Henry de Régnier annonce dans les premières lignes de son ouvrage, l'intention qui le guidait :
"De ce petit livre le titre est encore ce qui m'y plaît le plus comme pouvant en devenir l'excuse au besoin. Sinon, que chaque lecteur bienveillant approprie à ses songes ce dont ils s'accommoderont et j'aurai eu, par surcroît, le plaisir de m'être conté quelques-uns des miens ; aussi, aurais-je voulu pour frontispice à ces pages tels emblèmes significatifs. Un peintre de mes amis les eût dessinés ; il y aurait figuré par exemple un miroir ou une conque ou une gourde curieusement ornementée. Il l'aurait représentée en étain, car j'aime ce métal qui a un aspect de très vieil argent humble, éraillé et intime, un argent un peu mat comme si l'approche d'un souille le ternissait ou si son éclat se tempérait de la moiteur d'avoir été longtemps tenu par une main tiède.
"L'allégorie sans doute eût été plus claire par une conque. La mer en dépose de charmantes sur le sable des plages, parmi les algues doucereuses, un peu d'eau et des coquilles. Une nacre çà et là à vif sous leur écorce en irise les luxueuses plaies et leur forme est d'une malice si mystérieuse qu'on s'attend y entendre chanter à son oreille les Sirènes. L'écho indéfini de la mer y murmure seul et ce n'est en lui que le flux de notre sang qui y imite le cri intérieur de nos destinées.
"Mais un miroir vaudrait mieux certes..."
Ainsi, avec des précieux et des images alambiquées, il dresse les portraits incertains d'une mémoire infidèle entre amours perdus, regrets survenus et mélancolie.
Le père avait vécu toutes ses vacances d'enfance sur la même plage. Après son mariage, il avait maintenu la tradition familiale, l'esprit tranquille. Par paresse ou par mollesse, sans poser la moindre question, son épouse avait accepté cette destination et fut charmée par les lieux ; en deux ou trois années, aucun endroit ne lui sembla plus propice à un repos estival... Et si on construisait un château de sable, cette année ?
Partant d'un fait divers réel, l'imagination met les personnages en scène : un amateur de boomerang reçoit son appareil en pleine tête en pratiquant son loisir.
Dès lors, il souffre d'amnésies à répétition et cherche qui peut pouvoir prendre en charge ses éventuels soins. La combien qu'il trouve est pour le moins originale.
L'expression "être un talon rouge" se disait au XVIIe siècle d'un courtisan qui avait de tels accessoires à ses souliers, ce qui passait pour une marque de noblesse.
En 1662, Monsieur frère du roi, revenant du Carnaval au marché des Innocents à Paris crée involontairement une nouvelle mode à la Cour : ses talons étaient devenus rouges, car maculés de sang. Dès les jours suivants, les nobles de la Cour adoptent des talons rouges pour leurs chaussures.
À travers quatre nouvelles où se croisent des personnages hauts en couleurs, le narrateur raconte les cruautés et les rumeurs des courtisans du roi Louis XV :
- le toutou de la Maréchale ;
- la Courtisane amoureuse ;
- le Magnifique ;
- la perruque de M de Sartine.
Le spécialiste des cours françaises rédige un véritable magazine "people" de l'entourage royal.
Voyager avec un certain Belphégor - sans D - ouvre la voie à des révélations sur chaque passager... Mais qui est-il, ce mystérieux compagnon ?
Étrange et dérangeant.
Les voisins venaient la voir, elle leur racontait la mort du chat. "II est mort, le pauvre animal, un an jour pour jour après mon pauvre malheureux... Il a eu une mort douce... Un an jour pour jour..."
Elle le répétait vingt fois par après-midi, et cette circonstance prit bientôt à ses yeux une importance extrême. "Un an, jour pour jour ! À présent, c'est mon tour. Je mourrai peut-être bien aussi un an jour pour jour après mon pauvre cat..."
