Affaires à répétition, crise de la protection sociale, poursuite du chômage... Face à ce climat d'incertitude, les Français sont perplexes. Et beaucoup se demandent : Que fait donc l'État ? Le problème est réel, et il n'est pas exclusivement d'ordre politique : à l'heure de la mondialisation et du chômage structurel, on est en droit d'attendre un sans faute de l'État. Or, trop souvent, celui-ci disjoncte, et les dysfonctionnements - petits et grands - de l'appareil public deviennent de plus en plus fréquents. Dans cet essai clair et décapant, René Lenoir analyse cette situation et propose des solutions. Il le fait à partir de trois dossiers exemplaires : celui de la politique fiscale et financière, qui a laissé se construire une société inégalitaire de rentiers et d'assistés ; celui de la délocalisation d'établissements publics, mal préparée et largement inefficace ; celui de la politique de décentralisation, vidée de sa substance au fil des années. Dans une seconde partie, René Lenoir s'appuie sur son expérience de quarante ans de service public, et de quatre années passées au gouvernement, pour formuler des propositions novatrices sur l'organisation même du travail gouvernemental, les moyens de prévision et d'évaluation à constituer et, surtout, sur la nécessaire évolution des rapports entre les politiques et la haute fonction publique.
Avec le passage des générations, les enfants d'immigrés s'intègrent pleinement à la société française. Et pourtant, des pans entiers de cette dernière continuent à rejeter les étrangers et les Français d'origine étrangère, comme en témoigne notamment l'audience durable du discours xénophobe des partis de MM. Le Pen et Mégret. Les explications ne manquent pas : chômage, « fracture sociale », discrédit de la classe politique, crainte d'une Europe « supranationale »... Mais dans les autres pays européens, où ces facteurs sont également présents, on n'a pas assisté à la consolidation de ce que certains ont pu appeler un « apartheid à la française », en particulier dans le Sud de la France. Pour Benjamin Stora, cette spécificité s'explique d'abord par la prégnance, depuis la fin de la guerre d'Algérie, des représentations du racisme colonial, anti-arabe et antimusulman, reprises à leur compte par les dirigeants du FN. En analysant dans ce livre un étonnant florilège de leurs déclarations sur le sujet, il montre comment celles-ci s'inscrivent dans une mémoire mythifiée de la colonisation de l'Algérie et de la guerre qui y a mis fin. Du discours des colons « ultras » à celui de l'OAS puis du Front national et du Mouvement national aujourd'hui, c'est un étrange « sudisme » à la française que révèle Benjamin Stora : une idéologie qui fait directement référence à celle des colons américains - esprit pionnier et conquête des grands espaces, mais aussi esclavagisme et relégation des « indigènes ». Une idéologie d'exclusion qui trouve une audience d'autant plus large qu'elle se nourrit des diverses « mémoires communautaires » constituées autour du souvenir de la colonisation et de la guerre d'Algérie, dans le déni et l'occultation de leurs pages les plus noires.
Pour la première fois sous la Ve République, un ministre est passé, en trois mois, du gouvernement à la prison. À l'automne 1994, la chute brutale d'Alain Carignon, maire de Grenoble, président du conseil général de l'Isère, ancien ministre de l'Environnement puis de la Communication, a sonné comme un avertissement supplémentaire pour une classe politique désespérément myope. Mais tout n'a pas été dit, loin s'en faut, sur la logique et les mécanismes qui expliquent cette ascension et cette chute exemplaires. D'où l'intérêt de cet ouvrage qui, grâce à une enquête approfondie nourrie aux meilleures sources, révèle les arcanes du système Carignon. Un système construit autour de la volonté et de l'ambition d'un homme, incarnation d'une nouvelle génération politique forgée par le marketing, et qui a remplacé la confrontation d'idées par une stratégie de communication tous azimuts. Un système qui a su tirer sa force des faiblesses de la décentralisation, par laquelle l'État a relâché ses contrôles, sans permettre l'affirmation de contrepouvoirs locaux. Grenoble-Paris, Paris-Grenoble : l'ascension d'un homme, la chute d'un système. C'est cette double histoire que retrace ce livre, rigoureux et renseigné, combinant anecdotes inédites et analyses en profondeur. Un livre qui vient, à son heure, pour mieux apprécier les faux-semblants et les enjeux réels des réformes sur la moralisation de la vie politique, adoptées après les incarcérations pour corruption liées à cette affaire.
