La dernière guerre, Marguerite Duras l'a vécue tout à la fois comme femme dont le mari avait été déporté, comme résistante, mais aussi, comme écrivain. Lucide, étonnée, désespérée parfois, elle a, pendant ces années, tenu un journal, écrit des textes que lui inspirait tout ce qu'elle voyait, ce qu'elle vivait, les gens qu'elle rencontrait ou affrontait. Ce sont ces récits et des extraits de son journal, que Marguerite Duras a réunis sous le titre La Douleur.
Vitry, banlieue tentaculaire, immense, vidée de tout ce qui fait une ville, réservoir plutôt avec, çà et là, des îlots secrets où l'on survit. C'est là que Marguerite Duras a tourné son film Les Enfants : 'Pendant quelques années, le film est resté pour moi la seule narration possible de l'histoire. Mais souvent je pensais à ces gens, ces personnes que j'avais abandonnées. Et un jour j'ai écrit sur eux à partir des lieux du tournage de Vitry.' C'est une famille d'immigrés, le père vient d'Italie, la mère, du Caucase peut-être, les enfants sont tous nés à Vitry. Les parents les regardent vivre, dans l'effroi et l'amour. Il y a Ernesto qui ne veut plus aller à l'école 'parce qu'on y apprend des choses que je ne sais pas', Jeanne, sa soeur follement aimée, les brothers et les sisters. Autour d'eux, la société et tout ce qui la fait tenir : Dieu, l'éducation, la famille, la culture... autant de principes et de certitudes que cet enfant et sa famille mettent en pièces avec gaieté, dans la violence.
Ce livre nous a fait passer le temps. Du début de l'automne à la fin de l'hiver. Tous les textes ont été dits à Jérôme Beaujour, à très peu d'exceptions près. Puis les textes décryptés ont été lus par nous. Une fois notre critique faite, je corrigeais les textes et Jérôme Beaujour les lisait de son côté. C'était difficile les premiers temps. On a très vite abandonné les questions. On a abordé des sujets, là aussi on a abandonné. La dernière partie du travail, je l'ai consacrée à abréger les textes, les alléger, les calmer. Cela de notre avis commun. Donc aucun des textes n'est exhaustif. Aucun ne reflète ce que je pense en général du sujet abordé parce que je ne pense rien en général, de rien, sauf de l'injustice sociale. Le livre ne représente tout au plus que ce que je pense certaines fois, certains jours, de certaines choses. Donc il représente aussi ce que je pense. Je ne porte pas en moi la dalle de la pensée totalitaire, je veux dire : définitive. J'ai évité cette plaie. Ce livre n'a ni commencement ni fin, il n'a pas de milieu. Du moment qu'il n'y a pas de livre sans raison d'être, ce livre n'en est pas un. Il n'est pas un journal, il n'est pas du journalisme, il est dégagé de l'événement quotidien. Disons qu'il est un livre de lecture. Loin du roman mais plus proche de son écriture - c'est curieux du moment qu'il est oral - que celle de l'éditorial d'un quotidien. J'ai hésité à le publier mais aucune formation livresque prévue ou en cours n'aurait pu contenir cette écriture flottante de La Vie matérielle, ces aller-et-retour entre moi et moi, entre vous et moi dans ce temps qui nous est commun.
"Que le cinéma aille à sa perte, c'est le seul cinéma.
Que le monde aille à sa perte, qu'il aille à sa perte, c'est la seule politique."
Marguerite Duras, Le Camion
Cet ouvrage recueille, pour la première fois, un ensemble de textes et d'entretiens de Marguerite Duras, la plupart inédits ou difficiles d'accès, autour des dix-neuf films qu'elle a réalisés des années 1960 à la fin des années 1980. Depuis La Musica jusqu'aux Enfants, en passant par India Song, Le Camion ou Le Navire Night, Marguerite Duras a rédigé des textes pour des dossiers de presse, des notes de tournage et des déclarations d'intention, des commentaires et des réflexions sur ses écrits, ses films et sur la situation du monde et du cinéma. Pour Marguerite Duras, tout est écriture, d'un bref entretien, d'un commentaire de film au roman, à la pièce de théâtre ou radiophonique, jusqu'au film lui-même.