Ce type-là est prêt à n'importe quoi, à passer la nuit n'importe où, pourvu qu'il ne retrouve pas sa bonne femme... Elle l'use, elle le mine, elle le harcèle, elle le pompe, elle le vide... Tu entends ça, Martin, « ma femme me vide ».
Les quatre histoires fleurent bon les XVIIIe et XIXe siècles ; L'auteur dépeint avec tendresse le bon peuple et la petite noblesse de Normandie et nous fait voyager entre poésie, religion et romance.
L'Hirondelle conte la "bonne" servante qui sauve sa petite maîtresse des griffes de la révolution.
Philémon et Baucis deviennent en Micheleu et Michelette du Pollet, à Dieppe.
Ciska de Clercy tombe amoureuse d'un homme promis à une autre, mais moribonde.
Les bruyères du frère Jean narre la reconstruction d'une abbaye trappiste sous Napoléon.
Trois nouvelles publiées dans le Bulletin de la Société havraise d'études diverses en 1894 :
- Le fiancé : un jeune recru annonce comme profession qu'il est le fiancé de Suzon !
- Service de nuit : qu'est-il préférable d'être à l'armée : un bicycliste ou un cavalier ?
- Heures d'étude : du collège au bureau d'avocat, le mot "étude" poursuit l'auteur qui se souvient de ses longs ennuis.
Non loin des bords riants de la Seine, dans une contrée appartenant à la Normandie, était jadis une riche abbaye dont les ruines font encore l'admiration des amateurs d'antiquités. Cette abbaye, où vivaient en commun de pieux Bénédictins, élevait ses tours qui servaient de fanal au voyageur égaré, et l'invitaient à venir réclamer un abri pour la nuit.
Chaque soir, en effet, voyait arriver à la porte du couvent, tantôt le colporteur accablé de lassitude par les longues courses qu'il avait faites durant la journée pour débiter ses marchandises ; tantôt le pèlerin vénérable, courbé sous le poids de l'âge et de la fatigue de ses voyages lointains ; tous les étrangers, enfin, qui, à l'approche de la nuit, cherchant un gîte, étaient assez heureux pour gagner à temps celui qui s'offrait à eux.
Veux-tu que je conte une histoire, une histoire aux propos joyeux ? Mets ta chopine entre nous deux ; le bon cidre aide la mémoire et fait passer dicts graveleux. Normands aimaient conter et boire : Soyons dignes de nos aïeux.
Qui peut mieux parler de son projet que l'auteur lui-même ?
Les Contes normands par Jean de Falaise, publiés en 1839, sont des nouvelles et des fantaisies, non des récits traditionnels ou féeriques.
À travers 32 nouvelles, réparties en trois livres, de Gourmont peint le tableau de ses contemporains.
La femme et l'amour ont la place d'honneur, à côté de personnages aux parcours étranges ou à l'identité singulière : la vierge qui s'offre dans un train, le moine qui ne croit pas en Dieu, l'aigle qui révèle la vérité de la vie.
Chaque histoire a son indépendance tout en invitant à découvrir la suivante.
Parisiens par excellence, les jardins du Luxembourg sont un lieu de promenade, de flânerie, de rencontre pour les habitants et les visiteurs de la capitale. Écrites au tournant des XIXe et XXe siècles, les trois nouvelles présentées permettent à l'auteur d'aborder des thèmes permanents : la gestion du patrimoine public, la préservation des essences, le bon sens de la culture. Charles Frémine parle des végétaux : orangers et champignons, des personnes qui travaillent : gardiens et jardiniers, un peu des promeneurs. Les images développées en 1905 restent d'actualité.
Les Normands sont uniques ! S'ils n'existaient pas, il faudrait les inventer. C'est ce qu'aurait pu dire Jean Revel à son ami Guy de Maupassant. Le Parisien venu enseigner à l'école normale de Caen leur a trouvé mille qualités et défauts : roublardise, bassesse, générosité, cupidité, etc.
