Un petit paysan qui n'avait jamais quitté son village se retrouve un jour enfant de troupe. Dans ce récit, il relate ce que fut sa seconde année de jeune militaire, une année de découverte et de bouleversements, qui le verra mourir à son enfance et s'éveiller à des réalités et des énigmes dont il ignorait tout. La faim, le froid, les bagarres, son avide besoin d'affection, l'admiration qu'il voue à son chef de section, sa passion pour la boxe, les sévices que les anciens font subir aux bleus, la découverte de l'amour avec la femme de son chef, le sadisme de certains sous-officiers, la nostalgie qu'il a de son village, de sa chienne et de ses vaches, ses quinze jours de cachot, son renvoi de l'école puis sa réintégration, la hantise de mourir à dix-huit ans, là-bas, dans ces rizières où la guerre fait rage..., c'est le récit d'une entrée en adolescence, avec ses révoltes et sa détresse, ses déchirements et ses ferveurs.
Été 1971. À dix-sept ans, Franz Farkas quitte Tilliers, sa petite ville de France, pour passer un an à Oakland, dans la baie de San Francisco.
Accueilli par une famille très atypique, le jeune Franco-Algérien s'immerge dans la Bay Area et découvre ses communautés, ses mouvements et sa diversité, ses films et sa télévision, sa musique et ses chansons, sa culture et sa langue ainsi qu'une autre manière d'apprendre, d'inventer et de s'épanouir.
Dans l'ombre menaçante de la guerre du Vietnam, il rencontre des féministes radicales, des Black Panthers, des membres de la communauté gaie et lesbienne, des gauchistes poseurs de bombes, des Indiens-Américains récemment chassés d'Alcatraz, des enfants d'immigrants japonais internés pendant la Seconde Guerre mondiale - et tient un double rôle féminin dans le Musical de sa High School !
Et pendant ce temps, dans la France de l'après-de Gaulle...
Racontées en choeur par celles et ceux qui les ont vécues des deux côtés de l'Atlantique, ces histoires d'hier annoncent l'Histoire d'aujourd'hui.
Sandrine souhaite partager sa localisation avec vous.
"- C'est toi qui l'as tué, le fils Fabre ?
Je suis pas du tout surpris par la question et d'ailleurs, je suis même pas sûr que ça soit vraiment une question. J'ai d'abord l'idée de contester mais j'en fais rien, je réfléchis, je me dis que désormais entre Gabin et moi, c'est à la vie, à la mort, il m'a dit des choses, il faut que moi aussi j'y donne une vraie preuve de confiance et même une preuve d'amour, et donc je me tourne vers lui et lui aussi il quitte la route des yeux, juste la fraction de seconde où j'y dis :
- Oui !"
Des choses idiotes et douces est le second volet d'un diptyque dont En prison est le premier. Dans En prison Frédéric Boyer racontait le lent évanouissement d'un homme que la culpabilité mais aussi la compréhension, et la compassion, amènent à se fondre parmi les prisonniers. Cette fois, il nous décrit l'impossible réadaptation de Cody, qui est resté près de 20 ans derrière les barreaux. Son refus de sortir et, une fois qu'il est sorti, qu'on l'a obligé à sortir, cette manière qu'il a de refuser l'air libre, la vie, de s'enfermer à nouveau. Et d'entraîner avec lui, Tom, celui qui devait au contraire l'aider. On retrouvera dans Des choses idiotes et douces, comme dans En prison, le même lyrisme désespéré, la même humanité désolée mais aussi, constamment présente, une semblable colère contre le sort fait aux hommes qui ont trébuché. Cela n'est pas juste qu'un homme ait à souffrir des choses idiotes et douces de l'existence quotidienne.
C'est un petit paysan, un enfant sensible, attachant, dont on ignore le nom. Il découvre le monde des adultes, la vie, la peur, la tendresse. Il se livre à ses premières expériences, douces-amères, ou tragiques. Enfant de troupe, il connaît la solitude, l'ennui, la cruauté de certains chefs mais aussi l'amitié. Plus tard, avec le retour à la vie civile, c'est une autre solitude, une autre forme d'ennui et de désespoir. Mais il y aura cette ouverture, cette lumière possible que suggère une rencontre inattendue.
Écrit tantôt sous forme de notes et de fragments plus ou moins développés, tantôt sous forme de récits, L'Inattendu est l'épilogue, longtemps après, de L'Année de l'éveil.
