19 novembre 1957
"Cher Monsieur Germain,
J'ai laissé s'éteindre un peu le bruit qui m'a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon coeur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n'ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j'ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. (...)
Je vous embrasse, de toutes mes forces."
Albert Camus
Alors qu'il vient de recevoir le prix Nobel de littérature, Albert Camus écrit à son ancien instituteur à Alger, celui sans qui "rien de tout cela ne serait arrivé", toute sa reconnaissance. L'ensemble de la correspondance entre les deux hommes et un extrait du Premier homme où apparaît le personnage de l'instituteur M. Bernard sont ici réunis. Une édition en forme d'hommage à ce lien magnifique de gratitude et de tendresse.
Éloge de l'amitié.
Quoi de plus libre et précieux que l'amitié ? Bernard Pivot en sait la valeur, lui qui a le bonheur de compter des amis fidèles, certains de toute une vie.
On connaît le critique littéraire, on découvre ici l'ami qui s'est toujours gardé de confondre attachement sincère et copinage. Une tâche délicate quand votre influence vous attire les faveurs... Mais Bernard Pivot en sait trop sur l'amitié pour se laisser duper. Dans son panthéon intime, on croise des camarades d'enfance et de lycée, des journalistes, des comédiens, quelques écrivains et un seul éditeur. Des élus, à jamais dans son coeur.
Dans ces pages vibrantes d'émotion et de sincérité, Bernard Pivot nous permet d'approcher au plus près cette mystérieuse alchimie entre deux êtres. On a peu de vrais amis. Ceux que Bernard Pivot célèbre ont changé sa vie. Et en parlant d'eux, il nous dit beaucoup de lui.
« Les contes de fées c'est comme ça.
Un matin on se réveille.
On dit : "Ce n'était qu'un conte de fées..."
On sourit de soi.
Mais au fond on ne sourit guère.
On sait bien que les contes de fées c'est la seule vérité de la vie. »
Antoine de Saint-Exupéry
Le 19 mars 1944, Albert Camus et Maria Casarès se croisent chez Michel Leiris. L'ancienne élève du Conservatoire, originaire de La Corogne et fille d'un républicain espagnol en exil, n'a que vingt et un ans. L'écrivain vit alors seul à Paris, la guerre l'ayant tenu éloigné de son épouse Francine, enseignante à Oran. Sensible au talent de l'actrice, Albert Camus lui confie le rôle de Martha pour la création du Malentendu en juin 1944. Et durant la nuit du Débarquement, Albert Camus et Maria Casarès deviennent amants. Ce n'est encore que le prélude d'une grande histoire amoureuse, qui ne prendra son vrai départ qu'en 1948.
Jusqu'à la mort accidentelle de l'écrivain en 1960, Albert et Maria n'ont jamais cessé de s'écrire, notamment lors des longues semaines de séparation dues à leur
engagement artistique et intellectuel, aux séjours au grand air ou aux obligations familiales. Sur fond de vie publique et d'activité créatrice, leur correspondance croisée révèle quelle fut l'intensité de leur relation intime, s'éprouvant dans le manque et l'absence autant que dans le consentement mutuel, la brûlure du désir, la jouissance des jours partagés, les travaux en commun et la quête du véritable amour, de sa parfaite formulation et de son accomplissement.
Lambert Wilson et Isabelle Adjani nous emportent au coeur de cette correspondance amoureuse intense et émouvante entretenue pendant près de quinze ans.
L'écoute en classe de ce CD est autorisée par l'éditeur.
Préface de Dinaw Mengestu
Dédié à celle qu'elle n'a jamais eue, Lettre à ma fille est une succession de courts textes décrivant les souvenirs qui ont façonné la vie exceptionnelle de Maya Angelou. Féministe avant l'heure, et après une enfance et une adolescence marquée par la violence, elle écrit avec le coeur de millions de femmes qu'elle considère comme ses soeurs de combat. La littérature la sauvera et l'amènera à être la première étudiante noire d'une école privée. Puis elle fréquentera le milieu intellectuel noir-américain et deviendra une grande militante de la condition des femmes noires. C'est grâce à l'écrivain James Baldwin qu'elle se mettra à écrire après la mort de Martin Luther King et deviendra l'auteure que l'on connaît aujourd'hui.
