Elsa Triolet a dit, très joliment, dans un de ses romans : « La démarche d'une vie, le « de fil en aiguille », qui est la biographie à proprement parler, dépend aussi de comment l'homme enfile cette aiguille. ». Et comment l'homme enfile son aiguille, cela dépend - sans doute - de son caractère, mais aussi des circonstances. Des rencontres qu'on fait, et de celles qu'on ne fait pas. Des gens qui débouchent dans votre vie, et des gens qui vous manquent, parce que vous les avez perdus, ou que vous les attendez encore... Et le fil, alors, fait un noeud. Les quatre nouvelles rassemblées dans ce recueil, sont faites de ces noeuds. Ce soldat d'Italie, cette précieuse Anne-Marie, cette jeune institutrice chrétienne, et même ce reporter un peu ivre - que l'auteur met en scène avec une lucidité empreinte de tendresse - leur vie ne sera, sans doute, plus tout à fait, après, ce qu'elle était avant. Comme sur une photo d'amateur, quelque chose dans leur histoire a « bougé ». C'est que le monde où ils vivent, l'histoire elle-même, bougent terriblement - et que cela fait des ondes dans les vies curieusement dites « privées ». La suite dépendra d'autres rencontres - avec leurs incertitudes encore, leurs dialogues de sourds, leurs occasions manquées - du moins tant qu'on laissera au hasard le soin de les organiser...
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
Il s'agit moins de nouvelles ici, que de fausses nouvelles. Autrement ce serait trop beau ! Chacune, en effet, peut bien essayer de conter une histoire, avec un commencement, une progression et une fin, commencement et fin, d'apparente ou inavouée façon, ne font jamais qu'ouvrir et suspendre une unique interrogation. Qui est de questionner si oui ou non il a valu cette peine de vivre les trente ans dont ces textes sont le reflet. Un philosophe a dit fort justement des premières de ces pages, qu'on y découvrait : « la critique du merveilleux dans la bouche de l'émerveillé ». Au vrai, comme dans toute l'oeuvre de Jean Marcenac se combattent ici les charmes atroces du présent et les pouvoirs obscurs de l'avenir : l'impitoyable constat, l'invincible espérance. Car l'homme a pris la parole non pour affirmer dérisoirement qu'il est, mais pour faire signe qu'il peut être. En un mot : pour en appeler.
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Pendant cet hiver trouble, à Paris, Fred Hopner, un metteur en scène, beau comme Curd Jurgens, qui aime les femmes autant que celles-ci l'aiment, qui a un caractère impossible et une étonnante femme frêle comme une herbe et dure comme l'acier, vient de terminer un film (interdit par la censure) et pense déjà au suivant. Il s'intéresse aux choucas (des oiseaux étonnants, aux moeurs « sociales » développées), aux répétitions d'une figuriste sur glace, à une infirmière et à la guerre. Il fait une « crise ». Ou peut-être est-ce le monde qui est en crise ? Le thème de la « crise » est familier à Jean Kanapa. Cette crise-là débouche sur une « tragédie optimiste » à l'échelle de Fred Hopner - un de ces fanatiques qui n'en ont pas l'air et dont le monde a besoin. Si on lui disait que ce roman est à clefs, l'auteur répondrait que ce n'est pas exact puisque Fred Hopner n'est pas seulement tel metteur en scène connu, mais aussi tel autre ; que d'ailleurs l'attentat dont il est victime, c'est en réalité un écrivain qui en fut l'objet cet hiver-là ; que le sort qui frappe Hopner fut en vérité celui d'un metteur en scène qui n'était pas français, mais étranger... et que c'est donc à l'évidence un roman d'imagination. Un roman qui a l'allure d'un scénario, son rythme rapide, son découpage, son style de dialogues - et en même temps celle d'une partition, où s'entrecroisent les « thèmes secondaires ». - Tout le contraire, en somme, du « nouveau roman » (pour lequel, d'ailleurs, l'auteur affirme avoir le plus grand respect). On oubliait : il y a aussi une dame qui joue de la harpe. C'est très important. L'art est très important. La guerre aussi.
Trois hommes liés par une solide amitié : Ramon, l'Espagnol, le journaliste Bruno et le jeune poète lozérien Denis. Ils parlent, aiment, combattent, perçoivent les événements à travers une confrontation constante de leurs optiques et de leurs sentiments. Chacun d'eux est profondément lié à sa terre, à sa patrie, mais à chacun d'eux se pose le problème particulier d'une génération qui se cherche au milieu des angoissantes questions de ces dernières années. On retrouvera dans ce nouveau roman le talent vigoureux et coloré de l'auteur de « La Montée du désert » et de la « Cocarde d'or », sa finesse de peinture psychologique, son grand pouvoir d'émotion.
