Ma famille maternelle a quitté la Roumanie communiste en 1961. On pourrait la dire "immigrée" ou "réfugiée". Mais ce serait ignorer la vérité sur son départ d'un pays dont nul n'était censé pouvoir s'échapper. Ma mère, ma tante, mes grands-parents et mon arrière-grand-mère ont été "exportés". Tels des marchandises, ils ont été évalués, monnayés, vendus à l'étranger.
Comment, en plein coeur de l'Europe, des êtres humains ont-ils pu faire l'objet d'un tel trafic ? Les archives des services secrets roumains révèlent l'innommable : la situation de ceux que le régime communiste ne nommait pas et que, dans ma famille, on ne nommait plus, les juifs.
Moi qui suis née en France, j'ai voulu retourner de l'autre côté du rideau de fer. Comprendre qui nous étions, reconstituer les souvenirs d'une dynastie prestigieuse, la féroce déchéance de membres influents du Parti, le rôle d'un obscur passeur, les brûlures d'un exil forcé. Combler les blancs laissés par mes grands-parents et par un pays tout entier face à son passé.
Par un étrange paradoxe, ceux qui s’imaginent que la France ferait face à un « tsunami » migratoire, par la faute des politiques, de l’Union européenne ou des juges, sont également convaincus que la migration est une anomalie dont la France pourrait se passer. On grossit l’immigration pour mieux la dénier. Pour dissiper ces illusions, il faut en revenir aux faits. Oui, la population immigrée a progressé en France depuis l’an 2000, mais moins que dans le reste de l’Europe. Non, notre pays n’a pas pris sa part dans l’accueil des réfugiés. La hausse vient d’abord de la migration estudiantine et économique, tandis que la migration familiale a reculé. En exposant les enjeux de la loi Darmanin de 2023, en rappelant combien la frontière est mince entre séjour régulier et séjour irrégulier, ce livre propose une approche résolument nouvelle de la question migratoire.
Professeur au Collège de France sur la chaire « Migrations et sociétés », François Héran anime l’Institut Convergences Migrations. Il a notamment publié Avec l’immigration (La Découverte, 2017), Lettre aux professeurs sur la liberté d’expression (La Découverte, 2021) et codirigé la 4e édition de Controlling immigration. A comparative perspective (Stanford, 2022).
Une histoire sur deux millions d'années, du paléolithique jusqu'à nos jours, des grands courants migratoires humains qui ont contribué au brassage des peuples sur notre planète. Pistant les traces laissées par l'homme sur les routes hypothétiques des invasions présumées, Jean-Paul Demoule mène l'enquête, tordant le cou au passage à nombre d'idées reçues. Un essai décapant en un temps où il apparaît plus que jamais nécessaire d'affirmer haut et fort que, depuis l'aube de l'humanité, nous avons toujours été des migrants.
L'humain ne s'est jamais autant déplacé. La guerre, la pauvreté et les catastrophes naturelles poussent chaque année des millions de personnes sur les routes. Et dans le monde animal, l'exode a déjà commencé en réponse au réchauffement planétaire. Pour la journaliste scientifique Sonia Shah, il est temps de reconnaître le rôle central des migrations dans l'histoire de la vie sur Terre, car le mouvement a toujours été le meilleur moyen d'assurer la survie collective des espèces.
Or, la migration a mauvaise presse: les États se dotent de politiques antimigrants et érigent des murs barbelés au nom de la sécurité nationale. En biologie, les espèces animales ou végétales exogènes sont considérées comme «envahissantes». Pour déconstruire ces perceptions tenaces, Sonia Shah a suivi les migrants dans leurs périples, de l'île de Lesbos à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, et plongé dans une fascinante recherche documentaire. Elle retrace les déplacements spectaculaires dans le règne animal - comme ceux du célèbre papillon monarque - et explique comment nos ancêtres ont peuplé les coins les plus isolés de la planète, des plateaux tibétains aux îles reculées du Pacifique.
Inscrit aussi bien dans les organismes humains que chez les espèces sauvages, l'instinct migratoire serait en fait un vecteur important de diversité biologique et une réponse adaptative aux changements environnementaux. Dans un contexte de montée du racisme et de la xénophobie, Sonia Shah renverse notre regard sur les migrations pour en dévoiler toute la richesse et la beauté. Un voyage captivant.