Dans ce captivant récit, l'auteure nous fait partager ses combats et les épreuves qui ont forgé son caractère dans la compassion et le courage.
Maya Angelou fut poète, écrivaine, actrice, enseignante et réalisatrice. En 2013, en tant que militante des droits civiques américains, elle a reçu le National Book Award pour « service exceptionnel rendu à la communauté littéraire américaine ». Elle est décédée le 28 mai 2014 à l'âge de 86 ans.
Sur une photographie ancienne, il est cet enfant sage et mélancolique, déjà penché sur son livre... ' Tout au long de notre vie, écrit François Truffaut, nous devenons des personnes différentes et successives, et c'est ce qui rend tellement étranges les livres de souvenirs. Une personne ultime s'efforce d'unifier tous ces personnages antérieurs. ' Depuis sa première lettre de jeune cinéphile à Jean Cocteau, en 1948, jusqu'à sa disparition prématurée en 1984, c'est son goût commun pour la litt érature et le cinéma qui traverse cette Correspondance inédite.
Truffaut s'y réinvente une famille de coeur auprès de ses écrivains de prédilection (Genet, Cocteau, Audiberti, Louise de Vilmorin), sollicite des figures renommées de l'édition (Jean Cayrol, Marcel Duhamel, Robert Sabatier) et les auteurs qu'il veut adapter à l'écran (Maurice Pons, David Goodis, Ray Bradbury, Henri Pierre Roché, René-Jean Clot...).
Ce sont les coulisses de la création, les passions des tournages que l'on découvre ici, mais aussi les remises en question et les zones d'ombre d'un homme pressé, auquel le temps va cruellement manquer... Et c'est à son ami Jean Mambrino, le père jésuite rencontré en 1954 dans le sillage d'André Bazin, que Truffaut adresse ce dernier petit mot, quelques mois à peine avant sa mort : ' Bonne année 1984, mon cher Jean. Je remonte la pente, je lis vos poèmes, ils m'aident et vos signes d'amitié me touchent beaucoup, affectueusement vôtre, françois.
La Lettre au père de Franz Kafka est l'une des oeuvres majeures du xxe siècle.L'une des particularités de cette Lettre au père, écrite en 1919, est que son destinataire n'en eut pas connaissance. La passion que Thomas Compère-Morel nourrit pour Franz Kafka et pour sa Lettre au père nous a impressionnés. Son rapport fusionnel avec cette oeuvre incomparable nous a convaincus qu'il pouvait en faire une lecture qui restitue la force et la beauté du texte. Notre choix d'éditeur est donc allé vers l'engagement et l'authenticité. Parce qu'elle est libre, la lecture que nous donne Thomas Compère-Morel est émouvante et profonde. Sa voix exprime toute l'humanité de ce chef-d'oeuvre bouleversant.
Claude Colombini et Patrick Frémeaux
Le 29 mai 1851, dans l'Ohio, une femme hors du commun, Sojourner Truth, prononce un discours qui fera d'elle l'une des plus célèbres femmes de son époque et qui est aujourd'hui considéré comme un discours fondateur sur les questions du racisme et du féminisme. Ce discours, ainsi que plusieurs autres de ses interventions orales, sont réunies ici et introduites par l'historien Pap Ndiaye. Née de parents esclaves, abolitionniste afro-américaine et militante du droit de vote des femmes, Sojourner Truth (1797- 1883) est inscrite au National Women Hall of Fame.
« Mon amour pourrait emplir dix siècles de feu, de chants et d'exploits - dix siècles entiers, immenses et aériens, pleins de chevaliers gravissant des montagnes ardentes, de géants légendaires, de Troie en fureur, de voiles orange, de pirates et de poètes. »
Dans les plus belles lettres à sa femme Véra, Vladimir Nabokov se révèle en amoureux adorateur et indéfectible, inventeur de génie des mots doux les plus fous, en filigrane de sa trajectoire d'écrivain.
Traduit du russe et de l'anglais par Laure Troubetzkoy
En mai 1897, à Munich, le jeune Rainer Maria Rilke rencontre Lou Andreas- Salomé, de quinze ans son aînée.
Le coup de foudre amoureux évoluera en une longue amitié et une puissante complicité artistique et humaine. « Toi seule sais qui je suis », lui écrit-il en 1903.