Trouville, Les Roches Noires et les pétroliers d'Antifer. Théodora Kats, la monitrice et l'enfant aux yeux gris de l'été 80. Yann Andréa. L'Indochine, l'alcool, l'amour. Le martyre juif. L'enfance. C'est par le fil rouge de toute l'oeuvre de Marguerite Duras qu'est traversé Yann Andréa Steiner.
Les Cahiers de la guerre constituent la part la plus exceptionnelle des archives déposées par Marguerite Duras à l'Institut Mémoires de l'édition contemporaine (Imec) en 1995. Écrits entre 1943 et 1949, ils ont longtemps été conservés dans les mythiques 'armoires bleues' de sa maison de Neauphle-le-Château ; leur publication donne aujourd'hui accès à un document autobiographique unique, en même temps qu'à un témoignage précieux sur le travail littéraire de l'écrivain à ses débuts. Le contenu de ces quatre cahiers excède amplement le cadre de la guerre, malgré l'appellation inscrite par Marguerite Duras sur l'enveloppe qui les contenait. On y trouve en effet des récits autobiographiques où elle évoque les périodes les plus cruciales de sa vie, particulièrement sa jeunesse en Indochine ; des ébauches de romans en cours, comme Un barrage contre le Pacifique ou Le Marin de Gibraltar ; ou le récit à l'origine de La Douleur, publiée en 1985. Dix 'autres textes' inédits, contemporains de la rédaction de ces cahiers, complètent cette image d'une oeuvre naissante où se dessine l'architecture primitive de l'imaginaire durassien. À mi-chemin de l'oeuvre assumée et du document d'archive, ces Cahiers de la guerre donnent à voir tout à la fois l'enfance d'une oeuvre et l'affirmation d'un écrivain.
'Vous voyez, quelquefois je faisais des articles pour les journaux. De temps en temps j'écrivais pour le dehors, quand le dehors me submergeait, quand il y avait des choses qui me rendaient folle, outside, dans la rue - ou que je n'avais rien de mieux à faire. Ça arrivait.' Outside rassemble une soixantaine de textes, suscités par des événements quotidiens, par l'actualité, écrits avec rapidité à la manière du journaliste, articles 'provoqués du dehors' faits avec plaisir, alimentaires parfois.
Comme Outside, Le Monde extérieur réunit des articles de journaux, des préfaces, des lettres, des textes, les uns publiés entre 1962 et 1993, les autres demeurés inédits. Certains sont nés de l'événement politique ou social, d'une indignation (l'affaire Greenpeace, la campagne électorale puis la victoire de la droite, la montée des intégrismes et du néonazisme, le raid américain en Lybie), certains d'un film aimé, de peintures longuement regardées, d'une rencontre, d'un soir de solitude. Marguerite Duras les a écrits pour le 'dehors, pour sortir au-dehors' et, fragments échappés à son oeuvre, ils en forment une part complémentaire.
Comme Outside, Le Monde extérieur réunit des articles de journaux, des préfaces, des lettres, des textes, les uns publiés entre 1962 et 1993, les autres demeurés inédits. Certains sont nés de l'événement politique ou social, d'une indignation (l'affaire Greenpeace, la campagne électorale puis la victoire de la droite, la montée des intégrismes et du néonazisme, le raid américain en Lybie), certains d'un film aimé, de peintures longuement regardées, d'une rencontre, d'un soir de solitude. Marguerite Duras les a écrits pour le 'dehors, pour sortir au-dehors' et, fragments échappés à son oeuvre, ils en forment une part complémentaire.