La crise migratoire est-elle réellement une crise ?" Crise migratoire ", " invasion ", " grand remplacement ", " ruée " : autant d'expressions employées pour décrire l'immigration vers la France, l'Europe ou les " pays du Nord ". Ni anodins ni complètements nouveaux, ces termes font des étrangers une menace.
Mais sommes-nous réellement au coeur d'une crise migratoire exceptionnelle ? Ou s'agit-il là d'un discours politique et non étayé, alimenté par la peur de l'Autre ? Un discours qui se répète depuis plus d'un siècle et dont seules changent les cibles, et qui se durcit à la faveur de chaque nouvelle crise économique.
Il est temps de lever le voile sur le processus de fabrication de ce discours sur l'immigration, plus que jamais instrumentalisé au profit de différents acteurs - politiques, entreprises et institutions -, et d'interroger le modèle de société que nous souhaitons bâtir.
60 idées fausses sur les migrations décryptées et déconstruites, pour sortir des discours qui laissent croire qu'une politique d'accueil est impossible.
Dans le contexte particulier de la prochaine campagne présidentielle, les discours d'inquiétude et de crispation, voire de rejet, à l'égard des migrants, réfugiés, exilés et étrangers, risquent d'occuper une large partie de l'espace médiatique. Il est indispensable de répondre à ces discours, ce qui suppose dans un premier temps de les écouter et de les décrypter. C'est ce que cet ouvrage propose de faire : il examine et analyse les préjugés, les représentations fausses et les idées reçues sur les migrations, afin de les déconstruire point par point.
En réponse aux détracteurs de toute politique d'accueil, mais aussi à tous ceux qui hésitent ou qui s'inquiètent, ce livre propose un tour d'horizon des migrations en mettant à la disposition des lecteurs un très grand nombre d'informations, de chiffres, de données et de faits. Organisé par thématiques et rédigé dans un style très accessible, l'ouvrage s'attache à prendre le contrepied de 60 idées fausses, pour convaincre que l'accueil des exilés est non seulement possible, mais surtout souhaitable.
Ce livre est réalisé en partenariat avec une vingtaine d'associations et d'organisations impliquées sur la question des migrations.
Pas une semaine ne s'écoule sans qu'éclate une nouvelle polémique sur les migrations : violences policières, voile dans l'espace public, discriminations, quotas, frontières... Les débats sur ces sujets sont devenus tendus, polarisés et passionnels, tandis que la parole raciste s'est libérée, relayée avec force par des activistes identitaires. Collectivement, on a accepté de penser les migrations à partir des questions posées par l'extrême-droite, en utilisant même son vocabulaire. Quant à nous, chercheurs, nous nous sommes souvent retrouvés réduits à devoir débusquer rumeurs et mensonges, qu'il s'agisse de dénoncer le mythe de l'appel d'air ou du grand remplacement.
Nos sociétés resteront malades de ces questions tant qu'elles continueront à les envisager sous l'unique prisme des idéologies. C'est toute l'ambition de ce livre : montrer qu'il est possible de penser ces sujets de manière rationnelle et apaisée, en les éclairant de réflexions et de faits qui sont bien trop souvent absents des débats. En montrant, par exemple, que les passeurs sont les premiers bénéficiaires de la fermeture des frontières. Ou que la migration représente un investissement considérable pour ceux qui partent, alors qu'ils se retrouvent souvent décrits comme la « misère du monde ».
Les questions d'identité collective doivent être des enjeux qui nous rassemblent, plutôt que des clivages qui nous opposent. À condition de reconnaître et d'affronter les problèmes structurels de racisme dans nos sociétés. Après tout, on a tous un ami noir.
François Gemenne enseigne les politiques du climat et des migrations dans différentes universités, notamment à Sciences Po et à Bruxelles. Chercheur du FNRS à l'Université de Liège, il y dirige l'Observatoire Hugo, un centre de recherche sur l'environnement et les migrations.
«Ce n'est pas trahir ses convictions humanistes que de faire le départ entre le réel et l'utopie ; ce n'est pas renoncer à ses idéaux que de prendre en compte ce qui est possible et ce qui ne l'est pas.»
