"Que le cinéma aille à sa perte, c'est le seul cinéma.
Que le monde aille à sa perte, qu'il aille à sa perte, c'est la seule politique."
Marguerite Duras, Le Camion
Cet ouvrage recueille, pour la première fois, un ensemble de textes et d'entretiens de Marguerite Duras, la plupart inédits ou difficiles d'accès, autour des dix-neuf films qu'elle a réalisés des années 1960 à la fin des années 1980. Depuis La Musica jusqu'aux Enfants, en passant par India Song, Le Camion ou Le Navire Night, Marguerite Duras a rédigé des textes pour des dossiers de presse, des notes de tournage et des déclarations d'intention, des commentaires et des réflexions sur ses écrits, ses films et sur la situation du monde et du cinéma. Pour Marguerite Duras, tout est écriture, d'un bref entretien, d'un commentaire de film au roman, à la pièce de théâtre ou radiophonique, jusqu'au film lui-même.
Dans la joie du voyage, le plaisir du flash-back et des remontées en surface, Yann Dedet, monteur, revient ici sur cinquante ans de carrière et une bonne centaine de films. Avec un sens unique du détail, mais attentif aux grandes lignes, il se rappelle ses collaborations au long cours avec Truffaut, Stévenin, Pialat, Garrel, Poirier et tous les autres. Pourquoi n'avoir jamais monté plus d'un film avec la même réalisatrice ? Comment oublier le scénario et regarder le film en fac ? Qu'est-ce qui fait du monteur un psychanalyste d'occasion, un amant passager et un philosophe platonicien ? Et quel étrange syndrome pousse les cinéastes à lui demander des plans qu'ils n'ont pas tournés ? Dans cette seconde chambre obscure, le gardien ultime de la mémoire parvient-il toujours à retrouver le rêve du film ?
Entretiens avec Julien Suaudeau, romancier, collaborateur à Positif et réalisateur de plusieurs films. Il enseigne à Bryn Mawr College, non loin de Philadelphie.
"J'essaie peut-être de dire une chose impossible : être où je ne suis pas, parler avec les morts, aimer une inconnue. J'essaie, penché sur l'image, de fixer le point où la fiction prend corps.
Des histoires liées à la photographie, au cinéma, à des images qui hantent la mémoire ; des récits en train de s'écrire, des enquêtes en train d'être menées, des scènes en train de se filmer ; des études de cas : Antonioni, Gus Van Sant, Chris Marker, Giacometti, Stendhal, Duras...
Au fond de toute image, de tout récit, il s'agit avant tout de saisir l'absence, d'écrire la disparition."
Bertrand Schefer.
Morceaux de scénario, fragments de conversations, bribes de reportages, amorces de réflexion, poème (un), parcelles autobiographiques, photos, dessins, schéma : un appareil qui produit essentiellement du récit ne peut que raconter des histoires. Ou une histoire, celle de Mortinsteinck, le film : un jeune homme en tue un autre. De remords et de tristesse, il part s'engager dans la Légion étrangère... Le livre dans sa progression renvoie au format choisi pour le film - la vidéo ordinaire S-VHS : il ne cherche pas l'image en plus (un supplément, voire un enrichissement) ou la belle image, mais une image de moins, défectueuse, hétérogène, ouverte.
Reprenant au détail l'analyse systématique d'un tableau vénitien du XVIe siècle, Une partie d'échecs, le présent essai entend déplacer les grilles formelles d'une première publication. Ce travail de jeunesse avait donné lieu à un malentendu qui s'est nommé sémiologie des arts visuels. L'auteur était une ombre, il y manquait la chair, la peinture et la comédie des passions simulées, c'est-à-dire les raisons de notre attachement aux fictions. Ce livre-ci, à son tour, s'annule de lui-même : tout doit s'effacer. Le plaisir est la disparition de son objet, l'assurance de son évanouissement. L'objet d'élection ne meurt pas, il devient le passé. Seule la jouissance en est le présent.
Il ne s'agit pas d'un essai de plus (savamment pensif, forcément critique) sur la télévision. Plutôt de la confession d'un qui, presque chaque soir (aux heures les pires, celles dites «de grande écoute»), se vautre devant la boîte à vider les cerveaux. Allumer le récepteur, c'est ouvrir une encyclopédie des idées reçues, des idolâtries et des violences du siècle. Rien de plus navrant que la vie et le monde vus à la télé. Mais, à ce point de bêtise et de crudité, rien non plus de plus marrant. Suffit de recopier, en à peine accéléré, pour tout faire tourner en farce : JT saucissonnés, séries en solde, pubs bouffonnes, céérmonies météorologiques, sitcoms ménagers, feuilletons tiroir-caisse, docu-fictions en peau de lapin pour les presque nuls. Et hop, zapping, moteur : c'est guignol, c'est carnaval!
Renaud Camus, chez lui, à Plieux (Gers), abrite une des plus belles collections d'art contemporain actuellement visibles en France. Le texte recueilli dans ce petit livre est une réflexion autour de ces oeuvres qui se tiennent exactement sur cette lisière, en ce lieu impossible, intenable, ce non-lieu, entre l'absence et la présence, entre le silence et la parole, entre la profération et le retrait, entre le sens et le refus de sens, ou la totale ambiguïté. Elles représentent parfaitement cet art de la seconde moitié du XXe siècle, qui vient après Auschwitz, sans doute le plus grave, le plus profondément tragique, de toute l'Histoire de l'humanité. 'L'art contemporain - tel du moins, encore une fois, qu'il est représenté à Plieux, et aujourd'hui à Flaran, donc, mais plus généralement en l'une de ses expressions, ou de ses tendances, que je crois compter parmi les plus hautes -, l'art contemporain, autant ne pas le cacher, a quelque chose à voir avec le rien, voilà ce que je pense. Par la même occasion, il a quelque chose à voir avec le sacré.