"Parti à la recherche des origines de la sociologie moderne, j'ai abouti, en fait, à une galerie de portraits intellectuels... Je me suis efforcé de saisir l'essentiel de la pensée de ces sociologues, sans méconnaître ce que nous considérons comme l'intention spécifique de la sociologie, sans oublier non plus que cette intention était inséparable, au siècle dernier, des conceptions philosophiques et d'un idéal politique." Raymond Aron.
Voici rassemblés les deux premiers cours prononcés au Collège de France par Raymond Aron de 1970 à 1972. Ils ne marquent pas seulement l'entrée de l'auteur dans cette prestigieuse institution mais aussi une étape dans sa pensée. Comment et pourquoi passer d'une raison critique de l'histoire à une critique de la pensée sociologique ? Il ne s'agit pas de défendre une discipline académique, mais de définir la nécessité pour le philosophe de prendre acte du fait que la société constitue le caractère principal de notre époque. Il faut donc embrasser l'ensemble de l'existence des individus en tant qu'êtres sociaux, définir une méthode de connaissance de la société, tout en pensant celle-ci dans ses évolutions. Cela implique de porter sur les événements contemporains un jugement critique. Raymond Aron s'inscrit ici dans la suite des grands penseurs avec lesquels il a dialogué toute sa vie?: Karl Marx, Max Weber, Auguste Comte, mais aussi les économistes et les sociologues de notre époque. Ce qui était nécessaire en 1970 l'est plus encore aujourd'hui. Le regard de Raymond Aron et la méthode qu'il n'a cessé de mettre à l'épreuve des faits demeurent essentiels si nous voulons analyser les transformations du monde dans lequel nous vivons et plus encore tenter d'influer son évolution. Raymond Aron (1905-1983) a enseigné au Collège de France de 1970 à 1978.
Paru en 1955, L'Opium des intellectuels est une condamnation sans appel de la crédulité teintée de mauvaise foi et du dogmatisme dans lesquels se drape l'intelligentsia française de l'époque.Raymond Aron interroge avec la plus süre probité intellectuelle l'évolution des mots "gauche", "révolution" et "prolétariat", ces mots qui appartiennent au mythe qu'il désacralise.Car, questionne Raymond Aron, comment accpeter l'attitude des intellectuels devenus impitoyables face aux défaillances des démocraties dites "bourgeoises", et pourtant si complaisants pour les crimes perpétrés par les démocraties "populaires", comment ne pas saisir l'absurdité des amalgames politico-idéologiques qui ne font qu'aliéner un peu plus des intellectuels en quête de religion, idolâtrant l'Histoire comme on idolâtre un dieu ?En rupture avec la famille dont il est originaire, Raymond Aron ne se livre pas pour autant à un règlement de compte stérile. Il propose une réflexion dépassionnée, un combat sans haine, invitant à le suivre "tous ceux qui refusent dans les luttes du Forum, le secret de la destination humaine".
Le général de Gaulle est le personnage qu'Aron évoque le plus régulièrement dans ses mémoires.
De leur rencontre en 1940 à Londres, où les avait conduits leur commun refus de la défaite devant le totalitarisme nazi, jusqu'à la mort de de Gaulle, le destin des deux hommes est lié.
Cet ouvrage regroupe l'essentiel des articles écrits par le philosophe sur l'homme politique dans les différents journaux et revues auxquels il a collaboré : depuis la Résistance et la Libération, jusqu'au départ de de Gaulle en 1969, en passant par la sortie du bourbier de la guerre d'Algérie et la rédaction de la Constitution.
Aron approuve souvent l'action du général, notamment sur la Constitution, l'engagement contre le totalitarisme stalinien, la construction d'une défense nucléaire française indépendante ou la réforme de l'économie française.
Mais le respect, voire l'admiration, de l'intellectuel pour le grand homme d'État n'éteint jamais ni le sens critique ni la liberté de l'esprit ; et Aron, quand il l'estime nécessaire, sait prendre ses distances avec de Gaulle : sur son anti-américanisme
inutile, ses réticences à l'égard de la construction européenne, ou, de manière plus douloureuse en 1967, sa rupture avec Israël.
La préface inédite de Jean-Claude Casanova restitue l'horizon politique et intellectuel dans lequel ces textes furent écrits, en même temps qu'elle jette un éclairage personnel sur ce que fut la relation complexe entre Aron et de Gaulle.
La vérité scientifique se détache de la conscience qui l'a élaborée puisque, à un certain degré d'approximation, elle vaut éternellement. En va-t-il de même pour la reconstitution historique ? La science historique, comme les sciences de la nature, se développe-t-elle selon un rythme d'accumulation et de progrès ou, au contraire, chaque société récrit-elle son histoire parce qu'elle se choisit et recrée son passé ?