Didier Leschi
Il n'est pas de jour qu'un sinistre événement, une image bouleversante, une crise internationale ne nous le rappelle : la question du sort réservé aux migrants est cruciale. Il y a ceux pour qui la France devient une passoire exposée à l'invasion d'étrangers indésirables et qui veulent «suspendre l'immigration» ; et il y a ceux, moins nombreux, pour qui notre pays devient, comme l'Europe elle-même, une «forteresse», manquant à tout devoir d'humanité. C'est à ces deux tendances opposées que s'adresse tour à tour la présente mise au point de Didier Leschi, directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en plaçant chacun devant la réalité des faits et des pratiques - sans pour autant mettre au même plan ce qui relève de la démagogie, et parfois de la haine de l'autre, et ce qui témoigne, à la manière du «Fratelli tutti» du pape François, d'une noblesse d'âme et d'un haut sentiment de la fraternité humaine.
Les femmes ont toujours migré, de longue date et en nombre, mais leur mobilité a longtemps été occultée par celle d'un référent masculin considéré neutre et universel.
Selon une perspective étroitement économique, l'homme migrant, pourvoyeur de revenus, apparaît comme l'acteur principal de ces flux, tandis que la femme migrante, dépendante, campe dans des rôles sociaux secondaires de mère et d'épouse ou incarne la figure passive de victime.
Ces dernières décennies, la mise en visibilité du genre dans les théories des migrations et des femmes immigrées dans un champ féministe longtemps centré sur la femme occidentale a permis de déconstruire des catégories englobantes et des tendances faussement universelles, contribuant à complexifier l'approche des réalités migratoires et à cerner les effets réciproques des dynamiques de mobilité et de genre.
Dans les pays à hauts revenus d'Amérique du Nord, d'Europe, d'Asie et du Golfe persique, la «féminisation de la migration» fait généralement écho à la proportion croissante de migrantes internationales devenues pionnières de chaînes migratoires.
Plus fondamentalement, cette expression renvoie, dans un contexte d'austérité néolibérale, à une division sexuelle et racisée du travail et à des schémas inégalitaires qui - redéployés du Sud au Nord ou à l'intérieur des Suds - exposent une majorité de femmes migrantes à la violence, aux réseaux informels et à l'exploitation, dans les métiers du care, le travail domestique ou les services sexuels.
En quarante ans, le nombre de migrants dans le monde a triplé. L'ampleur comme la nature des flux migratoires a changé. Des notions comme celles de « migrations pendulaires » ou de « risque migratoire » ont fait leur apparition. De nouvelles questions se posent, qui rendent indispensable de porter un regard neuf sur les migrations : les déboutés du droit d'asile, de plus en plus nombreux, forment-ils désormais une nouvelle catégorie d'apatrides ? Quel type de lien social engendre un mode de vie à cheval sur plusieurs pays ? Quelles conséquences a l'externalisation de la gestion des migrants aux frontières de l'Europe ? Les migrations du Sud vers le Sud vont-elles supplanter celles du Sud vers le Nord ? En sociologue, Sylvie Mazzella fait le point des recherches sur les phénomènes migratoires. Elle met ainsi en relief les apports nécessaires de la sociologie de l'immigration et l'important renouvellement des connaissances que les approches transnationales ont permis.
Figure majeure du féminisme et de l'anti-racisme, Rokhaya Diallo livre ici un concentré de ses combats en 55 tribunes. Perpétuellement attaquée, c'est en combattante qu'elle s'exprime avec détermination et pédagogie. L'ouvrage couvre 10 ans d'intervention sur des sujets qui dérangent et que Rokhaya a réussi à pousser sur le devant de la scène.
« Crise des migrants », « crise des réfugiés », « crise de l'asile », « crise de l'hospitalité ». Toutes ces expressions traduisent un malaise des sociétés contemporaines face à l'accueil de populations qui, sous la contrainte, souvent dans l'urgence, quittent leurs pays d'origine pour trouver refuge. L'histoire permet de mettre en perspective les situations actuelles et d'observer à quel point certains discours et pratiques révèlent une forme de continuité, ou à l'inverse, des moments de rupture dans le domaine de l'accueil ou du non-accueil des personnes déracinées.
Cette recherche s'appuie sur des exemples concrets, puisés notamment dans les archives départementales des Hautes-Pyrénées, et plus largement, dans le grand Sud, qui fut à diverses reprises une zone de passage, d'hospitalité, mais aussi de relégation. Le fil conducteur est l'idée que les exilés et leurs itinéraires heurtés et discontinus en disent autant, si ce n'est plus, sur les pays qu'ils quittent que sur les États et les sociétés de transit ou d'accueil. Le point de départ de l'analyse est les années 1870, où l'idée de nation s'enracine en France délimitant ainsi plus strictement un « nous » et un « eux ». Les années 1980 où la gestion de l'asile connaît un basculement majeur, riche d'enseignements pour comprendre les dynamiques actuelles, constitue la période finale et conclusive de ce livre.
