En 1938, Blaise Cendrars a cinquante et un ans. Il est "le bourlingueur", et l'un des écrivains les plus connus du temps. Pourtant il est triste, et n'arrive plus à écrire. Un soir, un ami lui présente Élisabeth Prévost. Elle a vingt-sept ans, a déjà traversé l'Afrique plusieurs fois ; elle est belle, riche, c'est une aventurière.
Pendant un an, Cendrars part vivre avec elle dans la forêt des Ardennes, où elle élève des chevaux. Auprès d'elle, il puise l'enthousiasme et se remet à l'oeuvre. Ils forment le projet d'un tour du monde à la voile, s'organisent. Mais c'est la guerre : Cendrars la quitte presque sans un mot, pour s'engager à nouveau. Ils ne se reverront pas.
Nul ne sait ce qu'il y a eu entre eux pendant cette année hors du temps, mais cette rencontre fugace, magique, fut importante pour tous deux.
Dans des notes trouvées après sa disparition, Élisabeth Prévost écrit : "Blaise Cendrars est l'homme qui a le plus marqué mon coeur et mon esprit."
« Personne d'autre que le citoyen libre n'a qualité pour juger de l'emploi qu'il fait de sa liberté, sauf à voir celle-ci disparaître. Ainsi la loi ne peut-elle permettre à l'État de restreindre abusivement la liberté d'aller et venir, de manifester, de faire connaître une opinion, de s'informer, de penser pour finir. » François Sureau
Lorsque Chateaubriand déclare que « sans la liberté il n'y a rien dans le monde », ce n'est pas seulement un propos de littérateur. Il exprime cette vérité trop souvent oubliée que « sans la liberté », il n'y a pas de société politique, seulement le néant de ces individus isolés auquel l'État, porté à l'autoritarisme et à l'ordre moral, a cessé d'appartenir. Tel est bien le danger de la démocratie moderne que François Sureau s'emploie ici à désigner tant dans nos moeurs sociales que dans notre vie politique et, sans concession, à la lumière
de nos responsabilités individuelles et collectives. L'homme est voué à la liberté ; il lui revient continûment, avec « patience et souffle », d'en reformuler le projet politique et de n'y rien céder.
"Je me suis demandé depuis, presque chaque jour, si j'aurais pu rédiger autre chose que ce que j'avais écrit."
Paris, début des années 1980. Un ancien militant basque refuse de rentrer en Espagne après vingt ans d'exil. Il se dit menacé de mort et réclame la protection de la France. Pour la justice française, l'affaire est délicate. Accéder à cette demande, c'est nier le retour de l'Espagne à la
démocratie et à l'État de droit. Refuser serait faire preuve d'aveuglement sur la réalité de ces assassinats visant les ex-opposants du franquisme. C'est au narrateur, un jeune juriste encore inexpérimenté, qu'il va revenir de trancher.
Ce livre est le libre récit d'une vie d'homme d'action. Celle de Patrocle Passavant des Baleines, lieutenant de vaisseau, agent de l'État, aventurier bien vivant, qui, à l'instar de Moravagine ou de Battling, ses prédécesseurs, aurait pu, tout aussi bien, n'être qu'une créature de fiction.
Mais, l'auteur peut en témoigner, cette vie de héros, Passavant l'a conduite sans faiblir vingt ans durant. Yougoslavie, Cambodge, Djibouti, Afghanistan...
Comment épouser le mouvement d'une pareille existence, sinon en inventant ce long poème, qui chante un monde où l'action est vraiment la soeur du rêve ?
"J'ai longtemps détesté Ignace de Loyola, lui trouvant l'air d'un égaré baigné de larmes, nous appelant sans discrétion aux sacrifices qu'une imagination médiévale lui faisait concevoir. Je n'aimais ni sa phrase, ni ses deux étendards, ni son passé de soldat ni son avenir de général du pape, ni son visage au front étroit et fuyant.