Mondialisation, multiculturalisme, justice sociale, bioéthique, crise du politique : ces termes et ces expressions occupent l'espace du débat public sans qu'on sache souvent ce qu'ils recouvrent précisément. Pour cette raison, cet ouvrage tente de fournir un éclairage, aussi précis et complet que possible, sur ces grandes notions et sur les controverses qu'elles suscitent dans le monde politique et intellectuel. Les auteurs de chaque contribution se sont efforcés de mettre en évidence les problématiques, les termes et les enjeux de débats aussi complexes qu'incontournables : ainsi la place du droit dans nos démocraties, le rôle de l'école, la crise du lien social et, à l'extérieur de nos frontières, l'avenir de l'État-nation, le nouveau désordre international et la construction européenne. Dans ce livre, ces grands enjeux du débat public contemporain sont restitués dans leur dimension philosophique, politique, économique, juridique et sociologique. Cet ouvrage clair et pédagogique s'adresse, en priorité, aux étudiants des Instituts d'études politiques, aux candidats aux concours administratifs et aux écoles de commerce. Mais chacun pourra trouver, dans cet ouvrage, matière à sa réflexion personnelle sur les débats de notre temps.
Cinquantenaire, la Fédération de la chimie occupe une place particulière dans l'histoire de la CFDT. Souvent perçue comme intellectuelle, exigeante et rigoureuse, sa culture l'a toujours amenée à accorder une même importance à l'action, aux moyens de sa mise en oeuvre, et aux idées qui la portent.
Le syndicalisme, tout à la fois produit et acteur de la société, n'a jamais considéré le périmètre de l'entreprise comme la limite infranchissable de l'intervention syndicale. Cette place accordée à la réflexion et à l'analyse, ce souci de l'autonomie et de l'émancipation des gens ont conduit, bien souvent, la Fédération de la chimie à prendre des positions à l'avant-garde de la Confédération. Ce fut le cas lors d'événements importants, comme la guerre d'Algérie, ou la déconfessionnalisation de la CFTC. La référence à l'autogestion, et l'analyse de la crise que nous connaissons, qualifiée - dès 1975 - de profonde, structurelle et inhérente au capitalisme, sont d'autres étapes marquantes de sa réflexion.
À partir des années quatre-vingt, la Fédération de la chimie fait, de l'organisation du travail, un point stratégique d'investissement syndical, et prône - pour la CFDT - la nécessité de se doter d'un projet syndical rénové. Il ne s'agit pas, pour elle, de rechercher un nouveau dogme, mais de donner du sens à son action, et d'offrir des perspectives à des salariés - aujourd'hui sans repères - face au libéralisme, au populisme, et aux replis corporatistes.
Nourri d'enquêtes auprès des acteurs - et non des moindres, puisque la Fédération de la chimie a fourni de nombreux responsables à la CFDT - et de plongées dans les archives, faisant revivre ceux qui ont animé cette fédération (portraits d'Edmond Maire et de Jacques Moreau, notamment), ce livre retrace l'épopée de ces chimistes peu ordinaires.
La désintégration de l'Union soviétique ferme le XXe siècle. Mais quel XXIe siècle prépare-t-elle ? Et, à plus court terme, quels risques fait-elle courir aux peuples de cet empire détruit et aux autres, en particulier aux Européens ? C'est à ces questions que tente de répondre Jacques Sapir dans ce bref essai, qui tranche singulièrement avec la littérature de circonstance consacrée à ces événements historiques. Grâce à une connaissance approfondie des ressorts politiques, économiques et militaires du système soviétique, l'auteur met en évidence, de façon claire et synthétique, la manière dont les héritages du passé déterminent l'avenir de l'ex-URSS. Ainsi de la corruption ou de la crise de légitimité, qui continuent à miner les appareils politiques. Ainsi également des déformations et des pesanteurs d'un système économique que le néoléninisme de marché ultra-libéral semble bien impuissant à combattre. Ainsi, enfin, du militarisme paradoxal, dont la décomposition engagée de longue date fait naître aujourd'hui les risques de nouveaux conflits. De cette analyse dense et lucide, il ressort que le pire n'est pas sûr. Et que l'Europe communautaire, si elle sait résister aux clichés réducteurs sur la résurgence des nationalismes, peut et doit mobiliser les moyens nécessaires pour l'éviter.