Cette analyse devenue classique de l'historicité conduit Raymond Aron à une philosophie historique qui, s'opposant aux synthèses spéculatives en même temps qu'au positivisme, est aussi une philosophie de l'histoire. "La philosophie de l'histoire, écrit-il, est une partie essentielle de la philosophie, elle en est à la fois l'introduction et la conclusion. Introduction, puisqu'il faut comprendre l'histoire pour penser la destinée humaine, d'un temps et de toujours, conclusion, puisqu'il n'y a pas de compréhension du devenir humain sans une doctrine de l'homme. Double caractère qui serait contradictoire si l'on se représentait la philosophie selon le schéma des théories déductives, mais qui devient intelligible dès qu'on la rattache à la dialectique de la vie et de l'esprit, qui s'achève dans la conscience de soi de l'être qui se situe dans l'histoire et se mesure à la vérité."
Ce livre est issu de conférences données en avril 1963 à l'université de Californie, à Berkeley. Comme ces conférences étaient organisées par un Comité Jefferson, je choisis tout naturellement pour thème la liberté et me proposai de reprendre la vieille controverse sur les libertés formelles et les libertés réelles. Que vaut l'idée, popularisée par les marxistes, selon laquelle les libertés politiques, personnelles, iintellectuelles, n'ont aucune portée effective, seule une révolution touchant à la propriété des moyens de production étant de nature à garantir une liberté réelle ?
J'ai tâché de réondre à cette interrogation par trois sortes d'analyse. Dans un premier chapitre, je me suis reporté à l'origine du débat et j'ai confronté les doctrines d'Alexis de Tocqueville et de Karl Marx entre elles et avec le présent. Là où les libertés formelles ont été supprimées, en Europe de l'Est par exemple, elles apparaissent à ceux qui en sont privés étrangement réelles. Il est vrai, simultanément, que nous sommes tous marxistes en un sens : toutes les sociétés modernes ont l'ambition de construire l'ordre conforme à leur idéal et refusent de se soumettre à aucune fatalité.
Dans un deuxième chapitre, j'examine l'actuelle synthèse démocratique et libérale -libertés formelles, lois sociales, planification souple- et les critiques auxquelles elle est en butte, critique des purs libéraux d'un côté, critiques de socialistes insatisfaits de l'autre.
Enfin, dans un troisième chapitre, je m'interroge sur la compatibilité entre les nécessités de la civilisation technique et la liberté politique au sens strict du terme, c'est-à-dire la participation des citoyens et des élus aux affaires publiques.
Ce petit livre appartient, comme les précédents, à l'enquête que je poursuis, depuis de longues années, sur la civilisation moderne. J'emprunte aux penseurs du passé les questions qui demeurent actuelles parce qu'elles sont permanentes, mais je cherche les réponses dans l'observation du réel.
R.A.
Ce recueil rassemble dix articles et lettres de jeunesse de Raymond Aron, jamais ou rarement réédités, rédigés à un moment où il pressent l'arrivée de l'âge des tyrannies recouvrant l'Europe. Universitaire à Cologne en 1930 puis à Berlin entre 1931 et 1933 - où il assiste à des autodafés -, il perçoit avec une grande acuité la montée du totalitarisme nazi.
De ces textes, parmi lesquels figure la célèbre conférence « États démocratiques et États totalitaires », le lecteur tire l'impression de revivre la révolution nationale en Allemagne, le basculement dans le totalitarisme des démocraties occidentales et la naissance d'une pensée résistante. En même temps, il se donne les moyens de comprendre ce passé tragique aux échos contemporains. À l'heure où l'Europe voit ressurgir ses vieux démons nationalistes et antidémocratiques, relire le jeune Raymond Aron est salutaire et éclairant.
Avant d'écrire « Le temps du soupçon », commentaire de la dernière conférence de presse du Président de la République, j'ai longuement hésité. Si certaines voix s'étaient élevées, si François Mauriac ou André Malraux avaient répondu au général de Gaulle ce qu'ils auraient répondu à tout autre homme d'Etat tenant de pareils propos, je serais resté au dehors d'un débat dans lequel je ne puis m'engager en toute sérénité. Aucun des écrivains, honneur des lettres françaises, n'a parlé. Je me suis donc résolu ou résigné à plaider contre un réquisitoire d'autant plus insidieux qu'il demeure camouflé. J'ai pensé que ce témoignage ne prendrait sa pleine signification qu'à la condition d'y joindre les articles publiés pendant la crise du printemps 1967 et deux études sur Israël et les Juifs, écrites en 1960 et 1962, à l'époque où l'alliance franco-israélienne assurait aux Français d'origine juive une sécurité morale dont les privent, aujourd'hui, les péripéties de l'Histoire.
