Connu d'un large public pour ses écrits sur l'instruction publique, on ignore souvent que Condorcet peut être également rangé dans la catégorie des économistes. Oui, il existe un Condorcet économiste. Oui, ce Condorcet-là mérite de figurer en bonne place dans la longue histoire de l'École française d'économie politique libérale, ne serait-ce qu'en raison du soutien actif et indéfectible qu'il a apporté à la politique de liberté et de réforme de son ami Turgot. À une époque où l'économie française vivait encore sous la forte influence de Colbert, autrement dit sous l'autorité d'un dirigisme d'État, Condorcet a plaidé pour la liberté du commerce des blés, pour l'ouverture des frontières, pour la libre circulation des hommes et des marchandises, pour un aménagement du territoire propice à la circulation des richesses, pour l'abolition d'une police des grains qui enfermait les paysans dans un carcan d'interdictions. Pour Condorcet, l'économie, stimulée par les innovations, devait être un instrument valorisant les droits et la justice. Et cela dans une perspective de bien public. De façon claire et didactique, l'auteur invite le lecteur à la (re)découverte de l'économie libérale de Condorcet.
Le Conseil et le Bureau du commerce constituent l'instance principale de l'administration royale du commerce au XVIIIe siècle. Bien que le roi n'assiste jamais aux séances hebdomadaires, cette institution, créée en 1700 et dissoute en 1791, a contribué à modeler l'économie française de l'époque. Installée au sommet d'une pyramide institutionnelle, elle est étroitement associée à l'élaboration et à l'application du droit économique, exerçant un véritable pouvoir par procuration en matière d'édiction de la norme. La très influente présence, en son sein, de députés du commerce la crédibilise aux yeux des forces vives de l'économie. Par ailleurs, une intégration institutionnelle forte tend à la solidariser, de façon presque organique avec les chambres de commerce, les corporations et les manufactures. Contrairement à une vision quelque peu réductrice d'une économie « dirigiste », le Conseil/Bureau du commerce, durant la première moitié du siècle, opère une économie d'une nature profondément conventionnelle. Concrètement, cette institution est le point de rencontre de toutes les entités intéressées au commerce et le rapport de force s'avère ambigu entre le pouvoir et les opérateurs privés. Durant la seconde moitié du siècle, le Bureau du commerce change radicalement de politique, voire de doctrine, pour mettre en oeuvre un libéralisme économique « premier ». Le langage employé et l'intériorisation de concepts économiques et idéologiques nouveaux montrent le degré de pénétration de ce libéralisme.
Cet ouvrage analyse l'évolution des salaires des enseignants des années 1980 à nos jours. Il montre que malgré les revalorisations successives dont ils ont fait l'objet ces dernières décennies, les salaires des enseignants ont baissé. L'ampleur de la baisse varie selon les catégories d'enseignants. Mais toutes les catégories ont été touchées, les universitaires, les enseignants du secondaire et depuis les années 2000 également les enseignants du primaire. Alors qu'une nouvelle revalorisation des salaires des enseignants est annoncée, il s'agit de faire le point sur l'évolution des salaires des différentes catégories d'enseignants - professeur des universités, maître de conférences, professeur agrégé, professeur certifié, professeur des lycées professionnels et professeur des écoles - des années 1980 à nos jours.