Cette sélection de lettres retrace l'histoire de ce lien unique entre deux âmes soeurs.
Traduit de l'allemand par Dominique Laure Miermont
Presque quotidiennement, pendant 18 ans, Vincent Van Gogh écrit à son frère Théo, auquel il envoie toutes ses toiles et se montre comme il est, dans un dialogue entre sa vie, les événements majeurs qui la traversent et lui-même. « Cherchez à comprendre le dernier mot de ce que disent dans leurs chefs-d'oeuvre les grands artistes, les maîtres sérieux, il y aura Dieu là-dedans. » ©1988 Gallimard (P)
Buenos Aires, septembre 1930. Antoine de Saint-Exupéry, chef d'exploitation de l'Aeroposta Argentina, fait la connaissance de Consuelo Suncín Sandoval, la jeune veuve salvadorienne de l'écrivain Enrique Gómez Carrillo. Après quelques semaines de vie commune en Argentine, ils choisissent de se marier en France auprès de la famille de l'aviateur.
Mais la vie conjugale du couple sera un parcours bien chaotique, malgré tout ce qui les réunit - et en premier lieu leur imaginaire commun, peuplé d'étoiles, de petits animaux et de toutes sortes de trésors. L'aventureux ' Tonio ' attend de son épouse une attention et un réconfort de tous les instants que le tempérament de celle-ci, éprise de liberté et douée d'une irréductible fantaisie, ne peut lui apporter continûment.
Mais Antoine et Consuelo ne se délieront jamais de leur alliance, pourtant soumise à des polarités contradictoires. Sacrée à leurs yeux, elle les réunira dans les moments les plus difficiles, jusqu'à New York où l'écrivain se trouve exilé entre 1941 et 1943. Et la promesse réciproque d'un amour inconditionnel leur permettra de supporter, non sans souffrance, l'éloignement et l'inquiétude, lorsque l'engagement militaire de l'écrivain les rendra inévitables - jusqu'à la fin tragique de juillet 1944.
Ces années sont aussi celles de l'écriture du Petit Prince - une fable qui illumine, en leur donnant son sens le plus profond, ces lettres souvent déchirantes d'émotion, où alternent la grâce et le désarroi, la défiance et la lumière. Un jeune prince voyageur, une rose et son globe : nous y sommes ! ' Il était une fois un enfant qui avait découvert un trésor ', écrit Antoine de Saint-Exupéry dans sa première lettre à Consuelo. ' Mais ce trésor était trop beau pour un enfant dont les yeux ne savaient pas bien le comprendre ni les bras le contenir. Alors l'enfant devint mélancolique.
Quand Proust rencontre Anna de Noailles à la fin du XIXe siècle, celle-ci est auréolée d'une gloire à la fois poétique et mondaine, que viennent encore rehausser sa jeunesse et sa beauté. Avant même de connaître ses poèmes, le romancier semble séduit par cette jeune partisane de la cause dreyfusarde, avec qui il partage une constitution fragile qui fera d'eux des reclus magnifiques. De 1901 à 1922, ils entretiennent une correspondance qui témoigne de leur amitié et de leur commune admiration, de la façon dont ils se sont lus l'un et l'autre et de leurs influences respectives.
L'entrée de Barack Obama à la Maison-Blanche en 2009 a marqué un tournant dans l'histoire des États-Unis. Il s'est notamment imposé au fil des ans comme un orateur hors pair, et nombre de ses discours demeurent en mémoire. Cette anthologie en rassemble huit. Dans une langue tour à tour déterminée, grave ou encore exaltée, Barack Obama n'a de cesse de réaffirmer son amour et sa confiance en son pays et ses habitants et, quelles que soient les circonstances, de toujours véhiculer un message porteur d'espoir, à l'image de son slogan : Yes, we can !
"Parce que le plus puissant vocable de notre démocratie, c'est ce "Nous". "Nous, le peuple." "Nous vaincrons." "Oui, nous pouvons." Ce mot, personne ne le possède. Il appartient à tous. Oh, quelle glorieuse mission nous a-t-on confiée, de tâcher sans cesse d'améliorer ce grand pays qui est le nôtre !"
Franz Kafka connut d'abord Milena comme traductrice : elle établissait la version tchèque de quelques-unes de ses proses courtes. Ces relations se transformèrent en une liaison passionnée dont les lettres permettent de suivre le progrès. Cette passion ne dura qu'un instant, elle tient en quelques mois à peine.