L'étude proposée en allant, parmi d'autres, des carlistes espagnols aux boat people en passant par les rescapés du génocide arménien, les républicains espagnols, les (r)apatriés d'Algérie, tente de donner à réfléchir sur les responsabilités de l'État, mais aussi de chacun dans son rapport à cet inconnu, notre semblable, qui vient chercher de l'aide, un temps de répit, un lieu de refuge.
Est-il possible de débattre sereinement et sérieusement de l'immigration en France ? Sur ce sujet, l'assurance des sophistes qui s'expriment régulièrement sur un thème pourtant complexe a de quoi surprendre...
L'ambition de Smaïn Laacher est de montrer à quel point les jugements moraux structurent les paroles et autres prises de position des acteurs du débat public sur ce sujet. En somme, les controverses autour de l'immigration sont gangrénées par 7 péchés capitaux dans lesquels baignent ceux qui se disputent autour du bonheur et du malheur des immigrés en France. Un livre utile pour toutes celles et ceux qui veulent parler enfin sérieusement d'un sujet central pour l'avenir de la cohésion nationale.
Smaïn Laacher est sociologue, professeur de sociologie à l'université de Strasbourg. Il est notamment l'auteur de Peuple des clandestins (Calmann Lévy, 2007) et Croire à l'incroyable : un sociologue à la Cour nationale du droit d'asile (Gallimard, 2018). Il publie, à l'Aube, Ça me pèse et Jugement Premier.
Ce livre, pédagogique et facile d'accès, présente les réponses à 30 questions essentielles que tout citoyen se pose sur l'immigration. Une réédition essentielle pour actualiser l'approche autour de cette thématique qui fait l'objet de débats récurrents, notamment depuis les nouvelles mesures migratoires françaises prévues depuis novembre 2019, et au regard de la récente crise sanitaire mondiale qui a bouleversé les flux migratoires internationaux.
En France, tout le monde ou presque se croit antiraciste. Pourtant les discriminations se perpétuent, de génération en génération, et les discours mettant violemment en cause les minorités se propagent en toute impunité. La mécanique raciste démonte les rouages de ce racisme systémique et en décortique les pièges. L'" intégration ", le " vivre-ensemble " et autres mascottes de l'antiracisme d'État, plaide Pierre Tevanian, sont des leurres qui minent une nécessaire politique d'égalité.
Tout le monde ou presque se dit antiraciste. Pourtant, les discriminations se perpétuent dans des proportions massives, et en toute impunité.
La Mécanique raciste met à nu, chiffres à l'appui, cette remarquable contradiction. À rebours des discours complaisants faisant du racisme une simple pathologie individuelle ou un réflexe de " peur de l'autre " naturel et compréhensible, Pierre Tevanian souligne son caractère systémique et son enracinement dans notre culture. Soucieux de " connaître pour mieux combattre ", il prend le racisme au sérieux et analyse ses ressorts logiques, esthétiques et éthiques, comme il est d'usage de le faire pour tout système philosophique - à ceci près qu'il s'agit ici de déconstruire une manière perverse de raisonner, de percevoir l'autre et de se concevoir soi-même.
L'objectif de ce livre n'est pas tant de " retourner " des racistes convaincus que de questionner et armer l'antiracisme. À l'heure où se construit un consensus phobique autour du " voile islamique ", du " problème des Rroms " et de la " crise migratoire ", il constitue un outil précieux. Concis, précis, implacable, il démasque le " racisme vertueux " des bons " républicains " et démonte les faux-semblants de l'" antiracisme d'État " - la " tolérance ", l'" intégration ", le " vivre-ensemble " - pour nous ramener à l'essentiel : une question simple mais sans cesse évacuée, celle de l'égalité.
En France, les sujets liés à l'immigration se succèdent en rafale : crise des réfugiés, débats sur l'islam et la laïcité, mises en cause du droit du sol, de la double nationalité ou du regroupement familial, sans compter les milliers de fugitifs qui tentent, souvent au prix de leur vie, de rejoindre l'Europe. Dans ce livre salutaire, François Héran décortique les grands arguments de ce débat sur l'immigration et le remet en perspective, dans ses dimensions à la fois démographiques et politiques.
