« Mon père n'était pas croyant. Pourquoi ma mère a-t-elle tenu à cet enterrement religieux ? La réponse, je ne tarde pas à la découvrir. Sur la pierre tombale, à côté du nom de mon père, elle a fait graver ces mots :À la mémoire de Mimoun COHEN son père Yvonne COHEN sa mère Colette COHEN sa soeurJean-Jacques SICSIC son beau-frèredisparus en juin 1962 en AlgérieEt de Régine COHEN sa soeurFigés dans le marbre, ils hurlent comme des nouveau-nés. Et moi, j'ai l'impression de me réveiller d'un long coma. Colette, Yvonne, Mimoun, Jean-Jacques. Yvonne, Mimoun, Jean-Jacques, Colette. J'ignorais que mon père avait une soeur, une soeur qui s'appelait Colette. Jusqu'à ce jour, je n'avais jamais entendu parler de mes grands-parents, ils n'avaient pas de noms, pas de visages.Colette, Yvonne, Mimoun, Jean-Jacques. Yvonne, Mimoun, Jean-Jacques, Colette. J'ai beau répéter ces noms comme un mantra, rien ne se passe, ils ne convoquent aucune image, aucun souvenir. Seulement un incommensurable étonnement. Pourquoi ce secret, pourquoi ce silence ?Disparus en Algérie. Qu'est-ce que ça veut dire, disparus ? Qu'est-il arrivé à mes grands-parents, leur fille et leur gendre, là-bas, en Algérie ? »C'est donc lors de l'enterrement de son père qu'Hélène Cohen découvre l'existence en même temps que la disparition d'une partie de sa famille. Juifs algériens, ils sont quatre à être partis et jamais revenus, quelques jours avant la déclaration d'indépendance. Ramenée à elle-même par cette découverte, l'autrice décide de plonger dans les méandres du secret familial et d'interroger les survivants pour enfin comprendre et connaître les disparus. Une enquête poignante au coeur d'un déni familial qui fait écho à l'un des épisodes les moins connus de la guerre d'Algérie : la disparition de plusieurs centaines d'Européens malgré la signature des accords d'Évian.
Le 1er décembre 2018, Zineb, quatre-vingts ans, est sur le point de fermer les volets de son appartement, situé au quatrième étage d'un immeuble, lorsqu'elle est touchée par une grenade lacrymogène qui explose ensuite dans son appartement. Le lendemain, elle succombe à ses blessures. Le rapport d'expertise officiel conclut à une mort accidentelle.Le 3 janvier 2020, Cédric, quarante-deux ans, est interpellé non loin de la Tour Eiffel et verbalisé pour infraction au Code de la route. Le ton monte et Cédric se retrouve menotté et immobilisé au sol par trois agents. Alors qu'il est face contre terre, son casque toujours sur la tête, il fait un arrêt cardiaque.Le 10 décembre 2020, Débora, vingt-trois ans, a oublié de mettre son masque dans la rue et se retrouve verbalisée. Rattrapée par une policière, Débora est plaquée au sol puis poussée contre un mur. Débora est enceinte de quatre mois et demi. Dix jours plus tard, elle accouchera d'un enfant mort-né. En vingt portraits saisissants, Remedium dénonce l'impunité des forces de l'ordre, les discriminations, les abus de pouvoir, les outrages verbaux et physiques de ceux qui ont pour devoir de représenter l'État et protéger ses citoyens.L'auteur a décidé de donner la parole aux victimes, de représenter leur version des faits. On y retrouve des affaires médiatisées, celles de Michel, le producteur de musique tabassé dans son studio parisien, celle de Théo, éducateur à Aulnay-sous-Bois, agressé par des policiers lors d'un contrôle de police... mais aussi bien d'autres tombées dans l'oubli... Parce que les violences policières ne sont plus des cas de force majeures, des cas isolés, mais bien des actes qui font partie de notre quotidien.
