Rejetant les définitions de Gustave Flaubert et de Jules Renard : On appelle bourgeois quiconque pense bassement, et Les bourgeois, ce sont les autres, Georges Elgozy qualifie de bourgeois quiconque possède quelque bien ou quelque pouvoir. De cette bourgeoisie, désormais majoritaire dans les pays industrialisés, il dénonce la caractéristique la plus révélatrice : l'irréductible instinct de domination, qu'il justifie cependant par la volonté de chacun d'échapper à la domination des autres. Un seul être commande et tout est salopé. De fait, un supérieur dont on dépend, oblitère la joie que l'on pourrait éprouver à commander cent ou mille subalternes. L'auteur n'a aucune peine à démontrer que nous sommes tous des socialistes français : la majorité de nos concitoyens, qui récuse le marxisme, aspire sincèrement à plus de justice et de liberté, à plus de responsabilité et de dignité. La société post-libérale que préconise l'auteur n'a point d'autre évangile : conjuguer, au présent comme au futur, liberté et socialisme. Parmi les valeurs nouvelles de cette éthique sociale, Georges Elgozy privilégie les libertés plurielles, face à une administration multiple et à une singulière technocratie, ainsi que face aux syndicats, aux partis, aux ordinateurs. Assurément, une sécurité absolue et généralisée ne se substituera point à celle que l'État doit accorder aux épaves sociales ; un égalitarisme de système finirait par faire disparaître tout sentiment de responsabilité chez nos concitoyens. La société post-libérale que nous propose Georges Elgozy, au contraire, se devra de répartir le plus de responsabilité possible au maximum de Français. Il s'agira, pour nos politiques et pour nos technocrates, non point d'empêcher les gens de s'occuper de ce qui les regarde, selon l'expression de Valéry (Paul) - mais d'inciter les gens à s'occuper eux-mêmes de ce qui les regarde.
Animés d'une volonté de changement, nos dirigeants ont décidé, à la suite d'une longue série de changements dans divers secteurs, de réformer l'entreprise. Or, l'entreprise, organisme privé d'intérêt public, est le coeur même d'une société dont elle encaisse de plus en plus mal les coups, les à-coups, les contrecoups. Plus que de réforme, c'est de sauvetage qu'il devrait être question. Victime des pesanteurs sociologiques et de l'énergie de la crise, l'entreprise est en péril. On peut craindre que, sous les coups de pouce des gouvernants, et sous les coups de force des syndicats révolutionnaires, l'entreprise-panacée ne finisse par assumer la plupart des fonctions dévolues jusqu'ici aux organes de la cité ou de l'État. Nos entreprises réformées ne se changent-elles pas, progressivement, en paroisse, en marché, en maison de la culture, en université, et même en forum ? De ce séisme de réformes pourrait bien jaillir une éruption de paternalisme à odeur de soufre. Les secousses des revendications systématiques précipiteraient ainsi le salariat dans les crevasses de l'ère tertiaire, ou dans les culs-de-basse-fosse d'une féodalité plus contraignante que l'État. D'autre part, les menaces de chômage et les maléfices des mauvaises gestions ne disparaîtront pas comme par magie à l'arrivée de membres du prolétariat dans les conseils de surveillance... Les désenchantements ultimes accablent toujours l'homme à proportion de ses enchantements initiaux. Par l'auteur du Bluff du futur et du Désordinateur.
Dans ce nouveau livre, l'auteur du Désordinateur s'attaque avec une véhémence, tempérée d'humour, au futurisme, ce fléau du présent qui sévit de Rome à Dauphine, de Berkeley à Hiroshima, de Santa Monica à Novossibirsk, de Harvard à Arc-et-Senans. Nos "prévisionnistes" ont bonne conscience, bercés par leurs illusions. Le drame commence lorsque, mal réveillés, les hommes tiennent pour vraie une mystification. Ainsi se dessinèrent à grands traits - selon les presbyties ou les myopies des prévoyants - le profil mussolinien de l'an 1985, la silhouette bourrelée de repentirs du XXIe siècle, la face cachée de l'an 2000. Des caricatures capables, tout au plus, d'amuser des enfants. Celui qui s'adonne à une tendance - si objectif qu'il soit ou qu'il paraisse - ne saurait être que tendancieux. Bien que fanatique du bricolage, Pascal n'eût jamais rédigé un ouvrage de prospective intitulé 1785... Et c'est dans une spiritualité dépourvue de tout esprit prospectif que Bossuet "oraisonnait" sur l'au-delà. L'ordinateur, il est vrai, n'était pas encore né pour multiplier la présomption de l'homme par l'infini de l'avenir. L'humanité ignore ce qui l'attend au premier tournant a fortiori aux suivants. Tout événement nouveau dépasse et confond nos "informagiciens". Si le présent est gros du futur, le moins que l'on puisse assurer, c'est qu'il fait souvent fausse couche. Il est confortant que soient, de temps à autre, mystifiés les mystificateurs. Une nouvelle fois, nous devons cette satisfaction à Georges Elgozy.