Paralysé, pétrifié, incapable de soulever ses paupières, il peut encore écouter. Autour de lui, la famille - cette famille abandonnée depuis neuf ans, et qui l'a recueilli, moribond, parce que c'était convenable. C'est à partir de cet événement que « L'exploration » commence. Bourdonnement des voix, gestes devinés, souvenirs... Long cheminement à travers la pénombre où grouillent des êtres cruellement réels. À Jean Correns, petit montagnard, le monde était bienveillante magie. 18 ans en 1939 : un coup dur pour l'optimisme. Étudiant pauvre, gavé de morale, de préceptes, de lumière intérieure, le voici soudain face aux Autres, saisi à la gorge par l'Histoire, réduit dans une pièce sans fenêtre à l'état de chair à battre. Puis, pendant quelques mois, la salubre camaraderie d'un maquis. Viennent ensuite, avec la sécurité retrouvée, la découverte d'un clan social qui tolère l'intrus comme la peau tolère une écharde, ennui, regrets, nostalgie d'une existence mieux accordée aux rêves d'autrefois. Au dénouement la boucle des souvenirs est bouclée pour Jean qui a retrouvé sa jeunesse, mais sans illusions.
Un ancien docker, chassé de Paris par le chômage, rentre dans sa ville natale : un port, d'où il espère s'embarquer afin de mener au loin une nouvelle vie. Mais pour mettre son projet à exécution, il lui faut gagner quelque argent. Il n'y réussit pas. Les circonstances l'éloignent des comptages et de sa famille. Il reste seul. Alors commence pour lui un glissement rapide. Il devient clochard, rate son suicide... Et puis, l'espoir luit à nouveau dans les regards fraternels retrouvés. Ce roman, très exactement situé et daté (Dunkerque, 1931) ne décrit pas seulement, avec une force impressionnante, l'atmosphère et les drames d'un port ; il évoque tout un côté tragique de la condition prolétarienne, passé d'habitude sous silence. L'histoire d'un individu acquiert ici, par les problèmes qu'elle soulève, l'ampleur et la portée d'un roman social. Le lecteur n'oubliera plus certaines scènes, ni la lutte inégale du personnage principal contre un monde qui l'écrase et qu'il met en accusation. Une impression tonique se dégage pourtant de ce livre âpre et rude, non dénué d'humour et de poésie car le rayon qui perce les ténèbres, c'est l'amour de la vie, c'est la foi en l'homme.
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Dans le prestigieux décor de Caprera, en Sardaigne. Un jeune couple en vacances avec des amis, dans un village club. Est-ce un couple comme les autres ? Georges, pour les besoins d'une enquête « prospective », se livre à l'étude scrupuleuse de cette micro-société pendant deux ans. Il veut aller au-delà des questionnaires de son agence, au-delà des programmes traités par les ordinateurs. Il veut comprendre le drame qui se noue dans la frénésie d'une société de consommation traversée par les ondes-choc de la publicité. En Sardaigne, Georges rencontre Olga. Elle l'aide à se trouver lui-même. L'aidera-t-elle à réunir tous les fils de cette histoire ? Ce roman renouvelle complètement l'art de Maurice Bruzeau. Depuis La montée du désert jusqu'à La cocarde d'or, les personnages étaient montrés à travers les prismes des paysages. Avec La rue du Temple un virage s'amorçait, qui prend dans Les chemins de Caprera toute sa signification : ici c'est le couple et son destin qui sont au coeur du livre.
Ce roman « médiéval » de cape et d'épée, se déroule dans le plat pays du Beauvaisis, au coeur de la grande révolte paysanne de 1358. Dans cette atmosphère de cruauté, de viols et de violence, un amour très pur fleurit dans la forêt entre Marganne et le « boquillon ». Solidement documenté et charpenté, écrit dans une langue alerte et drue, ce livre entraîne le lecteur, entre Chantilly et Senlis, dans ce drame historique où la misère paysanne, les huttes brûlées, les serfs suppliciés, n'arrêtent pas l'héroïque esprit de révolte des « Jacques ».