Du Tibet à l'Albanie, du Pakistan à la Mongolie et à travers toute l'Eurasie, Cédric Gras interroge le voyage. Rite de passage pour la jeunesse occidentale dont il faisait partie. Âge d'or de l'exploration d'un monde qui l'a fait rêver, mais que sa génération a trouvé transfiguré. Le voyage est aussi synonyme d'aventure, de poésie, de solitude ou de l'étude d'une langue. Comment redécouvrir la Terre au xxie siècle ?
Aulnay-Sous-Bois, début des années 1980. Dans la cour de récré, une petite fille s'avance d'un pas décidé vers le caïd de l'école. Parce qu'il fait pleurer sa camarade de classe, elle entend bien lui donner une bonne leçon. C'est Madi, la guerrière, qui se rêve princesse de Casamance, cette région verdoyante du Sénégal dont ses parents sont originaires. Madi la petite maîtresse de la cité des 3000, la répétitrice en chef des enfants du quartier. Madi, assoiffée de connaissance, qui dévore son encyclopédie au lieu de dormir la nuit, et qui n'en finit pas d'interroger son père sur les racines, la famille, l'Afrique.Un jour, c'est certain, toute la famille Seydi s'y établira. En les voyant arriver, les Sénégalais diront d'eux qu'ils sont des « toubabs », des blancs. Une bassine en équilibre sur la tête, Madi voudra tout faire pour ressembler à ces femmes africaines dont elle admire tant l'allure, la force et la ténacité. À Dakar, elle assiste à ses premiers meetings politiques. Revenue en France, elle plongera tout entière dans le militantisme. C'est l'histoire d'une Française venue d'ailleurs qui garde la nostalgie de son enfance en banlieue. C'est la peinture réaliste d'une banlieue attachante, où règnent le vivre-ensemble et la chaleur humaine. Le témoignage poignant d'une découverte marquante, celle de l'Afrique de l'Ouest ; c'est l'expérience concrète de la « Teranga », l'entraide et le partage. Le récit d'apprentissage d'une jeune femme engagée du côté du courage.
« Si je survis deux ans, je serai là pour ta première rentrée des classes. En allant jusqu'à cinq, je t'aurai entendu lire tes premiers mots, vu écrire tes premières lettres, et après ? Le premier amour ? Les chagrins, le corps qui se forme et la solitude qui, parfois, sidère. L'échec qui aveugle et l'ambition à laquelle on renonce. Qui t'en parlera si je ne suis pas là ? Mon amour, ma vie, mon enfant, Eva, je décide de ne pas prendre le risque de te laisser seule. Les paroles s'envolent, les écrits restent, dit-on. Alors je vais rester. »Lorsque Virginie Roels apprend qu'elle est atteinte d'un cancer, sa fille Eva n'a que trois ans. La maladie l'a saisie, l'urgence aussi. Celle de lui dire son amour, de lui raconter les secrets qu'elle aurait fini par lui confier. De prononcer les mots qu'elle lui aurait glissés à l'oreille si elle avait été auprès d'elle dans les moments de doutes, de chagrin comme de joie, à l'âge de l'adolescence, à celui d'être femme, puis mère, à son tour. Or comment parler de tout cela, en quelques mois, à cette toute petite fille dont la destinée est imbriquée dans la sienne ? Par écrit. Car les écrits restent, dit-on, alors elle restera. Virginie Roels rencontre la blessure et la grâce. La blessure du destin, la grâce de l'écriture. Par-delà l'émotion qui porte chaque page, une forme d'universalité émerge de ce texte. Car nous voudrions tous transmettre ces mots qui aident ou qui consolent, qui lèvent le voile sur les visages et les vies, et qu'on appelle, avec la modestie de l'inconnu, l'expérience. Un récit sur l'amour filial à placer entre toutes les mains.
Isabelle Sarfati est chirurgienne plastique, elle opère des femmes et des hommes, des jeunes et des vieux, des moches et des beaux. Se succèdent dans son cabinet une nudiste furieuse de sa reconstruction mammaire, un joueur de poker
professionnel qui a choisi d'avoir quatre testicules pour lui porter chance, une femme qui ne veut plus de seins, une autre qui en veut plus et plus de fesses aussi pendant qu'on y est... À chacun, l'auteur tente de répondre, pas forcément
avec un bistouri. Elle n'élude rien des ratages, douleurs, outrances de son sulfureux métier mais raconte surtout des histoires de transformation, de réparation, de réconciliation personnelle drôles, tragiques, humaines.