Dissuasion, subversion, persuasion. Ce sont les trois concepts qui désignent les composantes principales des diplomaties-stratégies. Au terme de son enquête, Raymond Aron tente de définir la morale de l'action diplomatique, la stratégie qui donne la meilleure chance de sauver la paix sans sacrifier la liberté. Enfin en un exercice de pensée utopique, il cherche les conditions de paix par la loi.En 1962, lorsque cet ouvrage paraît, ces conditions ne sont pas réalisées et la paix se résume à l'absence ou à la limitation des guerres. L'analyse de Raymond Aron prend place en pleine guerre froide et explicite les rapports de force qu'impose l'arme nucléaire détenue par quelques puissances militaires.C'est aussi une réflexion sur le devenir de l'humanité.
Mai 68 n'aura-t-il été qu'un psychodrame bavard, selon la formule cruelle et lapidaire de Raymond Aron ?Dans La Révolution introuvable, l'observateur perspicace de l'actualité politique montre que par-delà le brouhaha des apparences, les risques étaient faibles que Mai 68 ne constitue un danger sérieux pour les institutions de la Ve République. Les deux grandes forces qui structuraient alors la vie politique française, le Parti communiste et le mouvement gaulliste, n'y avaient aucun intérêt.Comme l'analyse Philippe Raynaud dans sa préface inédite, Raymond Aron, en héritier de la grande tradition sociologique, fut également attentif à la crise essentielle de nos sociétés modernes dont Mai 68 fut un des premiers symptômes : la tension contradictoire entre la passion de l'égalité, la demande de reconnaissance des individus, et l'interdépendance croissante de chacun à l'égard de tous.
Devant le silence comme réponse à leurs appels, certains tissent une trame, créent une parole, adoptent une attitude. Dans l'errance, s'expérimente un chemin initiatique où la frustration du désir les mène à la souffrance et à l'extase. Figure de la jouissance, le terme générique qui s'applique à leurs comportements est celui de "mystique". Lacan dans ses séminaires fait références à certains d'entre eux. Il nous propose une articulation liée au processus psychanalytique.
Le désir traverse tous les sujets, il est l'élément qui fonde l'existence de la pulsion de vie. Sa disparition signifie l'approche d'un état de déréliction et d'absence au monde. Les auteurs choisis ici (Mishima, Joyce, Beckett) marquent dans leur écriture ce débat intérieur ainsi que la recherche d'arriver à exprimer d'une façon incandescente comment atteindre une forme de la jouissance sans s'y perdre. Ce qui n'est pas toujours le cas et alors s'entrouvre l'abîme.
"Ce cours n'est et ne veut être qu'une introduction, objective je pense, à l'étude d'un problème chargé de passions politiques. Il s'adresse non au spécialiste mais à l'étudiant et à l'honnête homme. Il n'impose pas de réponses dogmatiques, il dissipe les mythes : celui d'une évolution nécessaire du capitalisme au soviétisme, celui d'une convergence fatale des deux types de société industrielle, celui du caractère homologue des diverses phases de la croissance, quelle que soit l'époque et quel que soit le régime politique."
Raymond Aron.
Raymond Aron est issu d'une famille de juifs lorrains assimilés et profondément patriotes. Comme Durkheim et Bergson, il est alors représentant de la culture à visée universelle agnostique, de la Troisième République. C'est en 1933, en Allemagne, qu'il rencontrera le problème juif en même temps que le tragique de l'histoire et la pensée philosophie allemande. Depuis lors, sa propre philosophie ne pouvait lui permettre d'écarter de sa réflexion sur l'histoire l'aventure du peuple juif. La brochure De Gaulle, Israël et les juifs, publiée en 1968, rééditée ici avec beaucoup de textes peu ou pas connus, s'inscrit dans l'interrogation et l'inquiétude de toute une vie. Dans ses conférences, ses entretiens et ses articles, Raymond Aron n'a cessé de s'interroger sur l'histoire et l'avenir incertain de l'État d'Israël et sur les liens qu'un citoyen français peut garder avec ce pays singulier.
