Le XVIIe siècle a été un âge propice pour la littérature des femmes, avant que l'absolutisme et l'austérité religieuse ne viennent jouer un rôle d'éteignoir. Ces contributions éclairent cette littérature protéiforme, de l'amitié littéraire au récit d'exploits amoureux, en passant par toutes les haltes de la carte de Tendre, de très pragmatiques conseils aux sages-femmes jusqu'à une réflexion philosophique sur la condition des filles et le célibat volontaire.
Peut-on faire un travail approfondi sur un auteur avec qui on ne partage rien ? Non, sans doute, et bien des critiques se sont même laissés vampiriser par le sujet de leur recherche. Jusqu'à croiser dans la rue les personnages de ses romans, voire l'auteur lui-même, pourtant mort depuis des lustres. À l'inverse, jusqu'à quel point le critique peut-il souffler à son auteur ses propres souvenirs et ses propres émotions ? François Le Guennec, spécialiste de la littérature féminine (de Marie de France à Renée Vivien), passe dans ce livre comme dans la vie de la critique littéraire à la fiction. Et vice-versa.
Les femmes sont peu nombreuses dans l'histoire des lettres. Pourtant aucune époque n'en a manqué, certaines ont connu le succès et la gloire. D'autres furent souvent rééditées. Cependant, après quelques temps, elles disparaissent des catalogues, et l'histoire leur refuse une influence et une postérité. Les choses ont changé récemment ; l'exemple le plus brillant est sans doute celui de la duchesse de Duras. D'autres auteures se trouvent aujourd'hui plus aisément en librairie, comme Riccoboni ou Charrière. Le choix que voici est une invitation à creuser, à sortir de l'oubli d'autres écrivaines. Il aura peut-être le bonheur de faire consacrer à l'une d'elles une belle recherche universitaire. Il est néanmoins subjectif. Parmi près de six cents noms, j'ai choisi des auteures très rares et d'autres presque célèbres ; certaines fort érudites et d'autres véritablement incendiaires. Mais toutes sont des figures d'une grande sincérité, que l'on aime autant que leurs écrits.
Qu'est-ce qui conduit d'une femme de l'Histoire à une femme de lettres ? Et de celle-ci à une héroïne de roman ? de l'héroïne à la voisine de palier ou à une silhouette entr'aperçue au bord de la route ? Toutes les facettes de la féminité se croisent dans ce livre en forme de labyrinthe. Aux lecteurs et lectrices d'y dérouler leur fil... d'Ariane.
La République, en contradiction avec sa devise, n'assure ni égalité, ni liberté aux femmes. Toutes sont mineures, n'ayant ni droits civils, sous la tutelle de leur père, mari ou frère, ni droits civiques, puisqu'elles n'ont pas le droit de vote. Des femmes pionnières vont initier des luttes qui deviendront collectives, et on peut considérer qu'un mouvement de revendication féministe s'organise pendant cette période de la "Belle Epoque".