Les ouvriers peuvent-ils s'organiser à une échelle internationale pour lutter contre la mondialisation du capital et la concurrence sociale généralisée ? Poser la question pourrait paraître incongru en ce début de XXIe siècle, où les mots d'ouvriers, de solidarité et d'internationalisme s'apparentent, dans le meilleur des cas, aux vestiges d'un passé lointain. L'oubli de cette histoire alimente un débat piégé, dont le schématisme sature et appauvrit l'espace public. Mais ni notre passé, ni notre présent politique ne se résument à une opposition stérile entre libéralisme inégalitaire et repli nationaliste. D'autres voies ont existé, qu'il importe de retrouver pour sortir d'un face-à-face aussi pauvre sur le plan intellectuel que dangereux pour notre avenir collectif. Pendant un siècle, des années 1860 aux années 1970, les mouvements ouvriers, socialistes, anarchistes, communistes, syndicalistes, avec leurs sensibilités propres, furent porteurs d'un projet internationaliste puissant, dont l'objectif n'était pas de fermer les frontières ou de restreindre les échanges, mais de bâtir une mondialisation des solidarités ouvrières, par-delà les différences nationales et linguistiques qui pouvaient les séparer. La défense des classes populaires ne passait pas par le repli, l'autarcie ou le rejet de l'autre, plutôt par la coordination internationale des combats et des revendications. Ce projet ambitieux, auquel bien peu croyaient à ses débuts, fut souvent chaotique, conflictuel et contradictoire. L'empreinte qu'il a laissée sur la fin du XIXe siècle et tout au long du XXe siècle est néanmoins considérable.
Nicolas Delalande est professeur au Centre d'Histoire de Sciences Po. Il a publié, au Seuil, Les Batailles de l'impôt (2011, nouvelle édition 2014). Il est l'un des coordinateurs de l'Histoire mondiale de la France (2017, nouvelle édition augmentée 2018).
Comment convaincre les citoyens qu'il est utile et légitime de verser à l'État une partie de leur argent ? Cette question s'est posée à tous les régimes de 1789 à nos jours. Des révoltes paysannes du XIXe siècle aux stratégies contemporaines de fraude et d'évasion, les charges fiscales n'ont cessé d'être combattues et contournées au motif de leur poids excessif ou de leurs inégalités. Le consentement à l'impôt n'a en effet rien de naturel : dans les démocraties, il repose sur un lien de confiance qu'il faut perpétuellement reconstruire. Fondé sur une enquête approfondie dans les archives, ce livre retrace les nombreuses batailles, intellectuelles, sociales et politiques, qui ont façonné notre système de redistribution et divisé la société française au cours des deux siècles passés.
Nicolas Delalande, agrégé et docteur en histoire contemporaine, est Associate Professor au Centre d'histoire de Sciences Po.
Organisé en 12 chapitres comme 12 leçons particulières, cet ouvrage fait le récit de la transformation politique et sociale dans l'Europe du XIXe siècle, entre la fin des guerres napoléoniennes et « l'ère des masses » qui se dessine à l'aube du XXe siècle.
Cette histoire n'est ni homogène (tensions et conflits la divisent, l'imaginaire de ses frontières et de ses limites y est multiple), ni isolée ou autocentrée (l'expansion européenne est replacée dans le contexte de la « mondialisation » du XIXe siècle et de ses interactions avec l'Amérique, l'Afrique et l'Asie). Elle est nourrie par les apports récents de la recherche (histoire transnationale, histoire impériale, histoire globale, entre autres) et enrichie par de nombreuse rubriques.
Nicolas Delalande est professeur en histoire contemporaine au Centre d'histoire de Sciences Po. En 2016, il est l'un des quatre coordinateurs de Histoire mondiale de la France dirigé par Patrick Boucheron. Il est notamment l'auteur de La Lutte et l'entraide. L'Âge des solidarités ouvrières (Seuil, 2019).
Normalien et agrégé en histoire, Blaise Truong-Loï est doctorant en histoire.
Qu'est-ce que la comparaison ? En quoi est-elle utile au raisonnement historique, et plus généralement aux sciences humaines et sociales ? De l'histoire comparée proposée par Marc Bloch aux débats les plus récents sur l'histoire transnationale et connectée, ce dictionnaire offre un large panorama des références, des concepts, des débats, des méthodes et des outils essentiels à la mise en oeuvre de la démarche comparatiste, à la fois dans l'espace et dans le temps. Ses courtes notices seront utiles à celles et ceux qu'intéresse cette approche, qu'il s'agisse de la pratiquer, de la penser ou de la critiquer, notamment en histoire moderne et contemporaine. Le classement des quatre-vingt-quatre entrées en plusieurs rubriques - » Épistémologies », « Boîte à outils », « Groupes sociaux », « Pratiques politiques », « Cultures européennes », « Lieux », « Croisements », « Temporalités » et « Collectifs » - éclaire les axes et les enjeux explorés par les auteurs ici rassemblés. Principalement historiens et historiennes, sociologues ou spécialistes de littérature, ils ont pour point commun de dialoguer avec la pensée de l'historien Christophe Charle, dont toute l'oeuvre s'est efforcée de proposer une histoire sociale et culturelle comparée à l'échelle de l'Europe.
This book analyzes public debt from a political, historical, and global perspective. It demonstrates that public debt has been a defining feature in the construction of modern states, a main driver in the history of capitalism, and a potent geopolitical force. From revolutionary crisis to empire and the rise and fall of a post-war world order, the problem of debt has never been the sole purview of closed economic circles. This book offers a key to understanding the centrality of public debt today by revealing that political problems of public debt have and will continue to need a political response.
Today's tendency to consider public debt as a source of fragility or economic inefficiency misses the fact that, since the eighteenth century, public debts and capital markets have on many occasions been used by states to enforce their sovereignty and build their institutions, especially in times of war. It is nonetheless striking to observe that certain solutions that were used in the past to smooth out public debt crises (inflation, default, cancellation, or capital controls) were left out of the political framing of the recent crisis, therefore revealing how the balance of power between bondholders, taxpayers, pensioners, and wage-earners has evolved over the past 40 years.
Today, as the Covid-19 pandemic opens up a dramatic new crisis, reconnecting the history of capitalism and that of democracy seems one of the most urgent intellectual and political tasks of our time. This global political history of public debt is a contribution to this debate and will be of interest to financial, economic, and political historians and researchers. Chapters 13 and 19 are available open access under a Creative Commons Attribution 4.0 International License via link.springer.com.