Ce dictionnaire rassemble, en quarante-cinq notices réparties en trois volumes, les biographies très documentées des ministres des Finances, de la Révolution française jusqu'à la fin du Second Empire. Illustrées pour la plupart d'un portrait, enrichies par le dépouillement d'archives jusqu'alors inexploitées, telles que les archives notariales, elles détaillent les précisions recueillies sur la famille de chaque ministre, sur son éducation, sur sa fortune familiale et enfin sur sa carrière et son rôle dans la gestion des finances. Toute l'histoire financière de la France à cette époque est évoquée à travers les parcours de ces ministres. Dans ce second volume qui couvre la période allant de la Restauration (1814) à la fin de la monarchie de Juillet (1848), l'auteur souligne notamment l'importance de l'action déployée par les cinq figures ministérielles éminentes que furent Louis, Corvetto, Villèle, Humann et Lacave-Laplagne. Ils fixèrent pour l'essentiel les grands traits de l'organisation financière de la France contemporaine : réunion des Finances et du Trésor dans un seul ministère, mise au point de la procédure parlementaire du vote du budget annuel et du contrôle de l'exécution des exercices passés, développement du principe de la spécialité budgétaire, régularisation du mouvement général des fonds en relation avec la Banque de France et l'utilisation de bons du Trésor, réglementation de la comptabilité publique... Seule survivance archaïque : le recours à l'emprunt en perpétuel, ce qui posa le problème de la diversification du taux des emprunts, de la conversion des rentes et de l'amortissement de la dette. Le budget annuel, de 900 millions en 1816, s'éleva à près d'un milliard et demi en 1848, la politique des grands travaux, en particulier la construction des chemins de fer, ayant creusé un déficit croissant à partir de 1840, ce qui compromit la solidité du régime.
Un « impôt sur les imbéciles », une « friponnerie », un « jeu cruel », un « fléau inventé par le despotisme »... Les hommes des Lumières n'avaient pas de mots assez durs pour dénoncer la loterie royale, une institution que tous les États européens ont mis sur pied au xviiie siècle. Les souverains encourageaient donc la passion du jeu, l'oisiveté, et captaient sans vergogne l'épargne de leurs sujets ? Faire croire que l'on gagne, tandis que l'on perd toujours, n'était-ce pas le propre d'un État corrompu ? Ou bien doit-on plutôt considérer la loterie royale comme un outil d'ingénierie financière, le fruit d'une nouvelle rationalité publique ? La loterie est incompatible avec le secret de la finance, encore défendu par les doctrines absolutismes du pouvoir. Son succès s'appuie nécessairement sur les gazettes, la publicité, la transparence, tant de la roue de la fortune hissée sur une estrade, que des comptes, car tout soupçon de fraude doit être écarté. Pour la première fois, l'État s'expose à ne pas perdre la confiance du public. Les « calculateurs », - des plus savants, comme d'Alembert ou Condorcet, aux plus aventuriers comme le jacobite John Glover ou le vénitien Giacomo Casanova -, proposent des méthodes de gains qui garantissent un revenu permanent, tandis que la croissance du xviiie siècle permet le développement de l'épargne populaire. Voici donc que le hasard, combiné à l'abondance, génère un revenu public, un fonds de trésorerie que tous les souverains convoitent.
Gérer l'argent du roi... Voilà la mission prestigieuse et délicate que se charge d'accomplir le Bureau des finances de Lyon dans sa généralité, l'une des plus importantes du royaume, sinon par sa taille du moins par la densité de sa population. Impositions, domaine royal et voirie forment les activités de ce collège de magistrats à la fois moqué, redouté, envié, plusieurs fois supprimé mais toujours rétabli. Les notions de maîtrise des finances publiques, de contrôle budgétaire et comptable s'affinent lentement. Ces opérations, expressions parmi les plus sensibles du pouvoir parce qu'en prise directe non seulement avec les populations mais encore avec l'Histoire, donnent corps à un droit administratif qui tend à se différencier de plus en plus du droit privé. Elles reflètent l'affirmation d'un pouvoir royal en pleine expansion. Elles éclairent aussi le développement d'une province qui cherche à asseoir sa spécificité et à faire reconnaître son identité. Au travers d'archives exceptionnellement bien conservées, Karine Deharbe retrace le destin de cette institution de 1577 à 1790. Elle offre ici un nouvel éclairage de l'histoire financière, politique et administrative d'une région qui faillit devenir capitale de la France.
La Poste s'est imposée au fil des ans dans le domaine financier français et, de par son statut, son réseau et sa clientèle, elle y tient une place particulière. Il faut remonter au milieu du XIXeme siècle pour comprendre les raisons qui poussent l'Etat français à créer une Caisse d'épargne publique. De la création en 1817 du mandat poste à la création des comptes chèques postaux en 1918, c'est au cours de cette période que se forme le "coeur historique" des services financiers de la Poste actuelle.