenant acte du caractère vivant et concret de l'exercice de la démocratie.
Dominique Rousseau est professeur de droit constitutionnel à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature de 2002 à 2006, il a été élu co-directeur de l'École de droit de la Sorbonne en 2013.
En France, la Révolution a voulu instaurer un corps politique formé de citoyens égaux, avec le risque, qu'on lui a assez reproché, d'inventer une abstraction. En effet, dans les relations quotidiennes, la vie de travail, les rapports de voisinage, le corps social est marqué par une attention aiguë à ce que chacun " est ", et en particulier à ses origines. La France où les immigrés et leurs descendants ont à trouver leur place n'a donc pas l'unité et la beauté d'une épure. Leur insertion dans la société où ils arrivent est régie par d'autres lois que leur intégration au corps politique. L'abandon de l'ancien idéal d'" assimilation ", les exigences nouvelles des employeurs en matière de " comportement ", l'image que les Français se font de l'islam ont ouvert une faille entre deux formes d'appartenance. Une société résolument multiculturelle serait-elle la solution ? Ou relève-t-elle d'une utopie qui ne veut pas voir les contingences de ce bas monde ? Réflexion faite, après avoir entendu tous les arguments, Philippe d'Iribarne estime que l'idéal républicain reste le fondement nécessaire d'un monde où ceux qui sont venus de loin seront réellement reconnus comme des semblables.
Philippe d'Iribarne, directeur de recherches au CNRS, est l'auteur notamment de La Logique de l'honneur (Seuil, 1989), Cultures et Mondialisation (en collaboration, Seuil, 1998), L'Étrangeté française (Seuil, 2006), Penser la diversité du monde (Seuil, 2008) et L'Épreuve des différences (Seuil, 2009).
Et s'il fallait enfin tirer les conséquences des crises à répétition que nos sociétés traversent lorsqu'elles sont confrontées aux débordements inattendus des sciences et des techniques ? S'il fallait en finir une bonne fois pour toutes avec la vision héroïque des décisions tranchantes et tranchées que le souverain prend en situation d'incertitude et en toute méconnaissance de cause ? Si Alexandre rengainait son épée, le monde s'effondrerait-il ? Non, mais la démocratie, elle, en ressortirait fortifiée. Tel est le propos des auteurs de ce livre. Ces derniers refusent les traditionnelles oppositions entre spécialistes et profanes, professionnels de la politique et citoyens ordinaires. Ils concentrent plutôt leur attention sur les nouvelles relations entre savoir et pouvoir qui émergent des controverses sociotechniques et sur les procédures inventées pour les traiter. L'enjeu est de taille : faire apparaître les conditions dans lesquelles les sociétés démocratiques vont se rendre capables d'affronter les défis des sciences et des techniques, redéfinir un espace public réunissant non pas des individus désincarnés mais des femmes et des hommes pris dans des histoires singulières. Après l'âge de la démocratie délégative, celui de la démocratie dialogique ?
Oui, la gauche américaine existe bel et bien, et le récent mouvement Occupy Wall Street en porte le drapeau, mais qui connaît son histoire ? Ce livre dévoile deux siècles méconnus d'une vraie gauche, morale, sociale, antiraciste, égalitariste, féministe et aujourd'hui écologiste, qui ne saurait rentrer dans le cadre conformiste et cravaté du Parti démocrate, et agit le plus souvent hors du ballet bien réglé que mènent les deux grands partis " de gouvernement ".
Cette gauche, on la voit apparaître, se battre, penser et gagner, lors du débat sur l'abolitionnisme qui ne prend fin qu'avec la guerre de Sécession. Une deuxième fois entre 1880 et le New Deal de Roosevelt, sous des formes sociales et même socialistes nettement affirmées. Enfin, une troisième fois au cours des fameuses " Sixties " et de ce qui s'en suivit, à savoir un mouvement de protestation radical, multiforme, se réorganisant sans cesse et inventant un nouveau Nouveau Monde.
C'est bien sûr à l'arrivée d'une quatrième émergence de la vraie gauche américaine qu'appellent de ses vœux ces pages roboratives.
Historien, représentant éminent de la Nouvelle Gauche américaine, Eli Zaretsky est professeur à la New School for Social Research de New York. Il est notamment l'auteur d'un livre qui fait déjà autorité : Le Siècle de Freud, Une histoire sociale et culturelle de la psychanalyse (Albin Michel, coll. " Sciences humaines ", 2008).
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Marc Saint-Upéry.