Le présent ouvrage est le texte des leçons professées par Raymond Aron à l'École Nationale d'Administration en 1952. Il ne constitue pas un exposé de faits ou de doctrines mais une analyse conceptuelle de la démocratie moderne dans ses deux versions antithétiques : institutions représentatives des grands pays occidentaux d'une part, démocraties populaires de l'autre. Il s'attache à définir, au-delà de leurs idéaux proclamés (égalité, liberté, souveraineté populaire, avènement d'une société sans classe), leur réalité essentielle, leur logique interne, en un mot leur principe. La conquête du pouvoir résulte pour les premières d'une compétition pacifique ; son exercice fait appel à l'art du compromis : l'expression des mécontentements catégoriels nés d'un état social naturellement imparfait peut s'y donner libre cours. Dans les secondes les gouvernants tirent leur légitimité d'un processus révolutionnaire mené au nom d'une doctrine millénariste qui justifie l'élimination des opposants et l'emprise d'un parti unique sur l'ensemble de la vie sociale. Comment, à partir de ces prémisses, discerner leur évolution comme leur devenir ? Telle est, dans la lignée de la pensée politique classique, la question centrale de ce livre où Raymond Aron enseigne avec une rigueur méthodique exemplaire l'art de soumettre à la raison les passions politiques de notre temps.
De 1947 à 1977, par ses articles, Raymond Aron informa et fit réfléchir les lecteurs du Figaro. Il le fit à propos de la politique intérieure française mais aussi et surtout à propos des questions internationales comprises au sens large, comme il les entendait lui-même. C'est-à-dire en incluant la politique étrangère de notre pays, les rapports entre l'Est et l'Ouest, le mouvement communiste, la reconstruction et l'unification de l'Europe, le rôle central dans l'équilibre mondial de l'Amérique et de l'OTAN, l'évolution de l'économie et des échanges. Ainsi, pendant trente ans, il publia plus de 1 400 articles sur ces sujets. L'ensemble offre le tableau le plus complet, le plus lucide et le plus profond du monde de l'après-guerre, tel qu'il s'achève en 1990.
Chaque article est accompagné de notes destinées à éclairer, pour le lecteur d'aujourd'hui, les allusions à l'actualité et les polémiques de l'époque.
Ce recueil témoigne de l'activité de commentateur de « l'histoire se faisant » que fut Aron. Il regroupe les articles de politique intérieure parus de 1944 à 1977 dans les quotidiens Combat et Le Figaro, ainsi que dans divers hebdomadaires comme Terre des Hommes, Le Figaro Littéraire, ou revues généralistes, notamment Les Temps Modernes, Liberté de l'Esprit, Réalités, Preuves, Contrepoint. Les articles d'actualité publiés ici complètent les recueils Chroniques de guerre, La France Libre, 1940-1945 (Gallimard, 1990), Les articles de politique internationale dans Le Figaro de 1947 à 1977 (Éditions de Fallois, 1990-1997) et De Giscard à Mitterrand 1977-1983 (Éditions de Fallois, 2005).
De 1947 à 1977, par ses articles, Raymond Aron informa et fit réfléchir les lecteurs du Figaro. Il le fit à propos de la politique intérieure française mais aussi et surtout à propos des questions internationales comprises au sens large, comme il les entendait lui-même. C'est-à-dire en incluant la politique étrangère de notre pays, les rapports entre l'Est et l'Ouest, le mouvement communiste, la reconstruction et l'unification de l'Europe, le rôle central dans l'équilibre mondial de l'Amérique et de l'OTAN, l'évolution de l'économie et des échanges. Ainsi, pendant trente ans, il publia plus de 1 400 articles sur ces sujets. L'ensemble offre le tableau le plus complet, le plus lucide et le plus profond du monde de l'après-guerre, tel qu'il s'achève en 1990.
Chaque article est accompagné de notes destinées à éclairer, pour le lecteur d'aujourd'hui, les allusions à l'actualité et les polémiques de l'époque.
Journaliste autant que philosophe, et comme il l'a dit lui-même « spectateur engagé » de son époque, Raymond Aron a commenté chaque semaine, dans ses éditoriaux de L'Express, pendant six ans, de 1977 à 1983, les principaux événements politiques en France et dans le monde. La lecture de ces éditoriaux nous fait revivre ces années de crise et de bouleversements, en même temps qu'elle nous permet de voir à l'oeuvre un esprit remarquable par sa faculté d'analyse, la distance immédiate qu'il prend avec les événements pour éviter de céder aux passions, et l'attitude exemplaire d'un citoyen qui cherche à comprendre plus qu'à juger sans jamais sous-estimer le devoir de responsabilité.
