Roman aux accents autobiographiques, Insoumissions met en scène
un jeune Allemand arrivé au Québec en 1969. Pour lui, l'agitation lors
de la crise d'Octobre amplifie les nouvelles qui lui parviennent de
son pays d'origine, où le terrorisme tient en otage toute l'Allemagne
de l'Ouest. Tandis que les chocs culturels se suivent, à l'Université
Laval où il enseigne, son supérieur, un arriviste magouilleur, tente
d'avoir sa tête. Mais le jeune homme ne se laissera pas faire...
Le directeur place devant moi un stylo, me tend une feuille à en-tête
de l'université : « Votre signature. » Je lis ma démission. Le coup est
ignoble, je connais la femme qui a rédigé ce torchon.
« La fourberie appuyée sur le bras de la méchanceté », aurait dit
Chateaubriand.
Je me lève, saisis la lettre. « Je ne signe rien de ce qui vient de vous.
Je partirai au moment qui me conviendra. »
L'autre hurle : « De l'insoumission ? Des menaces ? Vous refusez
d'obéir ? »
Onze nouvelles qui empruntent le schéma suggéré par des proverbes de diverses provenances (Scandinavie, Afrique, Japon, France...).
Handicapé par un accident dramatique le petit Lennart Teufel est condamné à regarder la vie à travers sa fenêtre. Une succession de hasards le conduisent à la Signora, une ancienne concertiste devenue professeure de piano. Ayant remarqué sa voix, celle-ci le prend sous son aile et, redécouvrant des méthodes inutilisées depuis des siècles, entreprend la formation d'un de ces phénomènes d'autrefois, le « musico ». À la mort de la Signora, la carrière du jeune homme est prise en charge par un critique musical, ancien élève de la pianiste. Lennart n'est plus, reste Orfeo, la bête de scène.
Maître relieur, Denis Giroux exerce son art avec passion et respect. Depuis plusieurs années, il s'occupe de sa mère, hospitalisée dans un centre de soins de longue durée, figée dans l'attente de la mort. Lorsqu'il perd la femme qu'il aime, fauchée par un cancer fulgurant, Denis craint de perdre pied. Pour apprivoiser sa peur de l'inéluctable, il consigne patiemment le meilleur et le pire du passé familial, le restaure avec minutie comme il le ferait pour un livre abîmé, découvrant comment ses parents, ses frères, sa soeur, ses amis, et surtout son maître, ont lentement façonné son existence.
Le roman s'ouvre sur le récit d'un meurtre en apparence gratuit. Élodie reçoit les confidences de l'assassin, M., qu'elle dit aimer. Mû par une rage profonde, M. fait preuve d'une intolérance radicale, celle qui dicte de A à Z sa solution finale. Dans un bar, sa route a croisé celle de Robert, un quinquagénaire cherchant à retrouver dans les furtifs contacts avec de jeunes hommes l'émoi initial éprouvé à quatorze ans pour un condisciple d'une beauté insolente. Habile équilibriste, Hans-Jürgen Greif place ses personnages sur le fil d'une lame acérée. Personne n'en sort indemne.
Ce roman raconte la vie du peintre bernois Niklaus Manuel, dit Deutsch, actif au XVIe siècle, au moment où la Réforme luthérienne s'esquisse.
Hambourg, 1980. Leurs diplômes universitaires en poche, Dirk et Rita se marient dans l'emportement du coup de foudre. Le bonheur pourtant sera de courte durée. Rita revient sur la promesse faite à Dirk de ne pas avoir d'enfants, déclenchant ainsi une longue et grave crise dans ce couple qui, vu de l'extérieur, se présente comme un modèle. Cependant, le véritable drame se joue dans la prison intérieure que Dirk se construit au fil des ans, avec ses lettres, ses photos d'enfants, son accordéon et l'alcool. Impuissante, Rita assiste à l'effondrement de celui qu'elle aime malgré l'énigme qu'il s'obstine à rester pour elle.
Dans son neuvième roman, Hans-Jürgen Greif mène ses personnages aux portes de l'enfer, où les ombres du passé minent les certitudes d'une société basée sur les convenances. L'auteur, expert à relever les mouvements de l'âme, livre avec Le photographe d'ombres une oeuvre bouleversante.
« N'oublie pas qu'à Rome, tu es un pèlerin aveugle qui cherche son chemin, alors que les vipères le menacent à tout moment. À partir d'aujourd'hui, tu te feras beaucoup d'amis. Ils te jureront fidélité et dévouement éternels. En réalité, les sourires et les mots flatteurs cachent un travail de sape. Un jour, le sol s'ouvrira sous tes pieds et tu tomberas dans l'abîme. »
Cette prédiction émane d'un pape victime d'un complot en septembre 1303. Elle ne pourrait être d'une plus grande actualité. Pouvoir, ambition, argent, guerre, voilà ce qui a créé l'Occident tel que nous le connaissons aujourd'hui. La question se pose : depuis la Renaissance, la papauté, tout comme les chefs d'État des nations européennes, ont-ils fait avancer l'être humain ? Sommes-nous différents de ceux qui ont vécu il y a de cela six ou sept siècles ? Nous continuons à vouloir dominer l'autre, à tenter de le réduire au silence parce qu'il est différent. À chaque génération, l'humanité se retrouve au bord de l'abîme.
