Homme à plusieurs facettes : intellectuel universitaire, écrivain, homme politique, Alexandre Biyidi est l'un des auteurs majeurs africains à avoir, comme sociogramme générateur de son oeuvre, la question de l'éclatement et de la dispersion des références culturelles. Ses pseudonymes : Eza Boto, Mongo Beti qui veulent dire respectivement « gens d'autrui » et « le fils des Beti », traduisent sa volonté de s'identifier avec son peuple et expriment au demeurant le poids d'une culture et d'une civilisation. Son texte est donc une interrogation insistante sur les fondements du dialogue culturel, précisément de l'aliénation. Cette contribution se veut une réflexion méthodique, entend se manifester comme une démarche analytique des fondements du Discours chez Mongo Beti. Sachant que « l'intellectualité universitaire instaure une tradition de combat » selon Mémel Fôté, parce que l'intellectuel est un producteur de sens ; que l'écrivain, homme de plume a pour essence la parole qui se veut un appel constant parce qu'elle est le lieu privilégié de l'expression idéologique ; enfin que toute action ou réflexion politique implique un projet de société, la tâche a consisté à questionner son Discours pour savoir comment il écrit le monde. Son style, son esthétique sont-ils réductibles à l'engagement ? Quelles autres figures rhétoriques, quelles techniques narratives son écriture convoque-t-elle ? Quels sont les rapports de productions nécessaires, selon lui, dans le processus de développement des forces productives de l'humanité, l'Africain en particulier, dans la production sociale de son existence ? Face à ce monde ébranlé, en quête de nouvelles frontières, face à « l'humanité qui s'interroge sur son propre destin », quelle vision sociale peut-on tirer de son univers textuel ? Le mobile essentiel est de « découvrir le rationnel dans l'irrationnel du créé artistique » de Mongo Beti, de cerner la matière que mobilisent son esthétique et sa pensée.
La sociocritique est une théorie ouverte en raison de son caractère syncrétique. La variabilité des sociolectes d'un espace à l'autre fait d'elle un lieu d'élaboration d'outils méthodologiques. Ses ressources insuffisamment exploitées, de nombreuses zones d'ombre échappent à la critique. Le projet de cet ouvrage est par conséquent d'entreprendre un travail de réévaluation méthodologique, mais aussi et surtout de lancer un appel à l'élaboration d'une école de sociocritique en Afrique, afin de valoriser la particularité du jeu textuel africain, de montrer sa socialité et son discours historique exceptionnel.
Le livre s'inscrit dans les études décoloniales. La première partie, théorique, analyse les modalités de la décolonialité au regard de celles de la colonialité, notamment la colonialité du pouvoir, de l'être, du savoir, la pluriversalité, la transmodernité, la désobéissance épistémique. La partie pratique montre comment la rhétorique décoloniale se déploie dans le texte romanesque et sa portée.
L'imaginaire social se situe au point de rencontre entre les théories de l'histoire et de la société et les théories du langage et des représentations. Aussi, fait-il l'objet d'une littérature abondante qui lui confère un vaste champ sémantique et impose de nombreuses interrogations: D'où part-il ? Quels sont ses fondements épistémologiques ? Quelles sont ses frontières définitoires ? Comment l'appréhender dans une oeuvre littéraire ? Le présent ouvrage, fruit de la journée d'études internationale du 18 Juillet 2018 à l'université Félix Houphouët Boigny d'Abidjan (Côte d'Ivoire), confirme la transdisciplinarité de l'imaginaire social et soutient que sa quintessence réside dans les évolutions culturelles et historiques, parce que, jouant le rôle de régulateur de la vie collective, il se détermine comme le système centralisateur de la vie sociale. Lieu de germination des mémoires et espoirs collectifs, l'imaginaire social se présente, en effet, comme le noyau structurateur de l'élaboration de l'Histoire entendue au sens hégéliano-marxiste comme une évolution progressive des institutions socio-économico-politiques.
La sociocritique se veut synthèse de toutes les théories de l'homme et de sa production. Si cette orientation a l'inconvénient de lui donner un caractère polysémique, source de confusion et d'usage abusif, elle lui permet néanmoins d'être toujours en émergence avec un vaste champ d'exploitation de ses ressources pédagogiques et analytiques. Ainsi s'explique l'apport considérable de la sociologie de la culture. Toutefois, la sociologie des champs est sujette à controverse dans le monde universitaire sur la question du champ littéraire africain. Aussi s'agit-il d'entreprendre un ensemble de réflexions théoriques répondant au besoin de recentrage, afin de permettre un emploi rigoureux et opératoire de la sociocritique et de susciter le débat sur la problématique du champ littéraire africain au regard de la définition de la sociologie des champs de Pierre Bourdieu.