C'est en Corrèze, sur le plateau de Millevaches, l'histoire de la famille Pythre, une histoire qui va de la fin du siècle dernier à nos jours. Au commencement, il y a André Pythre qui arrive un soir au village, venu d'un canton voisin, le bout du monde, avec une demi-idiote, sa femme ou sa domestique, on ne sait. André Pythre est un personnage hors du commun, taciturne et mélancolique, en qui semblent se résumer des siècles de privations et d'entêtement à survivre en même temps qu'une volonté féroce de s'en sortir, d'échapper au nom impossible, au granit, à l'eau, au ciel trop bleu, à la jalousie des autres, à cette terre noire et froide qu'il faut disputer aux genêts, aux ajoncs, à la pierre. Mais comment vaincre la «maudissure» qui vous suit, vous et les vôtres, depuis si longtemps, comment vaincre ce qui gît en vous-même et vous entraîne vers le silence et la nuit?
Ce mausolée aurait dû être le tien, fragile monument que je m'étais efforcée de bâtir, non pas à ta gloire, mais pour te détruire, saccager pour toujours ton image et cet immense amour que j'avais eu, de toi.
Diégo-Suarez, Madagascar. Une baie sur l'Océan indien, du soleil, des vestiges coloniaux, des filles, des ONG. Des Blancs en fin de course dont le monde blanc ne veut plus. Des voyageurs qui débarquent. Si ce roman a un but, c'est de bien faire comprendre au lecteur occidental que, considéré depuis tous les «bouts du monde» de la planète, l'Occident, c'est le bout du monde.
Cela commence par une célèbre et très belle photo de Nan Goldin, Sharon in the river, une photo qu'on ne voit pas mais que décrit le narrateur, ce « mage » qui donne son titre au livre et, de fil en aiguille, cela va très loin dans l'espace et dans le temps pour périodiquement revenir à cette photo, centre énigmatique du livre, irradiant de sensualité, avant de repartir encore pour de nouvelles aventures. Un mage ? ou un artiste, et pourquoi pas un écrivain ? Un écrivain, un artiste, un médium, doué d'une perception ultra-pénétrante tout autant des choses matérielles que mentales, imaginaires, mémorielles, présentes et passées. C'est un monologue d'une inventivité inouïe, d'une drôlerie vertigineuse, qui va de l'infiniment petit à l'infiniment grand, du plus intime et du plus autobiographique à l'évocation historique à grand spectacle. C'est une réflexion en mots et en images sur l'art, la représentation, le deuil, la souffrance et l'amour. Abondamment illustré d'images qui viennent baliser ce parcours narratif débridé, cela crépite de toutes parts pour, suprême élégance, masquer le coeur souffrant du livre.
La question est ici : Est-ce qu'une relation peut être renversée ou non? Viggo Brøndal. En 1940, un an avant la naissance de Claude Royet-Journoud, le linguiste danois Viggo Brøndal publiait un livre sous ce même titre. «Presque invisible, la préposition hante la langue et plus particulièrement la langue de poésie. Elle l'aimante, la creuse, la bouleverse. Ici, je tente d'en saisir le récit et d'en retourner certains effets. Ce livre est d'abord un premier livre. Il en a, en quelque sorte, l'innocence et, oserai-je le dire, la perversité. Chacune des séquences de Théorie des prépositions est peut-être le miroir de cet enjeu. La fin fut repoussée à plusieurs reprises avant de pouvoir se reconnaître.» Claude Royet-Journoud.
«[...] Ceci est donc le premier tome d'une série dont le but est de rendre compte de la diversité et de la richesse de l'oeuvre de l'un des écrivains les plus importants de notre temps. Bernard Noël est en effet un poète, mais aussi un romancier, un reporter, un polémiste, un sociologue, un historien, un critique d'art. Chaque volume, centré sur une des thématiques de l'oeuvre rendra aussi compte de cette grande diversité d'approche et de la non moins grande variété formelle des modes. On l'aura compris, Les Plumes d'Éros reprend les écrits érotiques de Bernard Noël, part importante, voire déterminante de son travail puisqu'elle lui a permis - les textes réunis ici s'étalent sur cinquante ans - d'expérimenter très tôt les rapports qu'entretient le corps avec la langue, avec les mots, et à quel point la phrase, la pensée, les sens forment ensemble une réalité qui dépasse chacun des éléments qui la constituent. Il y a dans ce volume des récits, des disputes et discussions, des poèmes, des essais, des textes aussi qui mélangent les genres et les subliment. Il y a, évidente et troublante, une écriture dont la sensualité donne à la pensée qui l'anime une présence et une épaisseur bouleversante alors même que l'humour comme la plus grande profondeur n'en sont jamais exclus.» Paul Otchakovsky-Laurens.