Isabelle Sarfati, également adepte de la chirurgie pour elle-même, nous livre aussi le journal de sa dernière opération en tant que patiente avec sincérité et humour.
Qu'est ce qui détermine un caractère, une inclination, un destin ? Peu et beaucoup de choses à la fois. Éventuellement, un lieu géographique ou un milieu social. Peut-être la fréquentation d'un mentor ou l'emprise d'une passion. Une éducation, de toute évidence.
Né il y a soixante ans de parents optimistes, persuadés du bon fonctionnement des institutions républicaines et installés par choix aux Minguettes, en banlieue lyonnaise ; d'emblée confronté à la diversité des origines et des statuts dans un environnement sans contrainte, Thierry Frémaux se penche avec curiosité sur le chemin parcouru. « Je ne serais pas arrivé là, si... » En remontant le cours de sa vie, le directeur de l'Institut Lumière et Délégué général du Festival de Cannes, familier de la planète cinéma dans son ensemble, de ses institutions comme de ses stars, constate, non sans surprise, que c'est sans doute la pratique du judo qui a déterminé avec le plus d'efficience et de constance ses goûts et sa personnalité. Un exercice qu'il pratiqua avec ardeur et assiduité (jusqu'à devenir ceinture noire !), mais qui, surtout - pour paraphraser la célèbre confidence d'Albert Camus à propos du football -, lui a apporté ce qu'il sait « de plus sûr à propos de la morale et des obligations des hommes ».
De l'enfance au judo, du judo au cinéma qui nourrit aussi grandement ce récit réjouissant et passionnant, Thierry Frémaux reconstitue l'ossature d'une vie à l'aune d'un art empreint de sagesse. Celui qui lui a offert les bases d'un savoir-vivre ensemble où le respect de l'autre, le contrôle de soi, la modestie et le courage jouent le rôle le plus important.
4 h 30 du matin, deux réveils résonnent, et tant pis pour les voisins. Pourquoi ? Laetitia Bernard est journaliste sportive à la matinale de France Inter et de France Info. Elle n'allume pas sa lumière pour se lever, se doucher et démarrer. Pourquoi ? Laetitia Bernard est aveugle de naissance. Certes elle ne deviendra jamais actrice, mais sa vie devient un sport d'équipe : aidée de ses parents, des enseignants, des bonnes copines, des chevaux, et avec un mental à toute épreuve, elle s'intègre parmi les écoliers et collégiens valides, jusqu'au bac obtenu avec mention bien.Le mental ? c'est l'allié des sportifs de haut niveau. Laetitia va le devenir : championne de France en sauts d'obstacle handisport, elle noue avec les cavaliers qui l'accompagnent des relations exceptionnelles.Ce que Laetitia nous raconte dans ces chapitres fascinants, c'est tout ce que l'on peut faire, avec un handicap, plutôt que de s'arrêter à ce que l'on ne peut pas faire. Qui lui aurait prédit qu'elle intègrerait Sciences-Po à Strasbourg, qu'elle passerait une année Erasmus à Berlin, qu'elle poursuivrait dans la meilleure des écoles de journalisme (le CFJ) ? Elle est là pour témoigner, avec un souci de la vérité, avec un humour joyeux, avec une intelligence des situations tels qu'on aimerait, à son tour, faire équipe avec elle.
Un pari fou ? Lionel Daudet, alpiniste amputé de huit orteils gelés dans la face nord du Cervin, en a tenté d'autres. Mais faire le tour de la France, exactement, en suivant pas à pas, au mètre près, le trajet de la frontière et du littoral, quelle belle folie, quelle aventure pourtant si proche de nous !