Révolution permanente aux États-Unis, l'automation bouleverse la condition humaine, cependant que les opinions continuent à diverger en Europe sur les définitions et sur les conséquences du phénomène. L'Informatique réagit sur l'individu, sur l'entreprise, sur la nation, plus que ne le ferait une guerre civile inter-européenne ou des hostilités planétaires. Si meurtriers que fussent les conflits mondiaux, du moins respectaient-ils certaines notions de travail, de salaire, de politique, de profit, de marché, que la technologie menace d'ébranler. Après avoir démythifié l'automation, Georges Elgozy expose son véritable rôle dans la vie de chacun, aujourd'hui et demain. Ayant dégagé les supériorités respectives de l'homme et de la machine, il révèle les bons et les mauvais usages de l'ordinateur. Personne avant lui n'avait encore confronté les politiques et les réalisations des grandes nations, en informatique comme en automatique, qui constituent désormais les plus sûrs fondements de leur puissance. Pour la France, sinon pour l'Europe, cette comparaison prend forme de réquisitoire. A Georges Elgozy revient, sans aucun doute, le mérite d'avoir élaboré le premier ouvrage général sur le sujet dominant de notre temps.
À nouvelle société, anxiété nouvelle. La mutation industrielle d'une société n'assure pas nécessairement le bonheur de ceux qui la constituent, il semblerait même que les contraintes de l'abondance soient plus exigeantes que celles de la pénurie. Soumis aux à-coups techniques, les travailleurs redoutent à la fois l'inflation et le chômage. A notre époque, ou l'automation entame et modifie le capitalisme libéral et le socialisme orthodoxe, chacun devrait prévoir l'évolution de son environnement, de son travail, de ses loisirs et de ses idées. Néfaste à maints égards, la technologie pourrait guérir bien des maux qu'elle engendre et résoudre, par exemple, la question menaçante de la pollution. Elle pourrait être aussi en mesure de réparer les pires injustices, de pallier les inégalités scandaleuses, de corriger les absurdités excessives. Car il ne faut pas oublier que l'individu importe plus que la société. L'auteur ne se borne pas à définir et à comparer les diverses sociétés contemporaines ; il révèle les éléments qui bloquent leurs évolutions. Il évalue les moyens dont disposent la France et l'Europe pour faire du vieux continent un monde nouveau. Avec humour et gravité, Georges Elgozy dessine à grands traits la silhouette d'une collectivité où les citoyens trouveraient les meilleures chances d'accomplir leur destin.
« Jeunes gens qui hésitez sur le choix d'une carrière, entrez en technocratie ! Tout le reste vous sera donné de surcroît. Tout le reste : standing et respectabilité, comportement et environnement, foi et philosophie, goûts et dégoûts. A quoi s'ajoutera la morale par-dessus le marché ; car bientôt, vous ne badinerez plus avec la morale. Profitez-en, avant de glacer vos cols, de figer vos sourires, d'empeser vos attitudes. O, grandissants dadais : en ces temps de dirigisme grandissant votre ambition doit aller grandissante. Ne balançons pas : il y va du salut de la France, de l'Europe, de l'humanité. Et incidemment, du vôtre. N'ayons pas peur des mots... » La « Lettre ouverte à un jeune technocrate », de Georges ELGOZY est aussi une « Lettre ouverte à un esprit fermé ». De là vient sa portée générale. Il faut que les esprits les plus ouverts la lisent car ils y découvriront, dans un style incomparable, mille formules percutantes, l'humour pointant dans chaque phrase, la critique la plus féconde et la plus dynamique de la société nouvelle, des diplominets et des parcheminets aux Enanistes et aux technocrates.
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.