Ce roman bref met en scène un héros, Horacio Picq, dont on comprend assez vite qu'il est un «révolutionnaire professionnel» qui, pour parfaire sa connaissance des fortifications militaires, s'est rendu en province dans une forteresse, précisément, dont la bibliothèque, ouverte aux chercheurs, recèle de précieuses indications. Las, il semble avoir été démasqué, et se trouve en fait emprisonné par surprise. Dans sa chambre qui devient une cellule, il découvre, outre une carte du ciel, une paire de jumelles qui ont cette propriété non seulement de fouiller au plus profond l'espace nocturne mais de l'animer, d'y faire entrer le temps, l'évolution : spectacle dont notre prisonnier ne va plus se lasser. Par ailleurs sa vie est rythmée par les visites régulières d'une geôlière-cuisinière bien en chair mais intraitable, puis de sa soeur jumelle tout à fait compréhensive, amoureusement compréhensive, elle. Ce presque conte écrit avec raffinement est une merveille d'humour, de drôlerie légère. Les fantasmes révolutionnaires s'y défont avec grâce tandis que les ébats amoureux et les découvertes de science amusante servent à merveille de sentimentales supercheries.
Ici moins qu'ailleurs est le troisième volet de la trilogie que l'auteur consacre à ses dernières décennies de théâtre. Pauses (1981-1990) évoquait son départ du Studio-Théâtre de Vitry et ses années de direction du Théâtre national de Strasbourg. L'Amour d'Alceste (1991-2000) revenait sur son mandat d'administrateur général de la Comédie-Française et, à sa suite, sur la création de la Compagnie Pour Mémoire. Dans Ici moins qu'ailleurs (2001-2010) il porte un regard, encore forcément subjectif et transversal, sur le devenir du théâtre français et sur la société où désormais il s'inscrit. C'est l'Ici. Il tente aussi de donner sens à la part croissante de ses séjours et réalisations à l'étranger et à la découverte passionnée de ces autres scènes. C'est l'Ailleurs.
Rapide, rigoureux, imprévisible et implacable, irrésistiblement drôle et cependant inquiétant, moderne : ce livre contient la liste complète de ce qu'il faut faire en cas d'exil. Des conseils précis pour la fabrication d'objets simples à réaliser soi-même. Une rétrospective des choses qui ont eu lieu. Un manuel raisonné d'exercices poétiques. Un mémento des manières de table et des usages en général. Une réhabilitation de la mémoire cachée. Des descriptions de vies quotidiennes différentes. Une analyse des choses qui risquent de recommencer. Une technique d'observation des individus que vous connaissez. Un concentré des sensations individuelles et leur explication. Une méthode de dialogue à une voix. Un plan de visite de la nature.
En 1993, Charles Juliet a passé quatre mois à Saorge - un village des Alpes-Maritimes proche de l'Italie - dans un monastère devenu lieu de résidence pour artistes. Ces carnets sont le journal qu'il a tenu pendant ce séjour. Qu'il parle de Saorge, des rencontres qu'il y fait, des paysages qu'il découvre, qu'il égrène des souvenirs d'enfance, nous livre des impressions de lecture, évoque Catherine de Sienne ou Chet Baker, qu'il commente l'actualité, nous confie son émotion à la vue d'un beau visage... il demeure fidèle aux thèmes et préoccupations qui nourrissent les quatre précédents volumes de son Journal. Ici comme là, c'est une même attention aux êtres et à la vie, un même souci de les dire avec des mots justes et simples.
Igor est photographe. Il vit à Vevey. Il voyage. Au Mexique il rencontre Monica.
Après un orage, le réel prend à ses yeux une densité inconnue. Soudain le monde est irisé.
Comment vivre? Connaître de vrais accomplissements, être libre, et heureux? Et si l'on n'y parvient pas, qui en est responsable? Le travail, la famille, la province avec ses lenteurs, sa régularité et cette façon d'être comme loin de tout? Pris dans les contrats et les contraintes d'une vie familiale réglée, Pierre croit avoir trouvé en Laure la figure d'un amour idéal propre à résoudre toutes ses insatisfactions. Et Laure, dans son extrême jeunesse, répond avec élan à la passion de Pierre : ils connaissent ensemble des après-midi secrètes, des moments charnels très forts et les joies équivoques de la clandestinité. Ont-ils, enfin, rencontré la «vraie vie»? Ou sont-ils condamnés à ne connaître toujours, en fin de compte, qu'un simulacre de vie, une vie fantôme?