Le 10 août 2011, Lionel Daudet quitte la maison : il rentrera quinze mois plus tard, après avoir arpenté le territoire à pied, à vélo, en kayak, en voilier, seul ou accompagné d'amis, d'amateurs, de rencontres. Des chiffres ? Environ 3 000 kilomètres d'arêtes, de forêts, de rivières, et 6 000 kilomètres de littoral. Des soucis ? Nombre de nuits blanches et la foudre qui le traverse. Rien qu'un exploit ? Le Tour de la France, exactement, c'est aussi une vision sociale du pays, un jeu des mille bornes, un cache-cache avec les banlieues, les parcelles privées, la végétation.
À quoi ressemble une frontière ? Lionel Daudet nous invite à réfléchir à cette réalité mouvante.
Du début de la pandémie de Covid-19 qui a bouleversé le monde, nous ne savons rien. En janvier 2020, pour la première fois dans l'histoire, une ville de plus de dix millions d'habitants est mise en quarantaine.
Enfermée dans son appartement, l'écrivaine Fang Fang tient son journal en ligne. Jour après jour, suivie par des millions de lecteurs, elle retrace l'histoire d'une catastrophe, depuis le chaos glaçant des premières semaines jusqu'à l'enrayement de l'épidémie.
Fang Fang raconte la mort et la peur, la solidarité des habitants, le silence des responsables, le courage des lanceurs d'alerte, la débrouille et les petites joies, les plaisanteries et la colère qui circulent, le printemps qui vient dans une ville qu'elle aime. Alors qu'il se heurte à la censure et à de violentes attaques, ce témoignage unique nous rappelle nos premiers devoirs dans les heures sombres : l'indépendance d'esprit et l'humanité.
Traduit du chinois par Frédéric Dalléas et Geneviève Imbot-Bichet
« - Madame Silberling ?
Une policière balaie la petite salle du regard. Je lui fais signe et la rejoins.- Suivez-moi, s'il vous plaît. Elle m'emmène dans une pièce impersonnelle, sans fenêtre, avec une table, deux chaises, un ordinateur.
Je m'assieds en face d'elle. Après les questions d'usage concernant mon état civil, elle entre dans le vif du sujet :- Contre qui désirez-vous porter plainte ? Je me tais un instant. Combien de fois ai-je dû raconter mon histoire ? Une centaine ? Plus ? Et pour quel résultat ? Rien. Le vide intersidéral. J'espère aujourd'hui que cela servira à quelque chose.
Je lève les yeux et croise ceux de la policière. Elle m'observe avec l'expression bienveillante de celle qui est rompue à confesser les malheurs quotidiens de l'humanité.
Je me redresse, remets une mèche de cheveux derrière mon oreille, prends une profonde inspiration et, partagée entre la honte et désespoir, prononce ces mots qui m'arrachent les entrailles :
- Contre mon fils. »
Voici le récit poignant d'une mère forcée de porter plainte contre son fils, devenu violent, pour lui sauver la vie. Chronique d'une spirale infernale, entre drames intimes, drogue et solitude, Pour lui s'impose comme une merveilleuse ode à la vie et à l'amour.Avec la collaboration d'Harold Cobert
Paris a été chanté, filmé, raconté tant de fois ! Mais Paris, aujourd'hui, fait-il encore rêver ? Des photos de Robert Doisneau aux films de Marcel Carné ou aux polars de Léo Mallet, une vision en noir et blanc, réverbères et pavés luisants sous la pluie, a façonné notre imaginaire, avant de se transformer en clichés de cartes postales. La ville estelle condamnée à devenir un musée à ciel ouvert, centré sur sa splendeur patrimoniale ? Ou peut-elle se redéployer, se muer en capitale du XXIe siècle et se projeter dans un nouvel imaginaire grand parisien ?
Amoureuse des mégapoles et nouvelle flâneuse de notre post-modernité, Régine Robin revisite Paris à l'aune de cette incertitude. Le Belleville populaire de son enfance, inventorié par Georges Perec, n'existe plus depuis longtemps. Il n'était pas vraiment joli, reste un peu de mélancolie. Le quartier où elle habite, près de la gare Montparnasse, à l'ombre de la tour, a été métamorphosé dans les années 1960. On le dit moche, pour elle qui l'arpente, il a son atmosphère, sa poésie, comme les nouveaux espaces, du côté de Bercy ou de la Bibliothèque de France. Foin de nostalgie donc, de « c'était mieux avant », comme si on ne pouvait choisir qu'entre l'image carte-postale d'autrefois et les quartiers-villages pour bobos qui se jouent la comédie de « l'authenticité ».