En France, les " problèmes de l'immigration " se succèdent en rafale, dans un débat récurrent attisé par les cycles de la vie politique et en particulier le rythme de la présidentielle : crise des réfugiés, islam et laïcité, droit du sol, double nationalité, regroupement familial, " jungle " de Calais...
François Héran replace les arguments de ce débat dans une perspective démographique et politique. Il revient notamment sur l'ère Sarkozy : neuf années de mainmise sur la politique migratoire de la France, mais pour quel bilan ? Abandon de la politique d'" immigration choisie ", persistance de l'immigration dite " subie " mais légale : en fin de compte, une personne sur quatre vivant en France est immigrée ou enfant d'immigré. Le volontarisme ultra rêve encore, cependant, de faire sauter le verrou des droits fondamentaux.
Soulignant le progrès des connaissances sur l'immigration, l'auteur réfute les erreurs grossières de certains politiques (Marine Le Pen en tête) et essayistes médiatiques (tel Éric Zemmour). Il revisite la question de la citoyenneté : " droit du sang " et " droit du sol " sont en fait deux versions d'un même droit, le droit du temps. Sans occulter les obstacles à l'intégration, il la montre aussi à l'oeuvre, comme dans ce gymnase de banlieue où chacun, sans distinction d'origines et de croyances, vient donner son sang, peu importe à qui.
Au final, une approche sereine et réaliste. Ni pour ni contre l'immigration : avec elle, tout simplement.
Quatre-vingt-treize : la Seine Saint-Denis est la figure des transformations révolutionnaires que connaît la France contemporaine. Un département dans lequel l'importance de la présence musulmane s'inscrit au coeur des bouleversements de la démographie et de l'immigration, de la marche forcée de la désindustrialisation à la haute technologie, de la persistance du chômage, d'une intégration sociale difficile à mettre en oeuvre - mais aussi de la percée des nouvelles générations dans le champ politique, culturel ou économique. Ces contrastes très accusés sont l'une des caractéristiques les plus saillantes et les moins connues de l'islam de France. C'est cela que nous donne à voir Quatre-vingt-treize, en partageant avec le lecteur l'expérience du terrain au quotidien, depuis les mosquées et les HLM jusqu'aux lambris des palais de la République, et la perspective historique de trois décennies écoulées, à travers l'islam des 'darons', des Frères et des jeunes. Entre la tentation salafiste et la participation aux élections, le halal et l'internet, l'islam de France déploie une multiplicité de facettes qui s'inscrivent dans une citoyenneté encore inaccomplie, comme l'illustrent ces deux extrêmes opposés que sont la composition de l'équipe de France de football et celle de l'Assemblée nationale.
Quatre-vingt-treize apporte des connaissances inédites et de première main au débat de fond qui traverse notre société sur la participation de l'islam à la construction de son identité plurielle dans un univers globalisé.
Peut-on réfléchir, avec calme et probité, aux questions que pose l'immigration ?
Un pays comme la France peut-il garder le contrôle des flux migratoires sans renoncer pour autant aux principes d'hospitalité et d'ouverture qui font partie de son identité ?
Sur une question cruciale, trop souvent obscurcie par le mensonge et la démagogie, voici un dialogue de bonne foi. Sami Naïr, qui, depuis plus de vingt-cinq ans a consacré son temps à lutter pour les droits et les devoirs des immigrés en France, et qui a élaboré une stratégie de " codéveloppement lié aux lux migratoires " en tant que Délégué interministériel au codéveloppement et aux migrations internationales (en 1998), propose, dans cette passionnante discussion, un regard nouveau et réaliste sur l'immigration. Sans dérobade ni langue de bois, il répond aux questions, même dérangeantes, de sa propre fille.
Depuis le milieu des années 2000, un mot s'est immiscé dans le débat : islamisation. Les musulmans, dont la population s'accroîtrait dangereusement, chercheraient à submerger numériquement et culturellement l'Europe. L'imaginaire du complot déborde ainsi peu à peu le cadre de l'islamophobie ordinaire. Si cette perception paranoïaque était restée l'apanage d'une poignée d'extrémistes, elle ne ferait pas question, mais elle envahit aujourd'hui l'espace public, imprègne les discours de politiciens écoutés et les analyses d'auteurs réputés sérieux.