Les lettres racontent d'un bout à l'autre ce roman d'amour, orgie de désespoir et de félicité, de mortification et d'humiliation. Car quelle qu'ait pu être la fréquence de leurs rencontres, leurs amours restent essentiellement épistolaires comme celles de Werther ou de Kierkegaard.
Milena est morte vingt ans après Kafka, dans le camp de concentration de Ravensbrück.
Ce volume réunit les trente-quatre textes connus des prises de parole publiques d'Albert Camus, s'achevant sur la transcription inédite de son allocution au dîner de L'Algérienne, le 13 novembre 1958 à Paris. D'une conférence à l'autre, l'écrivain diagnostique une "crise de l'homme", s'attache à redonner voix et dignité à ceux qui en ont été privés par un demi-siècle de bruit et de fureur. C'est bien de civilisation qu'il s'agit ici. Pour Albert Camus, il y a un métier d'homme, à la mesure de chaque individu, qui consiste à s'opposer au malheur du monde afin d'en diminuer la souffrance. Et l'écrivain ne saurait se soustraire ni à cette discipline, ni à cet honneur : "J'aime mieux les hommes engagés aux littératures engagées, écrivait Albert Camus dans ses Carnets. Du courage dans sa vie et du talent dans ses oeuvres, ce n'est déjà pas si mal."
André Gide a écrit, au cours de sa vie, des milliers de lettres adressées à plus de deux mille correspondants. Peu avant sa mort, il a déclaré : 'Je faisais métier de mon amitié. C'est un métier fatigant qui requiert des soins assidus. Je m'y usais. J'écrivais peu à chacun, mais j'écrivais à beaucoup.' Par ses lettres, Gide rassemble autour de lui la diversité de l'humaine condition, dont il s'efforce de tirer le meilleur. De Pierre Louÿs à Camus, en passant par Aragon, Breton, Giono, Léon Blum, Rilke, Colette, Proust ou Cocteau, cette correspondance est le reflet idéal de plus de soixante ans d'histoire littéraire.
Cette correspondance secrète livre un témoignage unique sur le combat des philosophes et sur la vie politique de cette période des années 1770-1778, où le changement de règne et l'avènement de Louis XVI modifie le rapport de forces entre le parti philosophique, splendidement illustré par le trio Voltaire-D'Alembert-Condorcet, et la monarchie d'Ancien Régime.
En 1948, Jacqueline Duhême a vingt ans. Elle est apprentie dans l'atelier de Matisse. Elle s'y languit de Paul Éluard, qu'elle aime et qui lui écrit peu. Dans ses lettres quotidiennes, elle lui raconte sa vie auprès du maître et les visites d'amis célèbres, comme Chagall, Picasso, Skira et Prévert, déjà. Jacqueline orne les lettres de croquis et de dessins colorés. Chaque enveloppe est un petit tableau.
Ce livre reproduit un large choix des lettres, retraçant ainsi l'évolution du sentiment qui, du chagrin amoureux, se mue en une tendre amitié qui n'exclut pas les commandes : Jacqueline demande parfois au poète un conte à illustrer. La beauté et l'espièglerie des dessins de ces lettres nous font assister à la naissance de la célèbre imagière qu'est Jacqueline Duhême.
La légende fait de Modigliani un peintre maudit, pauvre, incompris, caractériel, ravagé par le tourment, l'alcool et les drogues. Un être désespéré qui se serait suicidé par négligence.
Pour la première fois, ses lettres se trouvent réunies. Les lire ensemble, les mettre en rapport permet de découvrir un autre Modigliani. Un artiste joyeux, travailleur, animé d'une discrète mais solide foi en ses moyens, qui sait qu'il trace sa voie, et que cette voie est nouvelle.