La réforme des PTT, engagée en 1990, apparaît tout à fait exceptionnelle par son ampleur (450 000 personnes concernées) et par son originalité (un nouveau statut juridique pour la Poste et France Télécom et un bouleversement complet des règles de gestion de personnels conservant le statut de fonctionnaire). Elle fait figure de test pour tout projet de modernisation de l'État. Elle pose le problème de l'avenir du service public, et de sa relation avec les services soumis à la concurrence. Cet ouvrage, original à plus d'un titre, explore la face cachée de cette réforme, mal connue du grand public. Grâce à une enquête approfondie menée auprès de l'ensemble des protagonistes - ministères de tutelle, directions de la Poste et de France Télécom, fédérations syndicales... -, son auteur apporte une vision d'ensemble à laquelle bien peu d'acteurs concernés auront eu accès. À partir d'une analyse des origines de la réforme, Jocelyne Barreau propose un récit des négociations ayant conduit à la loi du 2 juillet 1990, et à l'accord social du 9 juillet 1990. Elle montre comment ces deux textes ont pu être adoptés, sans conflit social majeur, alors que les précédents projets de réforme des PTT avaient suscité de violentes réactions syndicales. Elle dresse enfin un premier bilan de la mise en oeuvre de la réforme, cinq ans après, en présentant aussi bien le point de vue des dirigeants et cadres qui en ont la responsabilité, que celui des représentants syndicaux. Elle analyse les transformations sociales en cours et les relations difficiles qui lient les deux prestataires de service public et l'État.
Associer une meilleure gestion de l'environnement aux politiques de développement, ne pas focaliser les projets sur des critères exclusivement économiques, penser le monde dans des termes socialement et écologiquement équitables et durables : l'enjeu est de taille. Pour agir, il faut comprendre ! Cet ouvrage éclaire la réflexion et l'action en pointant, pour chaque thème traité, l'état des lieux, les éléments du débat international et les propositions des ONG qui sont ou pourraient être mises en oeuvre. Sont abordés : l'agriculture, les catastrophes naturelles, le commerce, l'éducation à l'environnement et au développement, les populations déplacées, le financement du développement, la paix et le développement, la démographie, la question urbaine. Les chercheurs et les militants d'associations de solidarité internationale qui ont collaboré à cet ouvrage s'adressent ici aux citoyens et aux organismes décidés à agir et à dessiner les contours d'un indispensable monde solidaire. Le CRID, Centre de recherche et d'information pour le développement, est un collectif de 40 associations françaises de solidarité internationale. En font partie, entre autres : l'AITEC, le CCFD, la CIMADE, la fédération Artisans du monde, Frères des hommes, le GRET, Ingénieurs sans frontières, Peuples solidaires, le RITIMO, Terre des hommes, le Secours populaire français, Solagral.
Après vingt ans de lente dérive libérale, la société française a du mal à croire encore au progrès. La mondialisation lui fait peur. L'Europe lui paraît être un problème autant qu'une solution. La politique lui semble impuissante à résoudre les problèmes de notre société : chômage, montée des inégalités... Faut-il pour autant se résigner ? Non, nous dit Philippe Frémeaux dans cet essai alerte et documenté qui met en évidence les contraintes mais aussi les opportunités créées par les mutations de l'économie mondiale. Il nous montre ainsi que nous ne sommes ni condamnés à l'enfer ni promis au paradis, que la plupart des problèmes auxquels nous sommes confrontés, à commencer par le chômage, peuvent trouver une solution en France et en Europe. Et que la mondialisation peut aussi être synonyme d'espoir et de progrès, si nous parvenons à la civiliser. Il n'y a jamais de fatalité en économie. Contre la dérive libérale, contre le repli nationaliste, Philippe Frémeaux cherche les voies d'un projet adapté au monde actuel, qui puisse redonner du sens à la politique.
La démocratie est en péril : elle est menacée par le développement généralisé d'un libéralisme « ultra », sans foi ni loi. Face aux profondes mutations des sociétés contemporaines, les institutions et les élites semblent devenues incapables de trouver les réponses adaptées. En même temps, les thèses libérales envahissent l'ensemble de la société, après avoir pris le contrôle de l'économie. D'où une exacerbation des individualismes, une dictature larvée du court terme et des effets de médiatisation. Du coup, l'équilibre séculaire entre l'économique et le social s'est rompu. Comment retrouver les bases d'un humanisme qui reconnaisse la place de l'homme au coeur de la société ? Comment rendre à la République le fonctionnement d'une démocratie réelle, activement voulue et animée par des citoyens conscients et responsables ? L'intérêt de l'ouvrage de Alain Girard et Claude Neuschwander est d'abord d'étudier, ce qui est rarement fait, les effets proprement politiques de la crise économique et des évolutions idéologiques qui l'accompagnent : les auteurs en proposent une vision synthétique qui sera très utile à tous ceux que déçoivent les analyses contradictoires des responsables politiques et des médias. Mais ils ne s'en tiennent pas à ce constat, et ils explorent avec conviction les voies d'un renouveau : ils montrent que des voies d'action concrète s'offrent aujourd'hui, en dehors des circuits politiques classiques, aux citoyens qui ne se résignent pas à l'impuissance.