De 1947 à 1977, par ses articles, Raymond Aron informa et fit réfléchir les lecteurs du Figaro. Il le fit à propos de la politique intérieure française mais aussi et surtout à propos des questions internationales comprises au sens large, comme il les entendait lui-même. C'est-à-dire en incluant la politique étrangère de notre pays, les rapports entre l'Est et l'Ouest, le mouvement communiste, la reconstruction et l'unification de l'Europe, le rôle central dans l'équilibre mondial de l'Amérique et de l'OTAN, l'évolution de l'économie et des échanges. Ainsi, pendant trente ans, il publia plus de 1 400 articles sur ces sujets. L'ensemble offre le tableau le plus complet, le plus lucide et le plus profond du monde de l'après-guerre, tel qu'il s'achève en 1990.
Chaque article est accompagné de notes destinées à éclairer, pour le lecteur d'aujourd'hui, les allusions à l'actualité et les polémiques de l'époque.
"Les études rassemblées dans ce volume, dont quelques-unes remontent à l'avant-guerre, partent toutes d'un même projet : éclairer les problèmes que posent les péripéties de l'histoire contemporaine en les rapportant aux idées des philosophes classiques (Machiavel, Marx, Pareto, Max Weber, Alain) et aux systèmes de la science moderne politique à l'intérieur des États ou entre les États.
Le lecteur percevra l'écho du tumulte du forum dans ces études, engagées et détachées, d'un homme qui n'a jamais franchi le seuil de l'action, "spectateur impur" des batailles auxquelles il ne se mêle que par la plume ou la parole."
Raymond Aron.
Après un quart de siècle de croissance économique, la société moderne doit affronter de nouveaux assauts : les uns, disciples fidèles ou infidèles de Marx, dénoncent ses échecs relatifs ou partiels, les îlots de pauvreté au milieu de la richesse, l'inégalité excessive de la répartition des revenus ; les autres, dont l'inspiration remonte à J.-J. Rousseau, voire aux romantiques, vitupèrent contre la barbarie de la « civilisation industrielle », la dévastation de la nature, la pollution de l'atmosphère, l'aliénation des individus manipulés par les moyens de communication, l'asservissement par une rationalité sans frein ni loi, l'accumulation des biens, la course à la puissance et à la richesse vaine.Le pessimisme ambiant, diffus à travers l'Occident, accentué en France par le choc des événements de mai-juin 1968, imprégnait déjà l'analyse, esquissée dans ce livre, de la modernité. Tout se passe comme si les désillusions du progrès, créées par la dialectique de la société moderne, et, à ce titre, inévitables, étaient éprouvées par la jeune génération des années soixante avec une telle intensité que l'insatisfaction endémique s'exprime en révolte. Du même coup, l'observateur s'interroge sur le sens de cette explosion, sur la direction dans laquelle la société moderne pourrait répondre aux désirs qu'elle suscite, apaiser la faim, peut-être plus spirituelle que matérielle, qu'elle fait naître.Les Occidentaux éprouvent-ils une sourde mauvaise conscience pour s'être réservé la meilleure part des profits de la science et de la technique, ou tendent-ils à se renier eux-mêmes, faute de trouver un sens à leurs exploits ? Relisons Spengler, Toynbee et Sorokine, et ne cherchons pas à prévoir l'imprévisible, le destin d'une civilisation, révoltée contre ses oeuvres et rêvant d'un paradis perdu ou à reconquérir.Raymond ARON1969
La lutte de classes prolonge l'enquête des Dix-huit leçons sur la société industrielle. Les dix-huit leçons analysaient les caractères communs à toutes les sociétés industrialisées et aussi les différences spécifiques des types occidental et soviétique. Selon la même méthode, Raymond Aron analyse cette fois les groupes sociaux et les catégories dirigeantes dans la société de type soviétique et dans la société de type occidental. Il montre en quel sens il y a, en quel sens il n'y a pas de lutte des classes dans l'une et dans l'autre société. Une fois de plus il irritera les dogmatiques de tous les camps et il instruira ceux qui veulent comprendre le monde avant de le transformer.
Par le plus grand analyste et philosophe politique français du XXe siècle, l'étude approfondie de la formation de la pensée et des oeuvres de Karl Marx, si souvent déformées par ses interprètes, est présentée ici pour la première fois de manière claire et strictement fidèle à ce que voulait faire Marx. C'est une « lecture » de l'ensemble des oeuvres de Marx, depuis les manuscrits de 1844 du « jeune Marx » jusqu'à la systématisation de sa pensée par Engels, en passant bien sûr par Le Capital. Le livre regroupe la lecture et les commentaires de Raymond Aron, donnés dans ses cours de la Sorbonne (1962-63).