« Oh ! je vous entends ! En recevant cette lettre, vous allez regarder l'écriture et, quand vous reconnaîtrez la mienne vous allez dire : « Qu'est-ce qui lui prend de nous écrire ? Il sait pourtant où nous trouver. Voilà l'époque de la moisson, nous ne pouvons être qu'à deux endroits : ou aux champs ou à l'aire. Il n'avait qu'à venir. A moins qu'il soit malade - ouvre donc - à moins qu'il soit fâché ? Ou bien, est-ce qu'on lui aurait fait quelque chose ? » »
Ce volume, qui rassemble quelque deux cents lettres écrites par Rimbaud, retrace le destin exceptionnel d'un homme devenu mythe. À seize ans, il entendait changer la vie par les moyens de la poésie ; à vingt ans, il renonça à la littérature pour toujours, et s'engagea dans un périple qui le mena en Arabie et en Afrique, où il se fit négociant, explorateur et trafiquant d'armes.
Aux côtés des « lettres du Voyant », où se manifeste son précoce génie, et de ses échanges avec ses compagnons de bohème Verlaine, au premier chef , on découvrira ici les nombreux courriers que Rimbaud, ayant tout quitté pour « faire de l'or » et se frotter à la « réalité rugueuse », rédigea depuis le Yémen et l'Abyssinie.
Adressée à ses amis et à Banville, puis à sa famille et à ceux qu'il fréquenta durant son exil, cette correspondance lucide et désespérée, poignante à bien des égards, permet de saisir le vrai visage de « l'homme aux semelles de vent ».
Cette édition comporte également une nouvelle lettre, étonnante révélation rimbaldienne découverte en 2019 par l'arrière-petit-fils de son destinataire, dans laquelle Rimbaud mentionne son « Histoire splendide », jusque-là seulement évoquée par ses contemporains.
Vladimir Nabokov et sa femme Véra se sont rencontrés en 1923, à Berlin, où leurs familles respectives avaient fui le pouvoir bolchevique. Tout au long du demi-siècle que dure leur mariage, ils ne sont séparés que rarement, mais alors il lui écrit chaque jour : ainsi quand Véra part se soigner dans un sanatorium de la Forêt Noire, quand Vladimir rend visite à sa famille réfugiée à Prague, où quand Véra tarde à le rejoindre à Paris. Plus tard, ses conférences dans le Sud des États-Unis suscitent de nouvelles lettres. Dans toute cette correspondance, pour nous à sens unique - Véra ayant détruit ses propres lettres -, on voit la passion de Nabokov pour sa femme, sa vie quotidienne dans le milieu de l'émigration russe à Berlin, les bouleversements auxquels tous deux sont confrontés dans leur vie matérielle et affective, le dénuement qui est le sien lors de ses débuts à Paris, l'intérêt croissant suscité par son oeuvre auprès des éditeurs et d'un public éclairé, le soutien indéfectible que lui apporte Véra.
Ces lettres, outre ce qu'elles révèlent sur l'homme, nous font découvrir le laboratoire de l'écrivain - son énergie créatrice, la pléthore de sujets qui surgissent et disparaissent, l'intensité de son travail - et on y reconnaît l'originalité de son style : sa veine parodique, poétique, sa vivacité et ses jeux de mots.
Après les éditions complètes des Nouvelles et des Chroniques, voici celle de la Correspondance de Clarice Lispector qui réunit pour la première fois en un seul volume près de 300 lettres, dont plus de 70 inédites, de l'une des plus grandes écrivaines de son temps. Elles parcourent
quatre décennies (1940-1977) et offrent une vision d'ensemble de la vie privée et littéraire de Clarice Lispector.
Dans ses lettres à sa famille et à ses amis, l'autrice exprime la quotidienneté d'une existence d'expatriée, d'épouse et de mère attentive... Il y a aussi les lettres adressées à un deuxième cercle, celui de ses amitiés littéraires. On découvrira ici un nombre conséquent de destinataires contemporains de Clarice Lispector, qui ont illustré la vie littéraire brésilienne très brillante de l'époque (João Cabral de Melo Neto, Fernando Sabino, ou encore Rubem Braga...). Enfin, il y a les lettres professionnelles, où on la voit se préoccuper du sort de ses oeuvres. Dans un registre encore plus intime que celui qu'elle emploie dans ses chroniques, c'est toujours la même finesse d'esprit, le même sens de l'humour et la même délicatesse qui laissent entrevoir l'être
humain derrière ses chefs-d'oeuvre. En ce qu'il révèle de la personne qu'était Clarice Lispector, cet ouvrage vient compléter le cycle de publication de ses oeuvres par les éditions des femmes-Antoinette Fouque et constitue une pièce essentielle du puzzle claricien.