Son militarisme m'écoeurait, tout comme ses règles et ses disciplines et les mille arguties de sa correspondance. je ne voyais pas comment le même homme qui avait voulu, selon la tradition orientale, devenir fou pour le Christ, et méprisé, pouvait dans ses lettres peser à ce point le pour et le contre et composer avec les puissants."
En un portrait bref et acéré, François Sureau fait céder l'image trop lisse d'un homme auquel les livres pieux sont impuissants à rendre justice.
« On raconte que les mourants revoient dans les derniers instants leur vie entière, en commençant par la fin. C'est ainsi que je vais vous raconter celle de Guillaume Apollinaire, des hasards de la maladie aux hasards de l'origine : une fin, comme un commencement, pris dans le mystère. »Prenant le contrepied des biographies, François Sureau a choisi de remonter le cours de la vie d'Apollinaire, pour mieux s'approcher de ce qui a hanté de manière permanente l'existence de Guillaume : la mort, la vie, la guerre, les femmes, la France, l'étranger.Ce n'est pas tant le destin du poète qui importe à François Sureau, que l'acuité avec laquelle il a perçu le monde dans lequel il vivait et la retranscription unique qu'il en a livré dans son oeuvre. Ma vie avec Apollinaire montre combien elle résonne encore, intacte, un siècle après que la grippe espagnole a emporté l'écrivain.
"La Seine est le fleuve sur le bord duquel j'aurai passé l'essentiel de ma vie. Je me suis aperçu très tard que cette mince coulée grise et verte formait le centre d'un territoire réel et imaginaire, dont je n'avais cessé de vouloir déchiffrer le secret."
De la source à Troyes, de Samois à Évry, Bercy, Paris et au-delà..., François Sureau rapporte de chacune de ses étapes un récit. Vies d'écrivains et de peintres égarés, instants d'amour, incendies, controverses oubliées, départs vers le lointain... Autant de rencontres inattendues qui déplacent notre point de vue et nous invitent à regarder autrement ce fleuve et notre pays.
Au début du siècle, un petit château dans le Berry. Les habitants du pays croient que chaque nouveau propriétaire apporte avec lui une nouvelle guerre. Augustin Pieyre est chirurgien à la Pitié-Salpêtrière. Il aime son métier. Il a pris, croit-il, la mesure de sa vie, entre l'hôpital et ses misères, son père, libraire place Saint-Sulpice, l'amour qu'il porte à sa ville, et les plaisirs de l'amitié. Il qui reste encore à passer de l'autre côté du miroir.
Augustin Pieyre et le château de Bussy se rencontrent. Commencent pour Augustin un parcours initiatique où, sur les traces de ses aînés, il est mis en face de la folie, de l'amour, de la guerre, et de sa propre mort. Le Berry, étangs et forêts, Paris et l'hôpital, la Macédoine et Salonique, l'Égypte et l'Alsace, sont à l'arrière-plan de ce long voyage dicté par le désir de traverser les apparences.
Grand Prix du Roman de l'Académie française
En mars 1918, la Grande Guerre est tout près d'être perdue, sous les coups de l'armée allemande rassemblée pour un dernier assaut. Au même moment, le gouvernement belge demande au gouvernement français de lui prêter la guillotine et le bourreau de Paris pour exécuter à Furnes, en zone d'occupation allemande, un condamné à mort. Voici plus de cinquante ans que la Belgique n'exécute plus ses criminels, mais le roi des Belges a décidé de faire un exemple. La France accepte. Deibler, 'l'exécuteur des hautes oeuvres', se met en route vers Furnes, avec sa machine démontée et rangée dans des caisses, sous la protection d'une petite escorte. Il leur faudra traverser la ligne de front, munis de sauf-conduits délivrés par tous les belligérants. Les États se sont mis d'accord, non pour arrêter la tuerie, mais pour permettre à un bourreau d'exécuter un homme de plus.
