Avant d'écrire « Le temps du soupçon », commentaire de la dernière conférence de presse du Président de la République, j'ai longuement hésité. Si certaines voix s'étaient élevées, si François Mauriac ou André Malraux avaient répondu au général de Gaulle ce qu'ils auraient répondu à tout autre homme d'Etat tenant de pareils propos, je serais resté au dehors d'un débat dans lequel je ne puis m'engager en toute sérénité. Aucun des écrivains, honneur des lettres françaises, n'a parlé. Je me suis donc résolu ou résigné à plaider contre un réquisitoire d'autant plus insidieux qu'il demeure camouflé. J'ai pensé que ce témoignage ne prendrait sa pleine signification qu'à la condition d'y joindre les articles publiés pendant la crise du printemps 1967 et deux études sur Israël et les Juifs, écrites en 1960 et 1962, à l'époque où l'alliance franco-israélienne assurait aux Français d'origine juive une sécurité morale dont les privent, aujourd'hui, les péripéties de l'Histoire.
Devant le silence comme réponse à leurs appels, certains tissent une trame, créent une parole, adoptent une attitude. Dans l'errance, s'expérimente un chemin initiatique où la frustration du désir les mène à la souffrance et à l'extase. Figure de la jouissance, le terme générique qui s'applique à leurs comportements est celui de "mystique". Lacan dans ses séminaires fait références à certains d'entre eux. Il nous propose une articulation liée au processus psychanalytique.
Le désir traverse tous les sujets, il est l'élément qui fonde l'existence de la pulsion de vie. Sa disparition signifie l'approche d'un état de déréliction et d'absence au monde. Les auteurs choisis ici (Mishima, Joyce, Beckett) marquent dans leur écriture ce débat intérieur ainsi que la recherche d'arriver à exprimer d'une façon incandescente comment atteindre une forme de la jouissance sans s'y perdre. Ce qui n'est pas toujours le cas et alors s'entrouvre l'abîme.
Depuis sa fondation, en 1951, la revue « Preuves » s'est donné pour but de mettre en question les idéologies héritées du XIXe siècle, en les confrontant avec les réalités de la société contemporaine. Fin des idéologies et renaissance des idées, nature de la société industrielle et avenir du Tiers Monde, voies nouvelles de la littérature et de l'art et leurs rapports avec la culture des masses : tels sont les thèmes que « Preuves » tente d'élucider avec l'aide de collaborateurs venus de tous les pays et de tous les horizons de la pensée. Ainsi, par son ouverture aux problèmes mondiaux, aussi bien que par l'intérêt qu'elle porte aux littératures étrangères, « Preuves » s'est constamment proposé d'être, dans son exigence intellectuelle, la plus internationale des revues françaises. Elle se veut présente à l'étude de toutes les grandes questions de notre temps. Les ouvrages qui paraissent dans la collection « Preuves » aux Éditions René Julliard, à la Librairie Plon et aux Éditions du Rocher prolongent les recherches, les enquêtes et les dialogues engagés dans la revue, avec le même souci d'explorer en profondeur les problèmes de notre génération, et de leur faire face.
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
On se souvient des discussions passionnées provoquées par la parution du livre de Raymond Aron, "La tragédie algérienne". Une année a passé. L'auteur considère aujourd'hui qu'un changement décisif est intervenu : si la chute de la IVe République a rendu la raison aux fous et la possibilité d'agir aux gouvernants, alors il vaut la peine de reprendre la parole. On trouvera, analysé dans cette nouvelle étude, le problème crucial de l'intégration de l'Algérie. Raymond Aron juge qu'une telle politique exigerait de la France des efforts démesurés, sans que les résultats en soient assurés à l'avance. Il n'est pas raisonnable de se donner pour objectif de transformer en citoyens français neuf millions de Musulmans, dont une fraction au moins veut un autre destin. La promesse de l'intégration est un chèque en blanc, que la France ne pourrait honorer. L'auteur s'interroge ensuite sur les conditions d'une présence française à long terme en Afrique. Il examine les perspectives de paix en Algérie et de régime militaire en France à la lumière des événements du mois de mai. Si Alger ne devient pas la capitale de la France, la rénovation politique est possible. Mais la révolution du 13 mai doit se hâter de dévorer ses enfants. Plus que jamais, l'avenir des libertés, l'avenir de la France dépendent de la paix en Algérie.
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
D'un bout à l'autre de la planète, des hauts fourneaux surgissent, le pétrole jaillit du sol, les ouvriers s'entassent dans les usines. A travers les cinq continents, les mêmes mots sont employés, les mêmes valeurs proclamées, les mêmes buts visés. Un type de société, la société industrielle, sans précédent dans l'histoire, est en train de devenir le modèle pour l'humanité entière. Tel est le fait décisif qui sert de base au rapport de Raymond Aron et aux colloques de Rheinfelden, qui ont trouvé tant d'échos dans la presse de tous les pays, comme pour témoigner encore de ce caractère universel du temps que nous vivons. Si l'industrialisme est la loi de notre époque, quel est le sens du grand schisme entre les deux sociétés industrielles d'Union soviétique et des Etats-Unis ? La similitude de l'organisation sociale entraînera-t-elle le rapprochement des idéologies, l'atténuation de la rivalité diplomatique ? Comment les sociétés encore peu développées réussiront-elles à s'industrialiser ? Par quelle méthode ? Au-delà de ces controverses sociologiques, les philosophes, savants, juristes, sociologues réunis à Rheinfelden, ont discuté le problème central que pose et qui dépasse la société industrielle : quelle est la valeur de ce nouveau type social ? La production, l'abondance, l'efficacité ne sont pas buts, mais moyens. Le but est la vie bonne, la société bonne. Et par là, l'humanité, aux prises avec le délire technique, retrouve les questions éternelles de Socrate, du Christ, de Bouddha. Robert Oppenheimer, George Kennan, Raymond Aron, Bertrand de Jouvenel, Asoka Mehta, bien d'autres encore, venus de tous les horizons et de toutes les disciplines, retrouvaient une langue commune pour répondre à cette commune interrogation.