Ses déambulations nous mènent au delà du périphérique, découvrant ce qui palpite derrière cette frontière, dans ces banlieues malaimées de la petite et de la grande couronne, où vivent 10 millions d'habitants et où des mondes se rencontrent. Les parcours insolites auxquels elle nous invite croisent aussi la littérature et le cinéma. Dans ses pas, et ceux des architectes, des artistes, des écrivains avec lesquels elle chemine, on prend le pari d'un Grand Paris, avec des rêves à sa mesure.
Jamais des preuves aussi accablantes de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité n'avaient été divulguées alors qu'un conflit se poursuit. En Syrie un homme l'a fait. Son nom de code ? César. Ce photographe de la police militaire a risqué sa vie pour exfiltrer, pendant deux ans, 45 000 photos et documents de détenus torturés à mort. Il n'est jamais apparu devant des médias.
En janvier 2015, dans le magazine américain Foreign Affairs, le président Bachar el-Assad a affirmé que ce photographe militaire n'existait pas : « Qui a pris ces photos ? Qui est-il ? Personne ne sait. Aucune vérification de ces preuves n'a été faite. Ce sont des allégations sans preuves. »
César existe. L'auteur de ce livre a passé des dizaines d'heures avec lui. Son témoignage est exceptionnel. L'enquête sur le fonctionnement de la machine de mort syrienne, qui étaye son récit, est une plongée dans l'indicible.
Marie-Anne Erize avait 24 ans, un physique de mannequin, des utopies de rebelle. Un jour d'octobre 1976, des militaires en civil l'ont enlevée à San Juan, petite ville du nord-ouest de l'Argentine. Ses parents, ses amis, ses six frères et soeurs ne l'ont jamais revue. Depuis, elle fait partie des 30 000 disparus de l'époque de la dictature (1976-1983), ces hommes et ces femmes dont le souvenir hante à jamais ce pays à la mémoire lourde.
Peu importe que cette histoire remonte à plus de trente ans. Philippe Broussard a voulu la raconter. Partir sur les traces de Marie-Anne. Retrouver des témoins. Reconstituer son parcours. De Paris à Buenos Aires, il a interrogé des dizaines de personnes et tenté d'assembler le puzzle de sa vie. De ses vies, plutôt. Née dans une famille de « pionniers » français établis en Argentine, elle a grandi dans la jungle, fréquenté diverses écoles catholiques, défilé comme top-modèle, côtoyé de grands artistes (le chanteur Georges Moustaki, le guitariste Paco de Lucia...) et vécu un temps à Paris.
Son destin bascule en 1973, quand elle renonce au milieu de la mode, trop superficiel à ses yeux. Militante péroniste, aidesociale dans les bidonvilles, elle entre peu à peu dans la clandestinité au sein des Montoneros, une guerilla d'extrême gauche. Cette fuite en avant, sur fond de repression ultra-violente, s'achèvera à San Juan, un vendredi de 1976...
L'histoire n'est pas terminée pour autant. Aujourd'hui encore, deux procédures judiciaires sont en cours, en France et en Argentine, pour connaître la vérité sur son sort. Un suspect est même en prison, à San Juan : Jorge Olivera, un colonel devenu avocat, catholique intégriste et militant d'extrême-droite. C'est lui qui aurait organisé le rapt, puis la disparition de la belle Française.
Le livre repose sur une structure narrative à deux vitesses : l'alternance entre le récit chronologique du parcours de Marie- Anne et des lettres que l'auteur écrit à sa mère, âgée de 84 ans, afin de l'informer de ses recherches et de lui dévoiler la part d'ombre de sa fille.