L'auteur dresse le portrait sans complaisances, dont celui du paysan plus attaché à sa cour qu'à son neveu, des villageois avinés chez le coiffeur, du conseiller juridique véreux et de la "poulette" qu'une tante veut "plumer".
M
on oncle avait une volière, luxe inouï de son modeste ménage de garçon ; une belle volière à barreaux verts, montée sur un socle de briques
.
L'oiseau auquel je me suis particulièrement attaché pendant quel
que temps, était un petit tarin jaune et vert, à gorgerette lavée de
pourpre, au bec pointu, au caractère familier. Je l'aimais tant que
j'avais obtenu la permission de lui procurer une épouse...
Pierre était un jeune berger. En ce temps-là, les jeunes avaient du travail ; désormais, ils sont plus instruits et plus éduqués, mais ils restent sans emploi : c'est la modernité. À l'époque, Pierre ânonnait au lieu de lire, il perlait ses phrases de fautes, mais il gardait les moutons de Maître Lucien !
Pour rompre ses longues journées de solitude, Pierre ne se distrayait vraiment que grâce à son flûtiau, dont il jouait avec maladresse...
Le garçon installé en face de Patricia lui donnait un sentiment bizarre : d'apparence agréable ; son langage était soigné, ses propos intelligents. Toutefois, certaines de ses attitudes la dérangeaient ; ses manières de la regarder, de la fixer, de la dévorer des yeux, lui rappelaient un maquignon en pleine négociation, comme si elle-même n'était qu'une génisse dans un foirail. L'étudiante se sentait divisée, presque écartelée...
Le futur grand-père a eu un rêve : une « chambre évolutive » pour le Petit annoncé. Mais de l'idée à sa réalisation, il y a un grand pas : Vivien a connu son dernier essai de décorateur trente ans plus tôt, à la naissance de la future maman ! Dans le magasin de bricolage, entre nouveaux produits et créations colorées, le visionnaire trouve enfin une suggestion conforme à son rêve. Pour être chouette, c'est chouette !
Le déménagement d'Aubin ressemblait à une joyeuse fête, tous ses copains avaient répondu à l'appel, l'équipe s'activait dans la bonne humeur. Une fois le travail achevé, la soirée fut consacrée à la détente, aux rires, aux chansons et à la boisson, une vraie fiesta entre garçons. Au réveil, les yeux embrumés de fatigue, Aubin découvrit, au milieu des assiettes, des verres et autres restes de la fête, une robe rouge posée sur la table de cuisine.
Dans la ville sans nom, la rue ne portait aucune plaque. C'est là que se trouvait la case ronde sans angles où vivait un couple de nègres miséreux. Ils étaient pauvres malgré le dur labeur qu'ils livraient ; ils trimaient pour la richesse de leur maître. Leur métier était « esclave ». Au-delà de leur misère, le couple vivait un chagrin cruel et immense : nul bambin ne pleurait dans leur case sombre qui restait toujours vide, toujours muette.
À cette époque qui rêve de jeunesse éternelle, le bel âge est le moment de la vie riche d'expériences et rempli de bonté.
Les Anciennes "aident", car la tâche semble naturelle. Les Anciens voilent leur pudeur sous des airs bourrus : on ne leur en montre plus !
Tour à tour rudes ou tendres, marmottant parfois seuls dans leur silence, observant sans juger, les personnages de Jean-Patrick Beaufreton pensent au lendemain de leurs descendants et nourrissent leur quotidien de souvenirs à leur image.
Le marcheur du dimanche s'est vanté le soir de la Saint-Sylvestre de réaliser une randonnée au long cours. Le premier soir du périple, il se retrouve confronté à un chat qui miaule toute la nuit : l'aventurier est pris à son propre piège ; cette rencontre et d'autres le mettent en face de ses prétentions. Les surprises ne manquent pas, l e chemin l'interroge sur sa véritable identité et lui livre une philosophie personnelle de la marche.