La France n'est pas assez républicaine. Tel est l'argument principal de cet ouvrage, qui renouvelle la pensée républicaine française à la lumière de la philosophie politique anglo-américaine et de la sociologie critique.
S'inscrivant en faux à la fois contre la théorie républicaine classique, aveugle aux différences, et contre la philosophie multiculturaliste, adepte de la reconnaissance des identités collectives, le républicanisme critique souligne les effets de domination produits par l'application décontextualisée des idéaux abstraits du républicanisme. Mais il reconstruit aussi la citoyenneté républicaine sur la base d'un idéal de non-domination : ce qui importe, ce n'est pas que le citoyen républicain soit " émancipé ", " toléré " ou " reconnu " dans son identité ou sa religion, c'est qu'il soit " non dominé ".
Cécile Laborde dessine ainsi les contours d'une république de la non-domination, qui revisite et amplifie les thèmes traditionnels du républicanisme à la française - laïcité, citoyenneté, égalité des chances, émancipation féminine, autonomie individuelle, intégration nationale -, et constitue une alternative progressiste au libéralisme et au multiculturalisme anglo-américain.
Cécile Laborde est Professeur de théorie politique à l'université de Londres.
L'autogestion n'est pas la fin de la politique, mais sa généralisation.
L'autogestion n'est pas la collectivisme, mais la dépropriation.
L'autogestion n'est pas la transparence, mais l'expérimentation.
Quelle est l'origine des partis politiques, quelle en est l'organisation, faut-il les supprimer et les remplacer par d'autres ? Maurice Duverger esquisse dans les derniers chapitres une nouvelle typologie des systèmes politiques d'Occident - pierre angulaire d'un véritable traité de l'État occidental - démontrant que la séparation des pouvoirs dépend moins des dispositions de la Constitution que de la structure des organisations partisanes. Un livre pour prévoir et réformer.
Avec les nations et les nationalismes, sommes-nous donc revenus au XIXe siècle ? Faut-il se dire, à cinq ans du XXie, que le XXe aura été un siècle pour rien ? Un siècle maudit, commencé avec la guerre de 14-18, achevé avec la chute du Mur de Berlin ? Et qui aura vu disparaître quatre empires, imploser une superpuissance, s’abattre plusieurs génocides et déferler la haine de l’homme pour l’homme comme la perte du sens ? Jean Daniel témoigne, raconte, relate sans cesse ses expériences partout, ses entretiens avec tous, ses doutes intimes. Au terme de son impétueux voyage, il se risque ou se contraint à faire encore des paris. Sur les nations. Sur l’Europe. Et même sur l’homme.
"Tout près de moi : Mai 68, le Chili populaire, les impasses de l'opposition en France, la fin de beaucoup d'illusions.
A l'horizon : les nouveaux mouvements sociaux, la crise de l'Université, la société post-industrielle, l'indispensable et si difficile transformation de la gauche.
Toujours : le travail obstiné de la sociologie et le refus de l'Un. De plus en plus : la distance qui m'éloigne de toi, mon temps qui court, l'effort pour suivre le passé et l'avenir, peut-être le regret de ne pas goûter l'instant.
Ces lettres écrites à une étudiante en sociologie pendant l'été 74 sont l'envers des livres qui ont rempli mes récentes années de travail. Les idées s'y mêlent aux réactions, les raisonnements aux préférences, les sentiments à l'analyse. Non pour retrouver la vie derrière les livres mais pour suivre le travail de la sociologie, pour participer, seul mais solidaire, à la transformation de la société et pour partager la parole et le silence."
Alain Touraine
Notre monde est menacé sur tous les fronts. Et l'économie de profit, loin de freiner les gaspillages, la pollution, les armements, la surpopulation, les inégalités sociales, les encourage ou, pire, n'arrive plus à les contrôler. Les Etats démunis ne sont plus les seules victimes de ces dérèglements : les pays riches ont aussi leur quart monde. La pauvreté n'a pas de frontière, pas plus que l'air, la terre, l'eau et le vent n'ont de patrie. Tchernobyl, le krach boursier d'octobre noir, les invasions de sauterelles ou d'algues nous démontrent qu'il n'est pas de catastrophe locale qui n'ait de répercussion planétaire.
René Dumont fait aujourd'hui le bilan, exemples et chiffres à l'appui, des menaces qui pèsent sur la planète. Il donne aussi quelques conseils, ponctuels ou plus généraux, pour juguler un trop prévisible cataclysme. Et surtout, il encourage les hommes, les nations, à être responsables et solidaires de leur environnement. Ce n'est plus l'utopie ou la mort, mais le réalisme ou la mort.