"Éloge, élégie ? À peine ai-je posé les yeux sur ma Belgique et sur la mer et l'enfance, qu'une mélancolie intempestive se lève, comme une vapeur ou une brume.
Peut-être incommode, en début de livre.
Et pourtant.
Et pourtant, tout Belge sait que les choses commencent par du brouillard ; tout matin, par cette humidité opaque que les yeux ou les phares des autos doivent vaincre.
Marie Gevers parle de "la source du gris", qui est à la fin "une grande joie".
Le brouillard est un chemin, lui aussi. Un passage. Nous verrons où lui et la mélancolie nous mènent, vers quel jour, vers quelle lumière."
Ce petit éloge, dense et poétique, transporte le lecteur au coeur de la Belgique.
"L'art, le Grand Art, ne m'avait jamais accueilli. Mais bientôt, des visiteurs du monde entier m'admireraient sans le savoir derrière le nom de Magritte, de Delvaux, et de tant d'autres."
Un artiste inaccompli, menant une vie solitaire sur les sables du Nord, va se révéler, par un enchaînement de circonstances presque fortuites, un faussaire génial et prolixe...
Ce bref roman, mené de main de maître, nous convie à une réflexion pleine d'une ironie mélancolique sur l'art, la vérité et le mensonge.
Une théorie prétend qu'il suffit de six poignées de main pour relier une personne à une autre, où qu'elles soient dans le monde. De 2008 à 2012, alors que les Espagnols s'enlisent dans la crise économique, que les indignés se lèvent et que l'indépendantisme commence sa grande remontée, nous suivons une vingtaine de personnages, leurs aventures, leurs ambitions et leurs visions du monde, bien souvent contradictoires. Au centre de cet écheveau d'intrigues, Barcelone en majesté : son architecture, son histoire, ses atmosphères.
Grégoire Polet déploie son art du récit pour rendre à Barcelone toute la joie et la passion qu'elle lui inspire.
Prix Amerigo-Vespucci 2015
Ecrites du fond d'un café, d'une bibliothèque ou d'un séminaire, ces microfictions évoquent, par autant d'instantanés, la vie des Belges à travers l'oeil plein d'humour et de dérision de Grégoire Polet
Belgiques est une collection de recueils de nouvelles. Chaque recueil, écrit par un seul auteur, est un portrait en mosaïque de la Belgique. Des paysages, des ambiances, du folklore, des traditions, de la gastronomie, de la politique, des langues... Tantôt humoristiques, tantôt doux-amers, chacun de ces tableaux impressionnistes est le reflet d'une Belgique?: celle de l'auteur.
À PROPOS DE L'AUTEUR
"Ecrivain. Né en 1978 à Bruxelles, docteur en lettres de l'université de Louvain. Son oeuvre romanesque est publiée depuis 2004 aux éditions Gallimard et traduite dans plusieurs langues. Nommé dans la sélection du Goncourt pour Leurs vies éclatantes (2007), lauréat du prix Amerigo Vespucci avec Barcelona ! (2015), il a reçu en 2016 le prix Félix Denayer de l'Académie de Belgique pour l'ensemble de son oeuvre. Également scénariste et réalisateur de films documentaires pour la chaîne de télévision ARTE. Dernier titre paru: Soucoupes volantes, Gallimard, 2020. (Prix de la nouvelle de la ville d'Ottignies-Louvain-la-Neuve)."
La gourmandise est toujours sans gravité, c'est ce qui fait tout son charme. La gourmandise est comme un tableau où l'on utiliserait pas le noir, seulement des couleurs claires, des jaunes de Tiepolo, des bleus et des blancs de Boucher, des verts frondaison de Fragonard ; la gourmandise à table, c'est la gaieté au théâtre ou la galanterie en amour (trois G), sans gravité, mais allant tout de même, en s'échelonnant, de la grossièreté jusqu'au raffinement le plus exquis.
"- Emmène-moi à New York!
- Tu sais, petit, New York, c'est trois meurtres par jour et une personne sur cinq dans la misère.
- Et alors! Moi, je ne veux pas rester ici. J'ai peur. J'ai peur de Belito. J'ai peur d'avoir douze ans, j'ai peur d'aller à la ferraille.
Barcelone, quartier populaire de Poble Sec, sur l'âpre versant de Montjuïc. Août. Chaleur.
- Tu ne parles pas sérieusement, Chucho.
Sur le trottoir, la plus belle journée de sa vie commence enfin. Un peu d'air glisse de la montagne vers la mer. La ville est libre, lumineuse. Un frisson monte dans le corps du gamin. Le monde, le temps s'arrêtent. Et le matin, qui toujours a dit bonjour, aujourd'hui dit adieu.
- Si. Emmène-moi à New York."
Vingt-quatre heures dans la vie d'un gamin. Vingt-quatre heures de bagarre entre un rêve et une réalité. Et une petite histoire du monde.
Paris, une semaine de mai caniculaire. Du lundi au samedi, dans les alentours de l'église Saint-Sulpice, à l'occasion d'un mariage et d'un enterrement, une vingtaine de personnages principaux vont se croiser, se heurter, s'aimer, se quitter ; certains verront des projets essentiels se réaliser, d'autres s'effondrer tout espoir... Le roman explore, dans un enchaînement de plans successifs, ces vies tressées avec une exceptionnelle virtuosité, formant la trame d'une réflexion à la fois jubilante et profonde sur l'amour et sur l'art.
