Dans le parloir d'un couvent de religieuses de Recife, un journaliste français, Roger Bourgeon, a rendez-vous avec Dom Helder Camara. Ce qui anime cet être passionné, tendrement véhément dans chacune de ses paroles et dans chacun de ses actes ? Les actes et les paroles mêmes de Jésus de Nazareth. Pendant plusieurs heures, plusieurs après-midi, le scénario est le même : le journaliste lit un passage des évangiles et, après un silence, " Dom Helder parle du Seigneur et, souvent, avec le Seigneur ". Publié pour la première fois en 1985, ce livre a été réalisé à partir des enregistrements de ces rencontres exceptionnelles à la fin des années soixante-dix.
En même temps que je constate qu'il est pratiquement vain de faire appel aux institutions en tant qu'institutions, je découvre partout des minorités qui me semblent constituer, pour la justice et pour l'amour, une force comparable à celle de l'énergie nucléaire enfouie, pendant des millions d'années, au plus intime des atomes, attendant l'heure d'être découverte. Ces minorités, dom Helder Câmara les appelle abrahamiques à l'image du personnage biblique qui apprit à ses dépens à réveiller ses frères au nom de Dieu et se mit en marche à travers le désert. Dans une série de brefs chapitres, l'auteur montre la diversité et l'immensité des services que ces minorités, en tout peuple, en tout régime, en toute religion, peuvent aujourd'hui accomplir pour le rapprochement des hommes et la construction effective de la paix par la justice et l'amour.
Au cours de ses " veilles " nocturnes, Dom Helder Camara écrit. Des lettres, des rapports, des conférences. Des méditations aussi. Il les appelle les " Méditations du père Joseph ", du nom qu'il donne à son inséparable ange gardien. Ces méditations ne sont pas des poèmes. Dom Helder ne leur attache aucune intention ni ambition littéraires. Comme des fleurs rustiques, il les voit se faner aussitôt qu'écloses. Il a fallu, il y a très longtemps déjà, l'ordre de son directeur spirituel, puis le soin attentif d'amis fidèles, pour qu'elles soient conservées. Ces sept mille cinq cent quarante-sept méditations conservées, écrites nuit après nuit durant quelque cinquante ans, constituent à la fois un livre de la Sagesse, un hymne à la Création, des Fioretti, une messe sur le Monde... Les méditations retenues ici, et précédées de trois textes de la même veine, sont parues pour la première fois en français en 1980.
C'est en marchant sur l'étroite ligne de crête où se confondent et se distinguent en même temps l'histoire et l'éternité que Dom Helder Camara a traversé le XXe siècle. L'histoire est à chaque instant présente dans sa vie. C'est l'histoire du géant brésilien, de la poudrière latino-américaine, du défi lancé aux empires nantis par l'Internationale des opprimés. L'éternité est plus discrète. Elle est au rendez-vous de la " veille " que, chaque nuit depuis son séminaire, Dom Helder a consacré à la prière. A la charnière de l'histoire et de l'éternité, sans jamais voiler les erreurs commises ni les conversion nécessaires, Dom Helder est l'un de ceux qui ont le plus fait pour libérer le catholicisme.