En 1928, la jeune journaliste Maryse Choisy décide
de mener une enquête sur les milieux de la prostitution
parisienne et explore un nouveau genre, le reportage en
immersion. Elle se fait passer pour une femme de chambre
dans une maison de rendez-vous, se déguise pour entrer dans
les dancings de la pègre, devient sous-maîtresse chez Ginette,
danseuse de salon dans un bar lesbien, puis s'invite dans
un hôtel particulier où de riches Américaines s'off rent de
prétendus princes russes. Elle réussit même à s'infi ltrer dans
le plus illustre des claques parisiens, Le Chabanais.
Personnage célèbre des années folles, fantasque, libre et
anticonformiste, Maryse Choisy se révèle une plume drôle,
crue, engagée. On pense autant à Albert Londres qu'à
Colette en lisant ce texte qui fi t scandale et s'arracha alors
à plus de 450 000 exemplaires.
La redécouverte d'un livre exceptionnel, une invitation à
suivre Maryse là où vous n'oseriez jamais aller.
J'enseigne les lettres depuis douze ans dans un collège du Val-de-Marne. C'est dans cette même banlieue, à ent mètres du collège, qu'Amedy Coulibaly abandonna sa voiture le 8 janvier 2015, entraînant le bouclage de tout le quartier et de notre établissement.
Ce livre contient des paroles d'élèves au lendemain des attentats survenus à Charlie Hebdo et à l'Hyper Cacher, explore leurs réactions et tente de comprendre qui est cette jeunesse.
La semaine du 26 janvier, je propose en effet à mes élèves de 4e et de 3e de revenir par écrit sur les événements des 7, 8 et 9 janvier. Je leur distribue des feuilles blanches sur lesquelles ils sont dispensés d'écrire leur nom afin de se sentir libres. Mon souhait : recueillir des opinions spontanées, une pensée qui ne soit ni encadrée, ni dirigée, ni teintée par celle de l'adulte. Au lendemain des événements, c'est là que réside à mon sens la vraie mixité : dans la disparité des réactions. Engagement versus nonchalance. Conscience collective versus individualisme. »
C. P.-C.
Axel, le médecin biologiste, engagé depuis longtemps dans la réflexion éthique, Jean-François, le journaliste, homme de média et agitateur d'idées. Ils sont frères mais se connaissaient peu avant ce livre. Elevés l'un et l'autre dans la religion catholique, ils sont devenus farouchement agnostiques, mais demeurent tous deux obsédés par la quête de sens. Ils croisent ici leurs souvenirs, avec la tendresse de l'éloignement et la lucidité des intellectuels qu'ils sont : deux enfances séparées à cause de la guerre, une adolescence dans la France de la TSF et de la reconstruction, le couple de leurs parents et leur frère Olivier, les premiers choix politiques, les grandes désillusions de l'âge adulte. Mais le genre humain n'est pas leur ennemi, tout au contraire. Même si on ne croit ni au Grand Horloger de l'univers, ni à la Rédemption, ni non plus aux lendemains qui chantent, la place est immense pour l'engagement de deux hommes qui n'ont pas cessé de croire qu'aujourd'hui peut être meilleur qu'il n'est, et demain meilleur qu'aujourd'hui : à la condition d'oser le vouloir. Etre capable d'enthousiasme, voilà qui les réunit, qu'il s'agisse de dire leur émotion devant un air d'opéra, leur admiration devant le personnage de De Gaulle, leur goût pour la cuisine - qu'ils font eux-mêmes-, ou de célébrer les grandes avancées de la démocratie. Dégrisés des illusions confortables, sans concession pour les mensonges d'où qu'ils viennent, ils montrent que le métier d'homme n'est pas un vain mot.
«Sous un soleil de plomb, j'entrevois l'embarcation. La concurrence est rude. Long d'une petite soixantaine de mètres, avec sa coque noire et ses étages blancs, le pied-à-terre flottant des Sokolov n'occupe que la deuxième ou troisième place en termes de grandeur dans le palmarès des yachts privés amarrés au port. Mais l'honneur est sauf : privilégié, mon patron bénéficie d'un anneau facturé à 2 000 euros cash par jour au lieu des 1 000 indiqués sur la grille des tarifs.»Le luxe ? Un plaisir. Une routine. Peut-être même une obligation quand on devient milliardaire en Russie. Engloutir du caviar au petit-déjeuner, prendre une leçon de golf en pleine mer, multiplier les allers-retours en jet privé et les titres de propriété sur chaque continent du monde, c'est le minimum syndical.