Cet essai salutaire s'attelle à déconstruire ce qui n'est autre qu'un mythe et interroge l'obsession collective qu'il recèle. Il montre ainsi que la " bombe démographique musulmane " qui serait prête à éclater sur le triple front de la natalité, de l'immigration et de la conversion relève du fantasme. Quant au regain de ferveur spirituelle et au renouveau identitaire des musulmans, ils n'ont pas la signification conquérante ni même politique que suggère l'épouvantail de l'" islamisme ". Cette réfutation en règle permet enfin de comprendre pourquoi l'Europe et la France en particulier ont tant besoin de l'" ennemi musulman ".
Raphaël Liogier est professeur à l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence, où il dirige l'Observatoire du religieux. Il a notamment publié Une laïcité " légitime " (Entrelacs, 2006) et Souci de soi, conscience du monde (Armand Colin, 2012).
Entrepreneur, formateur, figure de Canal+, fils d'immigrés camerounais et 100 % Français, Albert Batihe dénonce, avec une plume trempée dans le vitriol, l'humour et la douceur, les fausses idées de tous bords sur la condition noire en France. Un festival de révélations étonnantes et de formules décapantes au service d'un idéal : l'assimilation réussie. Libérateur. " Pourquoi nègre de blancs ? Je suis considéré dans mon milieu comme l'un des meilleurs communicants de ma génération. Mes idées, je les ai vendues à beaucoup de blancs. C'est tout le temps parti du même exercice : une feuille de papier et un stylo. Eh bien mes amis, c'est bien ça que vous appelez un nègre, non ? "
Dire leurs quatre vérités aux noirs comme aux blancs. Prendre de front les préjugés respectifs des uns et des autres. Raconter avec un humour ravageur, une plume polémique et une extrême douceur, son combat contre le mot d'ordre de son enfance : " Reste à ta place "... Albert Batihe n'aura cessé de faire bouger les lignes et d'abattre les murs. Le voilà qui bouscule ici toutes les idées reçues. Blanc sur noir. Noir sur blanc.
Voici son histoire. Voici sa méthode. Voici son manifeste.
Un livre libérateur pour tous les enfants de France.
Entre la peur et compassion, entre le besoin de sécurité, de limites et de frontières d'une part, et le sentiment d'un devoir de sauvetage des victimes d'un monde chaotique d'autre part, y a-t-il place pour un principe partagé, universel, qui ferait des migrants, plutôt qu'un problème, une cause pour tous, au sens d'une épreuve qui nous tire en avant, vers la compréhension et le désir d'un monde commun ?
Cet ouvrage tente de mieux saisir ce que signifie l'identité de la France, en reprenant les critères qu'Ernest Renan avait passés en revue : race, moeurs, religion, langue. Mais il explique surtout que c'est un dernier critère, celui de la culture, qui ouvre l'identité sur le monde.
« Je ne suis pas prêtre pour donner des leçons, ni pour faire la morale, je suis devenu prêtre pour que tout homme puisse entendre cette bonne nouvelle : chaque existence est infiniment aimée de Dieu.
Ce qui me navre aujourd'hui, ce qui me met en colère lorsque j'observe les conditions de vie de ceux qui arrivent sur notre territoire et les réponses que nous leur apportons, ce sont ces discours qui atrophient nos coeurs. Chacun doit chercher des solutions pour faire une place à celui qui est sur notre sol. Il s'agit de dignité. De la leur. De la nôtre aussi.
C'est à la société civile - où les religions, et bien sûr l'Église catholique, ont une place singulière - de prendre le relais pour défendre le droit des migrants. Il faut que des voix s'élèvent... »
Simon et Julie, sénégalais, mariés, ont un fils au pays et deux enfants à Paris : sans papiers pendant huit ans, ils sont régularisés au motif de leur "vie privée et familiale". Hortense, philippine, mère célibataire d'une fille née à Paris, a vécu durant huit ans sans papiers avant d'être régularisée pour "cinq ans de présence prouvée et un enfant scolarisé depuis au moins trois ans". Comment parler parenté et faire famille dans la situation d'une migration immobilisée ? Comment le dispositif juridique infléchit-il la vie privée ? Pour répondre à ces questions, l'auteure a enquêté pendant une dizaine d'années, sur le terrain, au plus près des migrantes et des migrants. Parenté sans papiers est le fruit de ce travail.