L'écrivain féru d'Histoire qu'est Hans-Jürgen Greif a retenu trois complots célébrissimes qui ont changé le cours du monde. Les narrateurs de ses novellas, un pape, un cardinal et un moine, se confient dans des écrits intimes et cherchent à démêler le vrai du faux des drames dont ils ont été témoins. La prose tendue et méticuleuse de l'auteur nous plonge avec maestria dans l'univers des nobles ou roturiers italiens, où la cupidité et la soif de pouvoir n'ont d'égales que la richesse des arts de la Renaissance.
Qu'il écrive sur la musique, la peinture, Dieu et le diable ou les chats, qu'il situe ses histoires au Québec, en Allemagne, en Italie, ou au Maroc, Hans-Jürgen Greif place l'être humain, avec ses forces et ses faiblesses, au centre de son oeuvre.
Dans Échardes, son quatrième recueil de nouvelles, l'auteur expose certains comportements humains à travers des portraits saisissants d'hypocondriaques, de menteurs, d'acariâtres, de vieillards qui ne veulent pas s'éteindre, de jeunes malappris et de revanchards. Il nous rappelle que si, pour certains, la vie est une écharde qu'il faut extirper de soi, la mort, elle, se présente quand bon lui chante.
Dans ce troublant roman où alternent les voix de Jean-Loup et d'Hortense, les auteurs, Hans-Jürgen Greif et Guy Boivin, nous convient à la rencontre d'un couple en apparence banal. À partir de leur rencontre à Québec dans les années 1970, le lecteur est témoin de la débâcle d'une cellule familiale menée de main de fer par une Hortense manipulatrice, colérique et diabolique. Jean-Loup, un immigré français solitaire, coupé de sa famille et de ses racines, peine à trouver les ressources matérielles et émotives qui lui auraient permis de résister à ce mur de volonté et de hargne. Campé dans l'univers de l'histoire de l'art et de la bibliothéconomie, Le pélican et le labyrinthe ne prétend pas fournir de réponses aux grands maux des couples d'aujourd'hui. Il met plutôt en lumière les effets dévastateurs de certains traits humains.
Le pélican et le labyrinthe est la troisième collaboration de Hans-Jürgen Greif et Guy Boivin (La bonbonnière, 2007 ; Le temps figé, 2012).
Les Saintes Écritures relatent l'histoire de Job, un homme riche et béni de Dieu auquel celui-ci impose une série d'épreuves pour prouver à Satan que cet homme lui restera fidèle. Hans-Jürgen Greif reprend cette histoire en retraçant d'abord la généalogie de Job depuis Adam et Ève en passant par Abraham, Noé et Jacob. Par le biais de la joute qui oppose Job à ses deux tortionnaires, l'auteur nous invite à réfléchir sur le rapport entre le l'humain et le divin. Le ton est volontiers irrévérencieux, le rire parfois grinçant.
La colère du faucon, c'est celle de Falk né pendant la Seconde Guerre mondiale en Sarre. Déjà marquée par les privations engendrées par la guerre et les brimades de son frère aîné, la vie de Falk devient un enfer lorsque le père, un officier de la Wehrmacht est libéré. Le petit Falk subit ses sévices dès le premier jour. Maltraité, rejeté, haï, il est en outre trahi par sa mère, jusqu'alors la seule source de tendresse. Jurant de se venger de celui qu'il se refuse à considérer comme son père, il devra se construire une carapace pour survivre au mépris et à la violence.
Marie-Almande, Marien, Polycarpe, Richarde : le roman de Hans-Jürgen Greif et Guy Boivin plaît dès lors que commencent à tomber, de-ci de-là, les ahurissants prénoms d'une famille québécoise dont nous suivrons la trace d'une terre de roches à la ville, du XIXe siècle à maintenant. Génération après génération, la tribu redoute que ne se réalise la funeste prédiction d'un aïeul doté du pouvoir de prophétie : la disparition du nom.
Cette obsession compose, de portrait en portrait, de lubie en extravagance, une image de ce que fut et reste notre société, fondamentalement inquiète de sa survie. La truculence attendue (à quels phénomènes avons-nous affaire !) est rendue dans une belle et digne sobriété de tonalité : les personnages sont drôles, mais le comique de caractère ou de situation nous en révèle l'humanité plutôt que le ridicule. Rarement voit-on pareille galerie de personnages ! S'il existe une mythologie québécoise, on la trouvera ici.