S'inspirant de faits réels, François Sureau nous présente un récit dramatique sur l'obéissance aux ordres, une méditation sur la conscience de ceux qui y consentent malgré tout.
Prenant comme point de départ des éléments nouveaux découverts sur Madani, complice de l'assassinat de Charles de Foucauld (1858-1916), et sur un certain commandant Florimond, qui l'interrogea trente ans après les faits, François Sureau tente de relire l'itinéraire de Charles de Foucauld à la lumière du dénuement extrême dans lequel il a choisi de finir ses jours au milieu du désert.
Tout entier abandonné à Dieu, n'ayant converti personne, lâché par l'institution religieuse à la fin de sa vie - c'est la radicalité de Foucauld qui intéresse François Sureau. Radicalité de cet homme qui a grandi dans une famille où dépression et folie de ses parents marquèrent profondément son enfance. Radicalité de sa vie de noceur et d'officier, qui s'oppose à l'extrême pauvreté de ses derniers jours. Radicalité de ce religieux qui s'intéresse aux tribus d'Afrique du Nord, en recueille les poèmes et la langue, quand les colons ne les considèrent que comme des ennemis. Radicalité encore de celui qui voyagea en Afrique du Nord dans un déguisement de rabbin. Radicalité enfin de sa lecture des évangiles, dont il retient la figure de Jésus, parfait anonyme à Nazareth, qui travaille de ses mains et ne prêche pas encore. Après Inigo et Le chemin des morts, François Sureau signe un nouveau récit de vie, où échecs, creux et manques valent plus que hauts faits et triomphes.
Prix Combourg-Chateaubriand 2016
Face à la menace djihadiste, la tentation est grande pour le pouvoir de piétiner les libertés fondamentales. Comme avocat représentant la Ligue des droits de l'homme, François Sureau a plaidé à trois reprises devant le Conseil constitutionnel la non-conformité à notre Constitution de dispositions législatives relatives à l'état d'urgence : la première pénalisait la consultation de sites terroristes, la seconde créait un « délit d'entreprise individuelle terroriste », la troisième entravait la liberté d'aller et venir.
À trois reprises, il a gagné.
Ces plaidoiries constituent un magistral essai de défense de nos libertés publiques. Convoquant Hugo, Tocqueville, Alain, Blum, Maritain ou Simone Weil, François Sureau livre, dans une langue altière et ample, un petit précis de pensée politique et un concentré de l'âme française.
Sans bruit sans trace est un recueil de poèmes «fortuitement» retrouvés dans une prison lointaine. Si l'on en croit le récit du légionnaire Roublev en préambule, l'auteur de ces vers est un certain Passavant des Baleines qui n'est autre que ce héros des conflits en Yougoslavie, Djibouti, Afghanistan dont François Sureau nous avait retracé la vie dans la chanson de Passavant.
Vrai-faux poèmes d'un vrai-faux héros, ce recueil joue à nous conter les aventures d'un homme de guerre contemporain - à l'heure où tout le monde s'efforce de penser qu'il n'en existe plus.
Sur les bords de tout est le troisième volet des aventures du lieutenant de vaisseau Passavant des Baleines. Par l'entremise de ce double, François Sureau revient sur vingt ans d'aventures dans les points chauds du globe, aventures qu'il traite sur un mode à la fois attendri et parodique. Ce récit poétique a l'allure d'un collage où les éléments les plus prosaïques et parfois les plus cruels de notre monde moderne servent malgré eux à une forme d'accomplissement. Hommage à peine voilé à Cendrars comme aux ermites égyptiens des premiers siècles, Sur les bords de tout explore les rivages du fleuve qui nous emporte vers on ne sait où.