Marie Freyssac a vécu comme préceptrice française à Moscou. Saynète après saynète, elle nous ouvre les portes d'un monde opaque, qui révolte autant qu'il fascine, celui des oligarques fiers de leur réussite, qui exhibent volontiers leurs liasses de billets et paient tout au prix fort, jamais rassasiés après avoir été élevés au biberon du communisme. Et quand elle quitte les alentours de la Roubliovka, c'est pour retrouver la rue, les babouchkas vendeuses à la sauvette, les Caucasiens pas toujours en odeur de sainteté, la vodka moins festive qu'arme de destruction massive, en bref, le quotidien parfois âpre des Moscovites, que la jeune nounou croque avec la juste combinaison d'impertinence et de drôlerie.
Le 23 juin 2011, Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, déclarait : « Il faut clairement qu' il y ait un avant et un après-Mediator. » Deux ans plus tard, où en sommes nous ? Sommes-nous à l' abri de nouveaux scandales sanitaires ? À l' heure où les pilules contraceptives de troisième et quatrième générations soulèvent des inquiétudes justifi ées, rien n' est moins sûr. La priorité des laboratoires n' est pas de nous soigner, mais de faire du profi t. Des maladies sont inventées, des médicaments détournés de leur prescription initiale et des copies d' anciens médicaments, sans plus-value pour le patient, commercialisées. Pire, on découvre que la plupart de nos médecins connaissent mal les produits qu' ils nous prescrivent et on attend qu' un médicament cause plusieurs victimes avant d' envisager son retrait des offi cines...
Alors que l' Assemblée nationale s' apprête à débattre de l'introduction en droit français de la class action (« action de groupe »), laquelle permettrait aux victimes de se regrouper pour faire face à la toute-puissance des laboratoires, les auteurs nous livrent leur vision critique et percutante du monde pharmaceutique.
Sur le ton de la confidence, après la mort de sa femme, Albert Jacquard raconte son enfance et sa jeunesse. Non pas pour le plaisir de se raconter, tout au contraire, mais parce que cette enfance et cette jeunesse sont d'une certaine façon celles d'un autre que celui que nous connaissons, l'infatigable défenseur des sans voix, le pourfendeur de la compétition, l'observateur lucide du monde. Cet « Albert Jacquard avant Albert Jacquard » nous révèle une jeunesse pendant laquelle il se tenait soigneusement à l'écart du monde, de sa rumeur, de ses drames, et même de la Guerre qui se déroulait sous ses yeux de lycéen provincial.
Il nous raconte, de façon bouleversante, l'accident de voiture qu'il a vécu quand il avait neuf ans, dans lequel ont péri l'un de ses frères, et ses grands-parents paternels. Lui, n'a été « que » défiguré. Cette trace, il l'a portée toute sa vie, plus jamais il ne s'est reconnu dans une glace.
Il raconte aussi ses années à Polytechnique, le carriérisme de ses camarades, son insatisfaction, puis ses premières années à la manufacture des Tabacs où, après s'être montré bon élève, il se montre bon ingénieur mais piètre citoyen - à ses yeux d'aujourd'hui. Puis le départ aux États-Unis avec sa femme et ses fils, le retour à Paris et, par hasard, dit-il, la rencontre avec le militantisme.
C'est quand Albert Jacquard devient le célèbre Albert Jacquard que ce livre s'achève.