La France a choisi l'alternance. Le nouveau gouvernement s'applique à sa tâche avec sérieux. Saurons-nous, cela étant, nous attaquer collectivement aux causes fondamentales de la crise de notre système politique ? Nous mobiliser sur des réformes de structures à la mesure des défis ? On a trop incriminé la mondialisation, contrainte mais aussi opportunité : la crise est d'abord en nous-mêmes. Notre problème principal réside dans cette exception française : un régime hyper-délégataire. Si l'exercice du pouvoir demeure centralisé, et si la société se tourne toujours vers l'État, la démocratie française est menacée de régressions majeures. Reconstruire un pouvoir politique : réaliser cet objectif, conditionne tout progrès de société. Les Français ont besoin d'un plan de travail pour reconstruire leur maison. La société ne dispose aujourd'hui que d'un programme face à la conjoncture, pas encore d'un projet. Le mouvement social et civique qui prend essor est ambivalent, et demande moins d'être flatté, que de participer à la solution des problèmes. L'apport principal du livre de Philippe Herzog se situe au niveau de la méthode : réapprendre à travailler ensemble en société. C'est un manifeste pour une démocratie participative. En sollicitant les commentaires, reproduits ici, de huit personnalités d'horizons très divers, Philippe Herzog montre que le débat est possible et peut être fructueux. Comment organiser les responsabilités pour résoudre le défi de l'emploi ? Comment construire une stratégie de croissance dans la mondialisation ? Comment refonder l'État ? Comment unir les Européens ? Des pistes novatrices sont avancées : la cogestion, la coopération du public et du privé ; gouverner en partenaires, diffuser et partager les pouvoirs ; fédérer les Européens pour un développement solidaire. Un livre dérangeant et constructif, qui sollicite le débat.
Le débat public se construit en France autour de polémiques et controverses qui nourrissent les pages des grands quotidiens et hebdomadaires. Tribunes, pétitions, éditoriaux : au rythme de l'actualité, les prises de position des intellectuels, politiques, chercheurs structurent l'espace public en camps, voire en chapelles, ce qui ne contribue guère à clarifier les enjeux de débats en cours. Il n'est pas toujours facile de faire la part entre les polémiques fabriquées, et les débat essentiels, de percevoir clairement en quoi telle controverse est importante, quels enjeux se cachent derrière les effets rhétoriques et les phrases assassines. Bref, le citoyen ne s'y retrouve plus. L'objectif de cet ouvrage collectif est, ainsi, d'offrir au public des repères et de éléments d'informations, qui lui permettront sinon de se forger une opinion, du moins de décrypter les opinions exprimées ici et là. Passant en revue une série de débats politiques, économiques, culturels et sociaux de l'année, les contributions s'efforcent de présenter, à chaque fois, les positions en présence, d'éclairer leurs présupposés et, si nécessaire, mettent en évidence leurs insuffisances. Cet ouvrage est édité en partenariat avec La suite dans les idées, émission de France Culture produite par Sylvain Bourmeau, et consacrée à l'actualité du débat intellectuel.
Par millions, les électeurs français basculent dans l'abstention. Le citoyen deviendrait-il apathique et se désintéresse-t-il désormais de la politique comme l'électeur américain ? Sommes-nous en train de nous américaniser ? Pour répondre à ces questions, Françoise Subileau et Marie-France Toinet ont choisi une voie originale : analyser un ensemble de données, souvent inédites, sur les pratiques électorales en France, et les comparer à ce que l'on sait de la situation américaine. Elle démontrent ainsi que dépolitisation et désengagement sont, pour une bonne part, en France comme aux États-Unis, un mythe. Des méthodes d'investigation classiques, comme le dépouillement des listes d'émargement, ou l'enquête par sondage ou, plus nouvelles dans ce domaine, l'étude qualitative d'entretiens non-directifs, conduisent à affirmer que l'abstentionnisme complet n'existe pas en France. Et qu'il n'est, aux États-Unis, qu'une réponse à l'absence d'une offre électorale crédible. Si l'abstentionnisme existe donc durablement aux États-Unis, ce n'est pas le cas en France : un tiers des électeurs vote constamment, et les deux autres tiers ne sont que des abstentionnistes intermittents. Le plus souvent, en France comme aux États-Unis, l'abstention a une signification politique : comme l'a bien montré le vote au référendum de Maastricht, les électeurs donnent au pouvoir un avertissement. Saura-t-il l'entendre ?