Antonia va-t-elle réussir à diminuer ses triglys? à terminer le poème débile demandé par Madame? Jardine est-elle vraiment lesbienne? Que se passe-t-il de pas mystérieux dans les caves? Que signifie «C'est la gonflette/Tu mords, ça se dégonfle»? Luc va-t-il préférer la fumette au Coca? Combien de pavés jetés du haut du pont parviendront à défoncer le toit des voitures sachant que les voitures font des zig-zags? Isabelle et Antonia vont-elles trier des bouchons de bouteilles en plastique tout l'été? Mais qui est Sviadapok-Mursky? Entre éruptions de l'Etna et anesthésies totales, Antonia, Isabelle, Luc et Boulimi vivent leurs 12, 13, 14 et 8 ans. Antonia Bellivetti est un roman pour la jeunesse destiné aux adultes.
Le «syndrome de Gramsci» serait la première manifestation d'un cancer de la langue dissimulé sous la dénomination anodine de «trou de mémoire». Mais un cancer implosif : «... une plaie dévorante, une plaie dans laquelle tout le langage peu à peu se précipite, une plaie blanche, qui absorbe toute la substance que d'ordinaire la langue transforme et réhabilite sans arrêt...» Ce que met en jeu ce roman, ce qu'il interroge sans répit, est au coeur même de la langue, au coeur même de la vie, à l'endroit précis mais toujours insaisissable, mouvant, où le corps, le langage, la pensée réalisent dans leur coïncidence la conscience de soi et du monde et où celle-ci, aussi bien, se défait.
Le personnage erre dans le marché. Ou plutôt, dans deux marchés. Et se transforme lui-même en texte - en lisant. Il s'agit ici de l'expérience physique de la lecture, et des modes de citation possibles : comment inviter les phrases d'un autre dans son propre texte, ou comment écrire après la lecture d'un livre.
Il fallait rassembler cette partie de l'oeuvre de Jean Rolin afin de la rendre visible, afin que l'on voie un peu mieux, un peu plus complètement, le talent de ce grand reporter écrivain et, tout ensemble, la diversité de ses centres d'intérêt, la manière si personnelle qu'il a de rendre passionnants tous les sujets qu'il aborde, son génie descriptif et topographique. On lira donc plus de 1000 pages d'une véritable encyclopédie de la curiosité et du regard sur autrui, qu'il soit humain ou animal, sur le monde. Il n'est guère de région de la terre qui n'ait reçu ce voyageur infatigable et son regard si lucide, si peu complaisant, tellement plein d'humour et cependant d'une empathie et d'un générosité jamais prises en défaut. Et puis il y a cette phrase si caractéristique, qui dans son impeccable construction, la grande phrase française, arrive à accueillir ensemble de l'espace, des espace, du temps, des temps, de l'autre et des autres, et tout ce qui fait la réalité si riche et si complexe du monde.
Quand on est balancés dans le dehors du monde, oubliés par les bruits de la ville, quand, d'une façon ou d'une autre, on est morts. Alors, comme le dit Dante, on est là où le soleil se tait. Des hommes, en prison. Deux clochards, habitants du froid et de l'ombre, qui ne demandent rien. Une jeune femme un peu folle, qui piétine sa vie avec grâce parce que, dit-elle : 'Moi, tu sais, en dehors de l'amour...' Une princesse oubliée dans la légende d'un saint, qui a peur, parce qu'elle croit que les hommes vont 'laisser faire la déchirure de son corps et de l'été'. Les malentendus entre hommes et femmes, drôles, inusables, mortels. L'imbécillité d'une guerre, un chien qui mord parce qu'on l'a oublié. Et l'enfance immobile au bord de la nuit.
Dans la famille lambda vous demandez la mère, le père, le frère, la soeur. Chaque fois que vous attendez une carte, vous en obtenez au moins deux - Mammère première la naturelle, Mammère seconde l'adoptive, Mompère l'espion, le pianiste, le pasteur, un frère proliférant dans les fourmilières et la mousse, une soeur poupée ou cantatrice, etc. Dans le cinéma des familles, chacun porte sur l'écran une ombre démesurée où l'autre peut se fondre. Leur rencontre a lancé des scénarios de crimes, de sacrifices, de fugues, de retrouvailles. Jim fut-il condamné à tort? Quel âge avait Tom? Rose a-t-elle survécu? Alice est-elle idiote? Où va la rivière? Suis-je un monstre? Avec ça, les témoins s'inventent des dialectes, car ce sont des enfants. Et là où une autofiction aurait cru rassembler les membres, le cinéma de toutes les familles démultiplie le foyer, le disperse jusqu'à la lune, jusqu'aux étoiles. C'est Alice qui chante cela. Le film a déjà commencé.