Ce livre n'est aucunement un ouvrage didactique sur les jeunes, mais seulement un ensemble d'observations et de réflexions nourries de relations vécues, de documents et de récits authentiques. Un fait est au centre du livre : l'enfant vietnamien ne s'est pas contenté de survivre, il a vécu, grandi, il s'est développé, même aux jours les plus sombres des bombardements ; dans l'entrelacs des problèmes qu'il faut résoudre malgré la guerre : problème de démographie galopante difficile à enrayer, problème de logement particulièrement ardu dans un pays ravagé par les bombes, problème de santé, d'hygiène, d'enseignement et de culture. Ce livre ne donne pas un tableau exhaustif de la jeunesse au Vietnam mais rassemble seulement les feuillets qu'il a été donné à l'auteur de tourner durant près de deux années sur la vie quotidienne des jeunes, dans ce pays.
Ce livre se divise en trois parties. La première est consacrée à la vie étrange et tourmentée d'Alfred Nobel, chimiste de talent, inventeur de la dynamite et autres explosifs, fabricant d'armes et financier international, l'un des hommes les plus riches de son temps. Mais aussi, selon sa propre opinion, l'un des hommes les plus malheureux au monde. Car il eût désiré être poète et n'avait qu'un médiocre talent. Car il eût voulu être aimé et on ne l'aima point. Car il inventa « l'équilibre de la terreur » au nom de la Paix éternelle, et ceux auxquels il vendait des armes et des explosifs n'avaient que la hâte de s'en servir les uns contre les autres. Alors il fit un testament en fondant un prix de littérature, puis un prix de la paix, et trois prix scientifiques : physique, chimie, physiologie. Cette seconde partie, intitulée Le testament Nobel, décrit les péripéties curieuses qui précédèrent la difficile mise au point de la Fondation Nobel gérante de la considérable fortune du donateur, et explique le mécanisme de la distribution des prix. Une troisième partie comprend la liste exhaustive des lauréats du Prix Nobel depuis sa fondation, qui coïncide avec le début de ce siècle. Elle résume leurs principaux travaux et fait état de leurs mérites, en s'éloignant résolument des « images d'Épinal » conventionnelles. Un index facilite la recherche.
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Même dans la vie d'un farfelu, l'intrusion de l'aventure ne va pas sans complications. Pour une aile de voiture, jouer sa vie semble insensé ! Et cependant François, menacé de mort à la suite d'un curieux accident d'auto, se trouve amené, avec Serge et des amies, à s'improviser détective contre une bande de tueurs dont l'arrestation est mise à prix : cinq millions ! Nos héros trouvent que la somme mérite le risque d'être happés dans l'engrenage...
Martine élégante, Martine de vingt ans, à travers les rues de Marseille la nuit. Elle est assaillie par les obsédantes réalités : course au logement, contrainte de l'appartement où elle vit avec son mari, ses beaux-parents, ses belles-soeurs, oppression du Supermarché où elle travaille, écrasante présence de la cité, désagrégation du couple. Pour échapper au vertige, elle se laisse glisser dans l'aventure dérisoire d'une nuit déréglée. C'est cette nuit dans une Marseille d'ombres et de lumières, une Marseille lourde de mystères, que raconte André Remacle dans ce roman à la construction très originale, roman plongé dans l'irréel quotidien de notre époque et dont la fin insolite invite le lecteur à participer au dénouement. L'auteur du Temps de vivre (Prix Populiste 1966) dont Bernard Paul vient de tirer un film avec Marina Vlady pour principale interprète, affirme une incontestable maîtrise.
Un homme, un juif, dont la femme et les enfants sont morts dans les camps nazis, poursuit à travers le monde, pendant 18 ans, le médecin qui dirigeait les « expériences biologiques » qui ont détruit sa famille. Dans un village perdu, quelque part en Amérique du Sud, c'est enfin la confrontation dramatique entre les deux hommes. L'Allemand ne fuit pas la responsabilité de ses crimes. Il tente de démêler le pourquoi de ses actes pour lesquels ni pardon ni rachat ne sont possibles. C'est un affrontement passionné entre le bourreau qui s'efforce de devenir un Homme et cherche désespérément un chemin qu'il ne peut même imaginer, et la victime qui se refuse à l'aider. Partant de faits authentiques, dont certains ont été vécus par l'auteur, ce roman bouleversant, qui se lit d'une traite, et sur quelques pages duquel on ne peut pas ne pas revenir et réfléchir, renferme un contenu si explosif et si sobre à la fois que l'atmosphère qui s'en dégage est d'une qualité dramatique rarement égalée.