"Le type montait sur le toit de la maison et faisait avec un drapeau des grands signes à on ne savait trop qui.
Jean-Paul, ça l'incommodait. Certainement. Ça le mettait mal à l'aise. Il avait acheté le terrain, la ferme, et il s'était assuré qu'il n'y avait pas de nuisances, voie ferrée, pylônes haute tension, porcherie nauséabonde dans l'entourage. Il ne pouvait prévoir que sur le toit de la paisible maison voisine, où habitait un notaire à la retraite, un énergumène viendrait lui susciter des angoisses. Parce que c'était d'angoisse qu'il s'agissait. Nulle autre nuisance. Le bonhomme ne criait pas, ne faisait rien de répréhensible. Mais il portait un uniforme militaire, treillis et casquette de l'armée serbe, et agitait un drapeau rouge. Debout sur le toit."
Dans les montagnes de Serbie, une maison tranquille devient le rendez-vous des amateurs de soucoupes volantes.
À Bruxelles, l'enregistrement d'un virtuose du violon fait apparaître des fantômes.
À Kosice, Slovaquie, un homme adopte un ours.
Un autre oublie son téléphone dans un restaurant d'Oslo.
À Paris, des collectionneurs sans scrupule se refilent un douteux manuscrit de Napoléon...
Entre réalisme grinçant et fantastique teinté d'une mélancolie légère, ces dix-sept nouvelles de Grégoire Polet restituent avec vigueur et humour la vérité des êtres, tout en laissant une place au rêve.
"C'est vrai que je l'ai payé cher. Une jambe et un bras, tout de même. Et puis, plus beaucoup de temps à vivre. Mais : on y est. Le renouveau politique de l'Europe, ça y est, le mouvement est lancé. La VIe République, la fédération d'un noyau dur dans l'Union, c'est en route. Ça n'a l'air de rien, maintenant que c'est fait. Mais qui aurait parié un kopeck là-dessus il y a à peine cinq ans ?"
Le roman met en scène, de façon réaliste et ironique à la fois, l'irrésistible ascension de TOUS, un mouvement de démocratie directe en France et en Europe, à travers les yeux d'une jeune activiste belge, d'un vieux diplomate grec et d'un citoyen polonais.
C'est le roman des chemins qu'on n'a pas pris, le roman d'une génération qui a emprunté les voies de la politique pour reprendre goût à l'avenir.
C'est le roman d'une réalité qui n'a pas eu lieu.
Pas encore.
« Le départ, le long voyage solitaire, le sauvetage imaginaire par l'amour et la dure réalité. Voilà tout. C'est la vie et le rêve de mon personnage. Qui s'en va. Seul, au volant. Sur les infinies autoroutes. Il y a peu d'objets aussi poétiques dans la vie moderne et quotidienne qu'une autoroute. Sa longueur, son rythme, c'est de la musique, c'est du défilement, c'est en sens unique - une tragédie. Et il y a peu d'expériences également poétiques qu'un long trajet solitaire : métaphore directe du souvenir, de l'immobilité de l'individu au volant du temps qui file. Violence de la vitesse, vulnérabilité devant l'accident, territoires réduits à des images qui passent. La voiture des gens seuls au volant connaît plus et mieux leurs pensées que les chambres et les oreillers. La voiture, c'est le lieu moderne de la rêverie. Un haut lieu de la littérature. » (Grégoire Polet)
Ariana, jeune Espagnole, connaît une histoire d'amour fulgurante avec un homme beaucoup plus âgé qu'elle. Leur liaison dure dix jours, au terme desquels l'homme disparaît à jamais, laissant en elle une blessure béante. Plus tard, Ariana se marie, a des enfants, une vie apparemment comblée. Et pourtant elle reste hantée par ce vide qui va grandissant.
Explorant au plus près la conscience d'Ariana, ses rapports avec le monde, avec les hommes, avec ses enfants, avec la mort, Grégoire Polet fait entendre une voix déchirante. On a rarement écrit des pages aussi profondes sur le sentiment de la perte amoureuse.
Dans Paris. Des regards échangés, des vies qui se croisent, qui s'entremêlent. Emma et ses jolies chevilles ; Jean, le beau et patient attaché de presse d'Irwing, écrivain génial, indiscipliné et sur la touche ; Paulo, amoureux de sa mère comme tous les enfants ; Monsieur Daniel, le vendeur de Kleenex... Mille destins suspendus les uns autres par un lien ténu et imprévisible, l'amour.
Grégoire Polet, plusieurs fois primé pour ses romans, nous livre ici un de ses plus beaux écrits.
« Meers devait être du repas. Il n'était pas du genre à louper une soirée à table avec André Gide. Il n'arrivait pas, pourtant, et Franck rougissait de cette impolitesse. On retarda le passage à table, puis on y passa sans Meers. Après l'entrée le brave homme entra. Il dit : Elskamp est mort. » Grégoire Polet
« À Saint-Amand, sur l'Escaut,
près du tombeau de Verhaeren,
où le fleuve fait un coude,
un oiseau de mer, comme une pensée,
jouait dans le vent à faire du sur-place. »