Ce document raconte la "fatalité" qui conduit des jeunes sur le chemin de la délinquance et comment Guy Gilbert, malgré les obstacles, veille, aide, se bat au nom de sa foi pour que leur vie ne leur soit plus volée, pour que le désespoir cesse d'être le dernier mot.Ce prêtre pas comme les autres dénonce le sort de ceux, nés dans certaines classes, et condamnés à un enfermement sans fin qui prend tous les visages : prostitution, chômage, solitude, prison Cette lutte quotidienne force l'admiration. Elle nous donne à voir, à entendre une multitude d'histoires passionnantes, pleines de surprises, de rebondissements qui, toujours, disent la même chose : le refus du malheur, le désir d'exister.Guy Gilbert, auteur de Un prêtre chez les loubards, La rue est mon église, a été éducateur spécialisé dans la rue. Délégué au conseil presbytéral auprès des évêques pour représenter les prêtres veillant sur des marginaux à Paris, il s'occupe avec une équipe de l'insertion des jeunes mineurs incarcérés multirécidivistes dont plus personne ne veut.
À l?occasion du centenaire des Jeux Olympiques, Albert Jacquard propose ici une réflexion quelque peu iconoclaste sur cette institution généralement incontestée.
Les Jeux Olympiques sont-ils des jeux ? Est-ce bien de sport qu?il s?agit encore ? Telles sont les deux questions principales qui sous-tendent ce bref pamphlet.
Par rapport en effet à ce qu?étaient les Jeux dans l?Antiquité, et par rapport aussi à ce qu?ils étaient dans la pensée de leur moderne restaurateur, Pierre de Coubertin, les Jeux Olympiques ont été complètement dévoyés. Au lieu de l?émulation, c?est la compétition implacable qui prévaut ; au lieu de la gratuité propre par définition au jeu, c?est la marchandisation à outrance qui a triomphé.
C?est ainsi que le dopage s?est introduit massivement dans le sport de haut niveau, transformant les sportifs en une nouvelle espèce, intermédiaire entre les humains et les monstres. En généticien, Albert Jacquard réfléchit sur cette entreprise de transformation des êtres humains, transformation dont le profit est la seule règle.
Enfin, il propose en quelques points une nouvelle charte pour un « olympisme humaniste ».
Denis Labayle est un homme en colère. Médecin gastro-entérologue, chef de service, pendant vingt cinq ans, dans un hôpital public de la région parisienne, il a été quotidiennement au contact de patients en fin de vie et, comme une majorité de confrères, les a aidés à mourir, répondant à leur demande et à celle de leurs proches.
Il n'a pas agi en « militant de l'euthanasie » mais en médecin obéissant au devoir de compassion. Dans ce livre, l'auteur dénonce d'abord une scandaleuse torsion des mots. Euthanasie devient, trop souvent, assassinat ou suicide. Denis Labayle récuse la distinction spécieuse entre euthanasie « passive » ou « active ». Évoquant ses propres gestes et son expérience, il remet les termes sur leurs rails.
Il dénonce ensuite ce que recouvre le prétendu dogme du « respect de la vie », l'effroyable abandon thérapeutique et social dans lequel sont laissés tant de patients, la schizophrénie des autorités médicales, le décalage vertigineux entre des lois surannées et la pratique quotidienne des services hospitaliers. Sont dénoncés encore les bons apôtres. Ceux qui oublient la médiocre prise en charge de la douleur. Ceux qui récusent l'idée d'un « testament de vie » dans lequel chacun consignerait ses volontés. L'euthanasie bien comprise, explique l'auteur, l'ultime liberté, c'est aussi une manière de re-socialiser la mort.
« L'État islamique, qui terrorise l'Orient et menace l'Occident, est la créature de Bachar al Assad, son meilleur allié, son alibi auprès de la communauté internationale. Celui utilisé pour martyriser tout un peuple. »
Après plus de trois ans d'enquête en Syrie, depuis le 15 mars 2011 et le début de la révolte pacifique syrienne, c'est la conclusion à laquelle est arrivée Sofia Amara, l'une des seules journalistes à avoir pu pénétrer dans le pays à cette période.
Très vite, elle comprend l'ampleur du désastre qui est en train de se jouer. Des actes de torture les plus ignobles à la djihadisation de la rébellion, grâce à ce récit haletant, Sofia Amara nous aide à mieux comprendre les enjeux de la guerre civile syrienne et espère alerter l'opinion internationale sur la plus sanguinaire des révolutions du Printemps arabe.