Premier livre d'un auteur de soixante-quatre ans : un pittoresque personnage que de multiples tribulations ont amené après de solides études, au travers des métiers les plus divers destinés à lui assurer la subsistance, à constituer une considérable documentation sur les sujets les plus variés ; la lecture étant l'essentiel de son pain quotidien depuis plus de cinquante ans. Actuellement il est employé chez un pompiste, fait sa semaine en deux jours et s'adonne au travail intellectuel les cinq autres jours de la semaine ! Doué d'un sens critique aigu et malicieux, il a brossé dans « Le Moujik et la tendre fille » une très savoureuse histoire où la jolie Natacha et son ami Feodor, soutenus par l'amour... et la bénédiction du pope, seront victorieux du mari, le vieux Loubianov dont « l'âme est aussi noire que la suie du fourneau ». Ruses, truculence, ironique philosophie s'entremêlent dans ce conte de vieille Russie, avec une saveur et un humour dus à la plume espiègle et à l'esprit épicurien de René Tonnerre qui met en pratique la formule de Kipling « le sarcasme est par excellence l'arme de l'homme cultivé ».
Un homme est mort entre le village et le château de Grailles (Basses-Alpes), dans le Bois du Silence. La veille, il s'était pris de querelle avec de jeunes campeurs. Deux jours plus tard, au même endroit un autre cadavre est découvert. Qui a tué ? Le détective anglais Leslie Roy, en vacances dans la région, trouve une explication qui satisfait la police. A-t-il dit toute la vérité ?
Roman d'amour ? Roman du bonheur impossible ? Chronique d'une époque ? Un livre difficile à définir, où s'entremêlent divers thèmes, dominé surtout par l'amour et la mort. Parmi les deux cents familles d'une Égypte libertine et famélique, émerge la figure aérienne d'une enfant de douze ans. Karenne. N'ayant pu réaliser ses rêves, elle choisira le métier de journaliste et mènera à Paris, dans les milieux de la presse et des arts une vie indépendante. Autour d'elle évoluent de nombreux personnages de cette génération que Gertrude Stein a appelée « la génération perdue », désarmée devant la montée de l'hitlérisme, déchirée par les premiers procès de Moscou, dans un monde d'émigrés et d'apatrides, vivant au jour le jour, dans un tourbillon d'événements qui s'entrecroisent en filigrane à l'arrière-plan. Karenne laissera tomber l'anneau de feu, symbole de la condition humaine ou du renouveau de l'homme ? Le rattrapera-t-elle ? D'autres sauront-ils le reprendre pour le lancer à leur tour ?
Moisson d'observations récemment recueillies dans les Hautes Terres d'Algérie, dans les Aurès où a jailli en 1954, la flamme de la Résistance, ce livre parle des femmes dans les mechtas (villages). Femmes anonymes en lutte contre une misère telle qu'elle effrite souvent le plus sûr des courages, et qui, pourtant conservent intacte leur générosité. Femmes qui ont lutté aux côtés des hommes et qui, tenacement, essaient de triompher des préjugés qui s'attachaient à la hiérarchie et à l'autoritarisme de la famille.
Février 1943 à Clermont-Ferrand. Échappé du camp de concentration de Treblinka, un capitaine soviétique se retrouve au plein coeur de l'hiver, seul, dans une ville inconnue, au milieu d'une population dont il ne parle pas la langue. Sa seule fortune : un luger et neuf balles. Comment déjouera-t-il, avec l'aide de la Résistance Française, la chasse à l'homme impitoyable qu'organise contre lui le Baron de fer, chef de la Gestapo, le colonel Hans Von Schultz ?
Françoise Corrèze a séjourné tout le mois de décembre 1979 au Cambodge. De Phnom Penh, des voyages qu'elle a faits sur les camions, distribuant des médicaments à travers le pays, en compagnie de pasteurs, de prêtres et religieuses catholiques, de membres du Comité Médical Français, de l'U.N.I.C.E.F., du C.I.C.R., elle dit simplement ce qu'elle a vu du martyre du peuple khmer, et aussi de son réveil. Elle le dit avec d'autant plus d'émotion qu'elle aime ce pays où, maître-assistante à la Faculté des Lettres de Phnom Penh, elle a vécu de 1965 à 1970. Et notamment ce village d'O'Russei (à 80 km de Phnom Penh, dans la forêt claire), « son » village où pendant trois ans elle a partagé la vie des Chams non-orthodoxes qui devinrent ses amis, et dont elle a fait le sujet de sa thèse d'ethnologie, village massacré par Pol Pot mais où la tradition a survécu.