Flottant sur le Nil, le corps d'un homme est trouvé, sans vie. Qui avait intérêt à percer à l'aide d'un coupe-papier en laiton le coeur impénétrable de Gabriel Bérard ? Ce banquier si français avait attisé les rancunes, déjoué trop souvent le sort, plaisanté avec la justice, celle des hommes et celle des dieux. Sous l'oeil narquois du juge de Haute-Egypte chargé de l'enquête, Maurice Bassily, deux mondes irréconciliables s'affrontent. D'une part, l'Egypte des pachas voltairiens, des felouques légères, des femmes oubliées par le temps, et du temps immobile qui ressemble à l'éternité. De l'autre, la France d'une certaine banque à la façade noire de fumée, un vieux pays qui se joue à la Bourse, place grisante de toutes les corruptions.
Mais les hommes impurs ou maladroits ne le furent pas toujours. Conte moral, étourdissante et rêveuse fable, roman réaliste, portrait à charge : François Sureau parle de ce qu'il connaît bien, l'Egypte et la France des années quatre-vingt. Et le Nil, indifférent, engloutit les péchés.
François Sureau est romancier. Il est l'auteur entre autres, de la Corruption du siècle (Prix Colette), l'Infortune (Grand Prix du roman de l'Académie française ) et Les hommes n'en sauront rien.
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
Pour survivre aux prisons japonaises dans l'Indochine occupée, Ambroise Vincent, le héros de Dunkerque et des maquis tropicaux, renseigne-t-il les Russes ? Afin de savoir si cet agent, sans doute le plus remarquable du service, est un lâche ou un traître, D. (Ducruech), son chef, lui tend un piège : Claire, une jeune recrue. Vincent, comme chacun d'entre nous, attend depuis toujours l'heure de sa délivrance. Et Claire s'en ira, coupable et enchaînée à son tour au secret. Roman d'espionnage ou conte oriental ? On ne saura pas, tant les deux genres s'apparentent dans le mélange mesuré de cruauté et d'indulgence que révèle une observation, presque tendre, des héros. Le folklore des services secrets est dépeint de l'intérieur : lutte sournoise et universelle de l'invisible avec le visible, goût du secret, manoeuvres de dissimulation et pseudo-énigmes, autant de signes du destin. Enfin la banalité du courage quotidien, un oeil sur le front ennemi et l'autre sur le tableau d'avancement, le portrait d'une bureaucratie dérisoire et héroïque, dans cette France de l'après-guerre où le soupçon divise encore les hommes de devoir tandis que plane la nostalgie de l'Est, de Sedan à Moscou. Ni hasards ni coïncidences. Il n'y a que des fiches tenues par des hommes sur d'autres hommes. A moins qu'il n'existe autre chose dont on ne sait rien, et à quoi le plus puissant d'entre nous ne fait jamais qu'obéir.
"M. François Sureau, ayant été élu à l'Académie française à la place laissée vacante par la mort de M. Max Gallo, y est venu prendre séance le jeudi 3 mars 2022, et a prononcé le discours suivant : Mesdames et Messieurs de l'Académie, Avant de m'asseoir parmi vous, suprême récompense des talents incertains d'eux-mêmes, laissez-moi rester quelques instants debout parmi les vivants et les ombres. Aux vivants je dois ce remerciement que je ferai tout à l'heure. Quant aux ombres, je voudrais faire apparaître, bien sûr, celle de La Fontaine, qui fut un moment avocat à Paris et reste à jamais le plus vivant d'entre nous, lui qui dormait vingt heures sur vingt-quatre et ne se réveillait que pour la poésie et pour l'amour ; mais l'ombre aussi de Chateaubriand exposé pour toujours au silence et au vent de la mer, et celle de Deniau revenant du Panshir, et celle de Jean d'Ormesson parlant d'Augustin avec Ayyam Wassef, et j'étais ébloui, et cet éblouissement n'a pas cessé. Je m'en serais voulu d'annexer ainsi, à l'instar d'un député des candidatures multiples, d'autres fauteuils que le mien, si je ne m'étais souvenu que l'Académie, c'est une Compagnie dans laquelle on entre, et non une circonscription dont on hérite..."
Ce volume rassemble le discours de réception de François Sureau à l'Académie française et la réponse de Michel Zink.